Soldat du contingent chapitre Premier








titreSoldat du contingent chapitre Premier
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Chapitre 3

LES   CLASSES: 1ere Partie


Deux heures dans ce train quasi vide à destination de la ville de Brive, j’ai beau regarder à gauche et à droite personne de mon âge susceptible de rejoindre le 126e, je descends du train avec la ferme intention de marcher très  lentement jusqu’à la caserne en pensant à la chanson de Sardou  ("Je suis arrivé, un beau matin du mois de mai! avec à la main, les beignets que ma mère m’avait fait, ils m’ont demandé mon nom, mon métier, alors fiers de moi, j’ai répondu artiste de variété, à ce moment là, juste derrière moi, j’ai entendu rire un type que je connaissais pas, le rire du sergent…la la etc…".) et cela pour profiter des derniers instants de la vie civile mais après 500  mètres, voilà t’y pas qu’un bus de couleur kaki s’arrête à mon niveau: ”tu vas à l’incorpo? ”. Putain comment que les chauffeurs sont habitués à nous reconnaître les bleus avec notre sac et notre gueule de six pieds de long, un peu que j’y vais à la caserne et que j’ai pas osé dire que je préférai y aller à pied alors j’y suis monté dans ce bus déjà plein de type qu’on semblait mener à l’abattoir vu  la tronche qu’ils tiraient. Le groupe est dirigé direction le foyer et là je vois un gars à l’accent du sud habillé civil et cheveux long comme tous ceux de la 83/08 qui arrivent ce beau matin , le dab est là accoudé au comptoir comme si c’était son rade habituel ou il vient boire son café tous les matins si bien que j’ai cru qu’il s’agissait d’une sorte de moniteur destiné à nous accueillir  , il y a des mecs comme ça partout où ils sont, on a l’impression qu’ils y sont des assidus et je m’approche naturellement de lui plutôt que de la majorité qui tirent une gueule de veillée mortuaire . Putting cong enculé que ce matin pour venir je pleurai  et toi  t ‘arrives  d’où ? …….. D’Aurillac, 2 heures de train et vous, vous êtes du sud on dirait? – On est de Toulouse, on s’est connus dans le train, c’est où ça Aurillac? …. à 100 bornes à l’est de Brive ……et des patati patata jusqu’à ce qu’un déguisé en treillis ranger béret vienne interrompre nos remontages de moral inter actifs pour nous diriger et nous driver:  “Aujourd’hui on vous incorpore, on vous donne votre paquetage,on vous coupe vos tifs réglementairement et on vous conduit à vos piaules pour y ranger vos armoires réglementairement, je suis le sergent Bétan, ça se voit à cette barète dorée ( qu’il nous montre scratchée sur le devant du treillis) quand vous voulez vous adresser à un sergent, vous l’appelez sergent et pas monsieur ou autre connerie de dénomination venue du monde civil, est ce que c’est clair? ” . Personne ne moufte y compris les grandes gueules de Toulouse. La queue basse, tout le monde le suit ce chef désigné!

Le coiffeur, pas boule à zéro mais presque qu’il m’a fait, les autres on dirait qu’ils ont fait exprès d’arriver avec la tignasse la plus longue et la plus hirsute possible. Quand on en ressort, on est déjà un peu moins civil, direction l’infirmerie où je rencontre un gars d’Aurillac qui me propose de me mettre G3 afin que je sois dispensé de marche étant donné que j’ai une scoliose qui m’afflige depuis mon enfance, le surpoids des cartables à se trimballer à pince de la 6e à la terminale, je refuse, le surprenant: « T’es un drôle de mec,toi! Si tu as envie de marcher , c’est ton problème! »

Direction le fourrier où il faut faire attention car on dirait que les gars ont décidé de nous filer les fringues qui nous vont le moins possible afin de bien soigner notre apparence de bitard, surtout les chaussures rangers extrêmement important de bien les choisir à sa taille pour les marches qu’on va se taper. On met tout dans le sac marin et on nous dirige vers le bâtiment de la 11e Cie d’instruction, c’est des piaules de 8, je me jette sur un lit situé dans un coin afin de n’avoir qu’un autre soldat à côté mais je commis l’erreur de prendre la plus proche de la porte c’est à dire celle où le caporal de semaine va balancer un grand coup de pompe tous les matins. Cette piaule on va y rester durant les deux mois de classes et j’ai pas été gratiné question congénère, je vais m’en rendre compte rapidement, tout de suite un caporal rentre et nous indique comment ranger nos armoires, le treillis de défilé à gauche, le treillis journalier à droite, la boite à cirage à 2 cm du bord, la gourde sur l’étagère du milieu à coté du quart et pas le contraire……pour les ramollis du bulbe , pas évident, faudra leur affecter un soldat débrouillard pour les encadrer.

Le rangement compris , un sergent viens nous expliquer ce qu’est la propreté dans une piaule du 126e RI, pas de poussières nulle part, il nous montre son truc, sa façon de passer le doigt sur les armoires ou de lancer le béret sur le parquet .  “Si la piaule n’est pas impeccable de partout et si il y a une saleté même sous le lit du 2e classe Malvezin lors de la revue précédent le départ en permission, c’est tous les huit qui seront plantés pour la perme du week-end ! Planté! La punition la plus sévère, celle qui dissuade tout récalcitrant de ces belles années 80 dont l’unique objectif est d’aller se trémousser dans les disconight ou pour certain d’aller retrouver leur"copine".

Tout d’un coup, grosses gueulantes dans le bâtiment : RASSEMBLEMENT! Badaboum , tous les bœufs déjà conditionnés à sprinter dans l’escalier quitte à piétiner le malheureux qui se serait viander la gueule dans cet escalier piégeux.

On nous apprend à nous aligner et à former des pelotons de défilé pour marcher au pas “pour aller à l’ordinaire, toujours au pas!”

Il vous manque pas quelque chose, tas de bœufs?”

“On est encore en civil, mon sergent”

Bien observé, remontez dans vos piaules, on va vous apprendre à mettre vos treillis

Putain, il est deux heures et on a rien bouffé depuis 7h du matin, je vous raconte pas l’habillage, moi je connaissais un peu, étant chasseur et pécheur, je mettais les treillis du frangin et il m’avait appris à les mettre, bien serrer le bas du treillis avec la ficelle autour de la ranger et que ça dépasse pas.  Bref après 2 heures, on descend attifés militaire, le béret de traviolle pour la plupart  mais pour nous entendre dire que l’ordinaire a fermé entre-temps: vous boufferez ce soir tas de psycho, d’ici là, on va vous apprendre à marcher au pas!

De 14h à 19h apprentissage de la marche au pas pour la section des conducteurs où je suis affecté, le cirque total, la plupart n’arrivent pas à coordonner jambes et bras mettant en fureur nos jeunes sergents qui sont tous des appelés et qui flippent car il s’agit pour la plupart de leur premier commandement d’instruction de ce fait, ils veulent pas décevoir leur  supérieur. Et ils s’y mettent à quatre à nous gueuler dessus:  Bande de pouilleux , alignez vous, en avant, marche, une, deux, une, deux, le talon gauche martèle le sol en 1er , les psychos (Ceux qui s’emmêlent les pinceaux ont droit à des cours particuliers) .  Le soir on nous accorde le repas, on a 20mn et on doit être présent au garde à vous à 20h30 en bas de la Cie.

Pourquoi faire? : “On va vous apprendre à vous présenter tas de pingouins .Vous allez répéter la phrase suivante les uns après les autres en gueulant le plus fort possible » :

“Soldat Berthou, compagnie Bardin, section Walter, je suis conducteur à l’instruction, à vos ordres mon lieutenant”  Walter c’est l’aspi qu’on appelle mon lieutenant et Bardin c ‘est le capitaine pour cet exercice pédagogique de la plus haute importance,  ça se serait terminé à 22h si le soldat Carival de Bordeaux  n’avait pas répété 15 fois en bafouillant, bégayant rouge écarlate : “soldat Carival , compagnie Bardin, je suis…je suis conss..consst…constructeur à l’industrie..”On n’arrivait plus à se marrer à 11h du soir tellement on était crevés, Carival on le haïssait ! Bon allez vous pieuter les bitards !....Minuit fin de la 1ere journée au 126e RI.

En se pieutant peu d’échanges de paroles dans la chambrée et 7 paires d’yeux haineux à l’égard de Carival le bafouilleur qui nous a fait coucher 1 heure plus tard avec ses borborygmes.

Cinq heures :  « Tatata tatata tatatata tata tatam » le clairon au milieu de la cour, ça avait de la gueule, faut reconnaître et en même temps un caporal qui rentre dans la piaule en hurlant:            «  REVEIL! Vous avez une demi heure pour votre toilette et mettre la chambrée réglementairement nickel et que je viendrai l’inspecter et déciderai si vous pourrez aller prendre votre petit déjeuner tas de couilles molles! »

Tu parles si ça a astiqué sévère la piaule, le caporal rentre et fouine partout, bien sur Carival, son lit, il est pas au carré, il serait plutôt au triangle, on sera pas les premiers à prendre le café ce matin mais on y fait carrément son pieu et on y descend le boire ce café au lait avec pain et beurre bienvenu. La matinée, descente de toute la section encadrée par l’aspirant Walter (ce que j’aurai pu être si j’étais resté dans la salle aux 3 jours de Lyon), un balèze de 1m90 à lunette à qui il reste 2 mois d’où un certain dilettantisme dans son instruction. Son 1er discours : « Les gars vous êtes la section des chauffeurs, vous aurez une instruction où vous passerez beaucoup de temps aux leçons de conduite afin d’obtenir votre permis militaire qui sera validé dans le civil si vous faites pas de conneries, mais croyez moi tout le reste du temps sera consacré à l’instruction militaire proprement dite : marches, tir, lancer de grenades, apprendre à marcher au pas en chantant, exercices de combat sur le terrain de nuit comme de jour, vous êtes au 126e RI,un glorieux régiment, comme vos camarades des compagnies de combat, il faudra mériter votre fourragère à l’issue des 2 mois en faisant la marche de 40 km. Vous allez voir, au début, on rechigne mais l’armée, on finit par aimer ça ! ». Je ne vous dis pas les regards sceptiques qu’on s’échangeait.

Allez , la section formée en plusieurs lignes bien rangées , chaque homme séparé par une longueur de bras, en avant marche .et allez que ça part dans tous les sens, l’aspirant aidé de deux sergents, il a l’habitude et au bout d’une demi heure,ça commence à marcher plus harmonieusement.. «  Quand je répète gauche…. Gauche…., vous heurtez votre talon gauche sur le sol, et puis une, deux, une, deux, à mon signal pour s’arrêter, vous vous préparez et stoppez jambes jointes. »…….Ces singeries vont nous prendre des jours avant de faire marcher harmonieusement notre section.

Et il y a les chants, une fois qu’on sait marcher au pas, la 1ere au 126e RI, c’est Eugénie.

Eugénie, les larmes aux yeux,
Nous venons te dire adieu;
Nous partons de bon matin
Par un ciel des plus sereins.
Refrain:
Nous partons pour le Mexique,
Nous partons la voile au vent;
Adieu donc, belle Eugénie,
Nous reviendrons dans un an.

2. Ce n’est pas drôle du tout
Que de penser à l’amour,
Surtout quand il fait grand vent
Par dessus le gaillard d’avant.
Refrain:

Voilà, cette chanson avait un rapport avec l’histoire du régiment qui au 19e siècle avait envoyé des hommes pour se battre au Mexique comme les légionnaires qui avaient écrit là bas la glorieuse page de la bataille de Camerone.

Au passage, pour les jeunes n’ayant pas connu « la chance » d’effectuer l’armée, voici dans le tableau ci-dessous la distribution des rôles à la caserne du plus bas au big-boss :

Militaires du rang : soldat de 2e classe et de 1ere classe, caporal, caporal/chef

Sous officiers : sergent, sergent/chef, adjudant, adjudant/chef, major.

Officiers : Aspirant, sous lieutenant, lieutenant, capitaine, commandant, lieutenant/colonel, colonel.

Et puis tout en haut les généraux de deux à cinq étoiles.

Ce tableau des grades en vigueur dans l’infanterie va des MDR (militaires du rang) soldats de 2e classe, de 1ere classe, caporal, caporal chef qui eux mangent à l’ordinaire. A partir de sergent on mange au mess et on a sa piaule. Ces galons sont constitués d’un bout de tissu carré qui est scratché devant la poitrine afin qu’on le voie tout de suite (Sur des épaulettes, c’est pour les tenues d’apparat) . A l’époque de l’armée des appelés les gradés appelés étaient distingués des gradés engagés, ces derniers avaient en plus un petit liseron doré.

Mais il existait un autre grade officieux mais qui avait du poids, c’était entre les appelés le nombre de jour qu’il vous restait à tirer, je fus ainsi surpris au bout de 10 jours de voir dans la cour un caporal/chef qui avait mis de corvée un 2e classe et comme celui-ci refusait de le faire le capo/chef lui rappela qu’il était gradé et pas lui et l’autre de répondre :«  48 dans ta gueule et je t’emmerde » ce qui suffit à faire repartir le 3 galons sa bite sous le bras.

Moi, j’en étais donc à ce moment là à un score de 350 déprimant. Inutile de vous préciser que le 1er week-end on le passe à la caserne, ils ne vont pas nous lâcher tout de suite quand même, j’ai pas compté le nombre de vaccins que j’ai subi et qui nous ont occasionnés un mal dans tous le dos pas croyable. Pas suffisant pour nous empêcher de marcher au pas :« Eugénie les larmes aux yeux……. ».

Le dimanche après midi , ils nous laissent dans nos piaules ce qui nous permet de commencer à faire vraiment connaissance, il s’avérait que tous les autres gars étaient du sud ouest , étaient plus âgés que moi et avaient tous commencé à travailler dans le civil et l’armée, ils l’avaient repoussée un maximum sans avoir pu se faire réformer,en sus de Carival plâtrier peintre à Bordeaux, il y avait Portos carreleur à Bayonne, Bléro menuisier à Toulouse, Degoul employé à Millau, Natié chômeur à Castres, Timbrolo manutentionnaire à  Albi et Cavignac vendeur dans un magasin de fringues à Bègles. Tous ces gars avaient des économies, une fiancée d’après ce qu’ils disaient et faire le service venait tout interrompre brutalement. J’avais bien vu que je les intriguais du  seul fait que j’ouvrais un bouquin le soir avant de m’endormir si bien que Portos qui m’appelait l’écrivain  m’apostropha : « Dis donc, toi l’écrivain, qu’est ce que tu fous ici parmi les bœufs comme nous, t’as l’air instruit……. t’aurai pas du être dans l’armée de l’air ou à l’école d’officier? Pourquoi ils t’ont mis avec la section des chauffeurs d’un régiment de truffions».

« Je voulais rester proche d’Aurillac et j’ai refusé les EOR afin de faire comme mes frangins et mon père et être avec les fils du peuple dont je suis issu, les gars, je suis un fils de bouseux, faut  pas croire ! »

Scotchés, les rombiers de la piaule: « T’es vachement con, t’aurai été sergent minimum et t’aurai bouffé au mess, faut être un étudiant  ou un fils de bourges pour raisonner comme ça » dit Portos et Carival de me pointer du doigt en se marrant de toutes ses ganaches jaunies par les deux paquets de gitanes mais sans filtre quotidiennes qu’il bombardait : « Hé, il croyait partir en croisade  l’écrivain, mouarfff , le con! ».

Dur ça va être de s’intégrer après ce début d’autant plus que les gaziers ont du fric et que dès qu’on aura la permission d’aller traîner dans Brive le soir, ils ont l’intention d’aller écluser sévère dans les rades et que moi j’ai pas un radis pour remettre la tournée, va leur expliquer ça !

Le lendemain y a Carival qui remonte tout blanc et qui nous dit : » Le lieutenant Walter a affiché un programme de la semaine pour la section, tous les matins on a les leçons de conduite et les après midi que des conneries comme tir, combat ou marche, putain on va en chier ! On va en chiiiier , quelle connerie la guerre ! »

Les leçons de conduite, ce sont d’autres appelés les moniteurs qui nous les donnent, ils nous traitent nous les bleusailles pire que les sergents, à croire que dans ce régiment chacun maltraite son plus bas que lui à plaisir et c’est ce que je vais découvrir à mon age , la nature humaine est ainsi faite , mon moniteur qui s’appelle Nasri  essaye de m’épater en poussant des accélérations de malade dans les rue de Brive avec la méhari en me disant que quand je saurai conduire comme ça je pourrai causer. Nullement impressionné et répondant un minimum à ses vannes, je vois bien que je l’énerve déjà en ne lui léchant pas le cul comme font tous les autres mais de plus, un jour que j’avais foiré un créneau, le voilà t’y pas qu’il essaye de me taper sur la tête comme n’oserait plus le faire un instituteur à un élève de cp . Sa main rencontre mon avant bras qui avait par réflexe paré son coup ce qui le mit en rage et le voilà qu’il essaye de me retaper dessus et que sa 2e main rencontre encore mon avant bras, je vous avais précisé que je pratiquais assidûment le karaté Shotokan avant de rentrer dans cette caserne,  j’étais même déjà ceinture bleue, alors qu’il armait une 3e tentative, il rencontra mon regard et entendit ceci : «  Tu es mon moniteur , je sais pas si les autres acceptent de recevoir des coups mais le prochain que t’envoies, non seulement je le pare mais je t’en retourne deux dans ta sale gueule de con et je t’éclate tes lunettes de ta fioles, c est pas parce que tu mesures 1m85 que tu me fais peur, si tu veux, on se retrouve dehors en civil dès qu’on a une autorisation de sortie et ça sera où et quand tu veux, étant donné que je suis l’offensé, j’ai le choix des armes mais je te laisse décider: couteau ou à mains nues! »

«  Beuheu… t’énerve pas mais tu comprends, c’est dangereux de rater un créneau, le jour du permis, ils ne te feront pas de cadeaux » qu’il bredouille le Nasri « J’en rien à branler de ton permis connard, s’ils veulent pas me le filer, qu’ils se le carrent dans leur slip kaki je le passerai dans le civil, t’es qu’une lope , une glaire, un étron , tu refuses de t’expliquer d’homme à homme donc tu écrases jusqu’à la fin de mon instruction et tu ne m’adresses plus la parole sauf pour m’apprendre à conduire cette poubelle!»

« Bon, okay, allez pas la peine de s’énerver, rentrons à la caserne, leçon finie pour aujourd’hui » Plus un mot sorti de sa gueule d’enfoiré et une paix royale qu’il m’a foutue jusqu’à la fin des leçons ce taré au nez crochu, j’ai appris par la suite qu’il se comportait idem avec tous les pauvres gars qui avaient pas de répondant ou qui étaient pas impressionnant physiquement, il faisait parti de toute cette espèce de salopards qui abusent d’une situation, d’une fonction pour martyriser les plus faibles et j’avais pas fini d’en rencontrer tout au long de ma vie.

L’après midi, la section va à l’armurerie percevoir, comme on dit à l’armée, les FSA pour marcher avec jusqu’au pas de tir situé à une dizaine de kilomètres. Le FSA ça veut dire fusil semi automatique fait de bois et de métal, c’était le successeur du MAS 36/45 utilisé en Algérie et on s’en servait encore au 126e, les FAMAS ne devaient pas tarder à arriver. Toujours est il qu’il pesait lourd ce flingue avec toutes les autres conneries qu’ils nous obligeaient à porter, gourde pleine, pelle US, chargeurs, masque à gaz, presque 20 kg à trimballer vingt bornes aller retour, une petite marche qu’on va faire quasi quotidiennement en ce mois d’août où on crève de chaud, ça rechigne dur dans cette section de conducteur que ça leur parait le bout du monde 2 fois 10 km avec un fusil , moi ça me délasse car je me rends compte qu’on m’a mis dans une section de geignard mais ça m’intéresse quand même de ressortir d’ici avec mon permis que c’est pas donné dans le civil alors plutôt que de demander audience au capitaine pour qu’il me mute en compagnie de combat ou au PEG ( peloton d’élève gradé pour être caporal ) , je me la boucle et vais continuer à subir les pleurnicheries de Carival, les conneries de Timbrolo et les branlettes bruyantes de Natié dans la piaule.

Le lendemain matin, test de Cooper, ça consiste à nous faire tous courir pendant 12 mn pour savoir quelle distance on est capable de parcourir pendant ce temps. A la fin, compte rendu des performances, sans me défoncer je termine 2e  de la section en effectuant trois Km ce qui me vaut citation par l’aspirant Walter et au retour dans la piaule, les jérémiades : « Hé l’écrivain, je croyais que tu voulais pas être sergent, t’as besoin de galoper comme ça ! » dixit Portos et Carival de bafouiller : «  Tu pouvais pas faire comme nous plutôt que de te te ffaire remma- remarquer, non ! »

« Pour faire comme vous, il aurait fallu que je marche, vous poussez un peu les gars, vous dites ça à un type qui a refusé d’être gradé, faudrait que je fasse semblant d’être paraplégique en plus. »

Voilà l’ambiance dans cette jeunesse française qui ne connaissait de l’armée que le film des charlots : les bidasses en folie , maintenant, amis lectrices et lecteurs , je suis à même d’analyser et de trouver des raisons au comportement de mes semblables car  toute cette doxa antimilitariste,  j’étais pas encore en mesure de comprendre qu’elle faisait partie du grand basculement mis en œuvre par le système , basculement de mai 68 certes mais commencé déjà bien plus tôt, basculement conduisant à l’inversion des valeurs qui ont construit notre civilisation occidentale, celle qui a envoyé un homme sur la lune, basculement des valeurs d’honneur, de patriarcat, de famille, de religion,  de respect des  ancêtres, de la nation vers des non-valeurs d’individualisme, de dissolution de la famille, d’hédonisme, d’athéisme forcené, d’internationalisme d’essence cryptocommuniste, disparition progressive du principe de non contradiction qui constitue un des fondements de notre avancée ( en gros si vous écoutez deux ou trois conversation de vos contemporains ou écoutez nos journalistes vous vous apercevez qu’ils sont capables de dire dans la même phrase tout et son contraire) , c’est-à-dire tout ce qui fait qu’au 21e siècle l’amour de la  tradition  et tout ce qui va avec vous fait passer pour le dernier des ringards.
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