Littérature russe








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LA BIBLIOTHÈQUE RUSSE ET SLAVE


LITTÉRATURE RUSSE —

Alexandre Beliaïev

(Беляев Александр Романович)

1884 – 1942

LES INVENTIONS DU PROFESSEUR WAGNER

L’HOMME QUI NE DORMAIT PAS

(Человек, который не спит)


1926

Traduction de Morgan Malié, 2012.

Le téléchargement de ce texte est autorisé pour un usage personnel, mais toute reproduction est strictement interdite.

TABLE


1. Un étrange locataire 3

2. « L’affaire des chiens » 8

3. L’homme qui ne dormait pas 17

4. « Dictateur » 26

5. « L’amateur des sciences » 31

6. « Unschädlich und Bequemheit » 35

7. En captivité 40

8. Le sort du professeur Wagner se décide 44

9. La société par actions « Énergie » 50

10. Ce qu’il se passait derrière la fenêtre 57

11. L’empire du sommeil 60



1. Un étrange locataire



— Daisy... Sa perte m’est insupportable ! Daisy est ma meilleure amie... Je me sens si seule...

La citoyenne Chmeman essuyait, avec un petit mouchoir en dentelle, ses yeux de taupe rougis et son long nez.

— Je vous assure, continua-t-elle après avoir poussé un sanglot plaintif, que c’est l’œuvre du professeur Wagner. Je l’ai vu moi-même plus d’une fois mener des chiens en laisse dans son appartement... Qu’en fait-il ? Dieu ! J’ai peur d’y songer ! Peut-être ma Daisy n’est-elle plus en vie... Prenez des mesures, je vous en conjure !... Si vous ne le faites pas, j’irai voir la police !... Daisy, mon pauvre bébé !...

Et madame Chmeman se remit à pleurer... Ses vieilles joues maigres se couvraient de taches rouges, sa lèvre inférieure pendait.

Joukov, président de la coopérative d’habitation, se retourna brusquement sur sa chaise et fit claquer ses doigts. Il perdait patience.

— Calmez-vous, citoyenne ! Je vous assure que nous prendrons des mesures. Mais maintenant, excusez-moi... Je suis très occupé...

Chmeman soupira profondément, salua et sortit. Joukov poussa un soupir de soulagement et se retourna vers Krotov, le secrétaire du conseil d’administration.

— Bon sang !.... Exténuante ! Il y a de ces entêtées !

— Oui... — répondit pensivement Krotov. Pauvre vieille ! Mais il faut enquêter sur cette affaire — c’est tout de même le quatrième cas de disparition de chien rien que dans notre quartier. Les voisins aussi se plaignent. Qu’est-ce que cette peste canine ? Je ne serais pas étonné s’il se trouve que c’est bien le professeur Wagner qui enlève ces chiens. Mais pourquoi diable en a-t-il besoin ? Il fait des faux-cols en fourrure ? Étrange personne ! Suspecte !

— Il est professeur !

— Qu’est-ce que ça fait qu’il soit professeur ? Il fabrique peut-être de la fausse monnaie.

— Avec des chiens ?

— Ne ris pas. Il y a eu des cas ! Les chiens, c’est une toute autre question. Mais fais-y donc attention : toute la nuit, il y a de la lumière dans sa chambre. On voit souvent son ombre sur le rideau. Il traîne dans sa chambre... Un noctambule !

— Oui, un homme étrange... Il y a quelques jours, je rentre à la maison en tramway. Je lève les yeux : le professeur Wagner est assis en face. Il tient un livret dans chaque main et il lit les deux en même temps. J’ai jeté un coup d’œil aux livrets. L’un est en russe, avec plein de chiffres différents, et l’autre est en allemand. Et voilà ce qui est étonnant : chacun de ses yeux en parcourt les lignes séparément : un œil en lit un, l’autre lit l’autre. La receveuse s’approche de lui. « Votre ticket, dit-elle, tenez ! » Il a levé un œil vers elle, mais l’autre continuait à regarder le livre. Elle en est restée baba. Et tout le monde a braqué les yeux vers lui. On le regarde, les bouches s’ouvrent d’étonnement, et lui faisait comme si de rien n’était...

— Il est peut-être devenu fou ?

— Tout est possible...

On frappa à la porte. Fima, la vieille intendante du professeur Wagner, entra dans la salle.

— Bonjour à vous ! Mon barine envoie l’argent pour l’appartement.

— Il a passé, le temps des barines !1 dit Joukov.

— Eh bien, mon maître, quoi, Wagner.

— Eh bien voilà, c’est elle qui va tout nous dire !...

— Raconte-nous, Fima, ce que ton « barine » fabrique avec les chiens. Fima agita désespérément la main.

— Il en a beaucoup, de chiens ? Dis la vérité !

— Combien il a de chiens, je ne peux pas le dire : il ne me laisse pas entrer dans la deuxième chambre, où ils sont avec lui. Mais des chiens, ça, il y en a. On les entend aboyer. Une nuit, j’ai épié par une petite fente. Et quoi donc ? Un chien était assis, attaché court à un collier. Il ne peut pas se coucher. Il meurt visiblement d’envie de dormir. Sa tête pend, comme ça. Et lui est assis à côté et le titille doucement sous le cou : il ne le laisse pas dormir. Et lui-même, il ne dort pas. Il ne dort jamais !

— Comment ça, il ne dort pas ? On ne peut ne pas dormir.

— Vraiment, je ne sais pas, mais il ne dort pas du tout. Ca fait même longtemps qu’il s’est débarrassé de son lit. « Qu’on ne l’évoque même pas, qu’il dit. Les lits, qu’il dit, ne servent qu’aux malades. »

Joukov et Krotov, avec perplexité, échangèrent un regard.

— En voilà un fou !

— Il faut croire que c’est un fou, approuva volontiers Fima. — Mais je m’y suis habituée : je vis chez lui depuis quinze ans — sinon, je serais partie depuis longtemps... C’était une personne ordinaire, mais il ne se ressemble plus du tout depuis un an. Comme s’il avait perdu l’esprit.

— Comment est-ce que ça a commencé ?

— Qui donc le sait ? Un mauvais sort, peut-être ?... Au début, il a commencé par faire une sorte de gymnastique. On entrait dans sa chambre, et on aurait dit qu’il dansait : de la polka avec la jambe droite, et de la valse avec la gauche. Et il battait une mesure différente avec chaque main. Ensuite, il s’est mis à loucher. Il s’asseyait devant le miroir et biglait. Une fois, je l’ai observé, et l’un de ses yeux regardait le plafond alors que l’autre regardait le plancher. J’ai laissé tomber toute la vaisselle — j’étais médusée.

— Tu connais la chienne de Chmeman ? On l’appelle Daisy.

— Toute blanche, avec des poils longs comme ça ? Comment ne pas la connaître !

— Eh bien, ton maître n’aurait-il pas chipé cette chienne ?

— Je ne l’ai pas vu moi-même, mais ça se peut. Et moi qui m’attarde à bavarder alors que mon fer refroidit là-bas... Tenez, l’argent !...

— Pourquoi si peu ?

— Mon barine, mon maître, dit qu’il est inscrit au Tsikapou et a droit à une surface habitable supplémentaire.

— Qu’est-ce que c’est que ce Tsikapou ? demanda Krotov.

— Le Tsekoubou2 ! devina Joukov.

— Qu’il présente son attestation, mais il doit payer comme avant pour l’instant. Transmets-le lui.

— D’accord ! Et, essuyant son nez avec le coin de son tablier, Fima aux joues rouges sortit de la chambre en courant.

— Il faudra prévenir la milice. Ce fou mettra le feu à la maison ou tuera quelqu’un !

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