Classe 1èreESL Année 2013-2014
Janvier 2014
Objet d'étude 2-Séquence 3-La ville dans la poésie du XIXe siècle "Ce monde est sale de bêtise, d'injustice et de violence ; à mon avis, le poète ne doit pas répondre par une salve de rêves ou un enchantement de langue ; il n'y a pas à oublier, fuir ou se divertir. Il faut être avec ceux qui se taisent ou qui sont réduits au silence. J'écris donc à partir de ce qui reste vivant dans la défaite et le futur comme fermé. S’il n’est pas facile d’écrire sans illusion, il serait encore moins simple de cesser et supporter en silence. Donc... J’aime à penser la poésie comme un lichen ou un lierre, avec le mince espoir que le lierre aura raison du mur". Emaz. Introduction générale: (à utiliser pour introduire un poème ou conclure une analyse ou enrichir un entretien- Rappel: dans une intro ou une conclusion, il est inutile d'insérer des extraits des poèmes)
A partir du milieu du XIXe siècle, la révolution industrielle bouleverse le paysage urbain et social. Les artistes vont s’approprier ce thème de la ville qui symbolise alors la modernité.
Le thème de la ville a longtemps été marginal en poésie, et c'est donc un univers esthétique neuf que Baudelaire aborde ici. Il avait pris acte de l'intérêt qu'un peintre comme Constantin Guys mettait à croquer des scènes tirées de l'univers urbain, et le poète a voulu à son tour rendre sensible ce qu'il y a d'éternel dans le spectacle toujours changeant qu'un monde tel Paris met en scène. De fait, le crime, la misère, la souffrance, la solitude, la vision fugitive de la beauté, rien de tout cela n'est spécifiquement urbain, mais la ville révèle ces traits avec une extraordinaire acuité, comme si l'indifférence absolue des foules, son empathie devant le malheur des autres, devait parfaitement mettre en valeur ce que la douleur a d'unique et de tragiquement solitaire.
Baudelaire exploitera de nouveau le thème de la ville dans Le Spleen de Paris. Il aura ouvert la voie à des artistes comme Verhaeren, Apollinaire et les Surréalistes; eux aussi sauront voir la poésie du pavé, des mouvements de foules et des destins anonymes.
Découvrir le regard d’un poète sur la ville
Étudier un paysage état d’âme : la banlieue
Découvrir comment la représentation de la ville se mêle à celle de la femme
Découvrir une vision fantastique de la ville
Les Tableaux parisiens comportent de nombreuses rencontres dans la ville ; à ces apparitions, on s’adresse à la deuxième personne, on les interpelle comme on interpellerait quelqu’un dans la rue. Mais bien vite, ces figures semblent permettre de nous parler autant du poète lui-même (ou de nous-mêmes) que de la personne rencontrée.
C’est un cortège de personnages déchus, et teintés d’un symbolisme inquiétant : une Mendiante rousse «dévoilant pour nos péchés / ses deux beaux seins, radieux / Comme des yeux », Sept Vieillards formant un «cortège infernal », devant lesquels on se réfugie chez soi, « épouvanté », suivis de « Petites vieilles » déchues, « Mères au cœur saignant, courtisanes ou saintes, / Dont autrefois les noms par tous étaient cités », sans oublier la passante, « Fugitive beauté » qui suggère autant « la douceur qui fascine » que « le plaisir qui tue »... sans oublier les défilés de personnages anonymes, dans les « Crépuscules » du soir et du matin, catins, malades ou débauchés...
On y ajoutera d’autres rencontres qui affichent plus directement leur symbolisme poétique : Le soleil, allégorie de la parole poétique tâchant d’embellir ou de donner vie à ce qu’elle touche, un Cygne dont le triste de chant de mort nous renvoie à Andromaque, symbole des « captifs » ou « vaincus » à qui ne reste plus que le chant, Le squelette de la douleur, contemplé dans une planche d’anatomie, qui nous révèle que « tout, même la Mort, nous ment », et fait à écho au squelette de la Danse macabre...
In List 1- Paysage Je veux, pour composer chastement mes églogues, Coucher auprès du ciel, comme les astrologues, Et, voisin des clochers écouter en rêvant Leurs hymnes solennels emportés par le vent. Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde, Je verrai l'atelier qui chante et qui bavarde; Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité, Et les grands ciels qui font rêver d'éternité. II est doux, à travers les brumes, de voir naître L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre Les fleuves de charbon monter au firmament Et la lune verser son pâle enchantement. Je verrai les printemps, les étés, les automnes; Et quand viendra l'hiver aux neiges monotones, Je fermerai partout portières et volets Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais. Alors je rêverai des horizons bleuâtres, Des jardins, des jets d'eau pleurant dans les albâtres, Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin, Et tout ce que l'Idylle a de plus enfantin. L'Emeute, tempêtant vainement à ma vitre, Ne fera pas lever mon front de mon pupitre; Car je serai plongé dans cette volupté D'évoquer le Printemps avec ma volonté, De tirer un soleil de mon cœur, et de faire De mes pensers brûlants une tiède atmosphère.
— Charles Baudelaire Introduction : « Paysage » → 1er poème de la partie “Tableaux parisiens” du recueil Les fleurs du mal publié en 1857 par C. Baudelaire.
Baudelaire présente la ville de Paris→ paysage réel va être transformé en un p. féerique grâce à la poésie.
Commet Baudelaire transforme ds 2 strophes d´alexandrins le paysage réel de Paris en paysage transfiguré et commet la poésie parvient à transformer cette réalité en rêve?
I – Paysage réel de la vie de Paris
1 – Les lieux
Poète habite en hauteur ds une « mansarde » (v5), situé face à la fenêtre→ permet de faire découvrir le paysage qu´il voit : Paris du 19e s.
-Monde industriel par « atelier » (v6), la métonymie: « tuyaux » (v7), métaphore: « mâts de la cité » (v7) → renvoie aux chemines de la cité, « clochers » (v7) → édifices religieux
2 – Les activités Paris→ ville qui travaille : proposition subordonnées relatives : « qui chantent et qui bavarde » (v6) qui est aussi une personnification→ renvoie au bruit, à l´activité des usines de l´industrie.
Rythme régulier du v6: 6/3/3 → Rythme de l´usine est constant, monotonie de l´act. Industrielle, travail à la chaine
-Vie quotidienne: « lampe à la fenêtre » (v10), « mansarde » (v5)
-Agitation sociale et politique : allégorie ds: « Émeute » (v21) → mis en valeur car placé en début de vers
Ville : vie quotidienne, bruits des usines → vie familière au poète → vie réelle
Transition : Le poète passe du paysage réel qu´il voit a un paysage transformé par sa perception
II – Paysage transformé
1 – Idéalisation du paysage
Paris idéalisé : « rêver d´éternité » (v8)
Transfiguration au réel ds 1ere strophe : bruits de l´usine se transforme en chants. Son des cloches qui annonce le quotidien se transforme en hymnes, de la musique : « Leurs hymnes solennels emportés par le vent » (v4) répétition du son [en] → marque la solennité, idée de grandeur. Bruit des cloches devient musique avec un rythme binaire
=perception agréable du monde.
2 – Perception visuelles
« mâts de la cité » (v7) assimilés à mâts des bateaux
Métaphore connote la découverte, l´évasion, l´aventure.
Sensations visuelles : « brumes » (v9) → fumée de la nuit
Métaphore: « Les fleuves de charbon […] enchantement » (du vers11 au vers 12) → annonce le crépuscule, le poète regarde par la fenêtre.
Jeu entre l´obscurité et la lumière:
« lampe, étoile, Lune » → lumière
« nuit, brumes, charbon » → obscurité
Mouvements opposés : « naître, monter »/ « verser » → sont placés ds des positions stratégiques (fin de vers, début ou fin d´hémistiche)
« naiîre »(v9) → enjambement
Enjambement et inversion sujet/verbe :
« voir l´étoile fleuves monter »
→ donnent mouvement à l´intérieur du poète
Transition : Cette ville féerique est possible grâce au poète qui donne cette image car il s´engage complètement ds ce paysage.
III – Démarche du poète
1- Situation du poète
Poète en conditions favorables pour écrire la poésie : ds sa mansarde, en hauteur, face à la fenêtre, mains sur son menton face à un paysage→ il a tout pour être inspiré, rêver.
Poète en situation de création : volonté en début de poème : « Je veux » (v1) → création poétique : « églogues, composer, Idylle ».
Devant son « pupitre » (v22) → fait penser à un travail scolaire, va observer ce qui se passe ds la ville.
2 – La création du poète
Comparaison : « comme les astrologues » (v2) → le poète va déchiffrer les signes qui viennent du ciel. Terme « éternité » (v8) → monde des divinités, proche des divinités, le ciel.
Pris ds son inspiration, mené à transformer le monde : « l´hiver » (v14) devient « printemps » (v13). Celle-ci permet de créer un monde féerique; en hiver il imagine le printemps : du vers 17 au vers 20
S´enferme ds sa chambre, se coupe de la réalité : « fermerai portière et volets » (v15). Se coupe de la Révolution. Grace à son “esprit ” et sa sensibilité : « cœur » (v25) il crée un monde féerique.
On passe d´un Paris avec problèmes sociaux à un rêve parisien. Poète devient comme un dieu qui crée son propre monde hors de la réalité.
Conclusion :
Ce poème est un poème de jeunesse, a des influences du romantisme. Dans la rêverie le poète devient créateur de son propre monde. La création permet de transformer un objet de la vie quotidienne en un objet poétique. Ce qui n´est pas, a priori, fait pour la poésie, va le devenir avec Baudelaire.
Lecture cursive- Les Sept vieillards-À Victor Hugo Fourmillante cité, cité pleine de rêves, Où le spectre en plein jour raccroche le passant! Les mystères partout coulent comme des sèves Dans les canaux étroits du colosse puissant. Un matin, cependant que dans la triste rue Les maisons, dont la brume allongeait la hauteur, Simulaient les deux quais d'une rivière accrue, Et que, décor semblable à l'âme de l'acteur, Un brouillard sale et jaune inondait tout l'espace, Je suivais, roidissant mes nerfs comme un héros Et discutant avec mon âme déjà lasse, Le faubourg secoué par les lourds tombereaux. Tout à coup, un vieillard dont les guenilles jaunes Imitaient la couleur de ce ciel pluvieux, Et dont l'aspect aurait fait pleuvoir les aumônes, Sans la méchanceté qui luisait dans ses yeux, M'apparut. On eût dit sa prunelle trempée Dans le fiel; son regard aiguisait les frimas, Et sa barbe à longs poils, roide comme une épée, Se projetait, pareille à celle de Judas. II n'était pas voûté, mais cassé, son échine Faisant avec sa jambe un parfait angle droit, Si bien que son bâton, parachevant sa mine, Lui donnait la tournure et le pas maladroit D'un quadrupède infirme ou d'un juif à trois pattes. Dans la neige et la boue il allait s'empêtrant, Comme s'il écrasait des morts sous ses savates, Hostile à l'univers plutôt qu'indifférent. Son pareil le suivait: barbe, œil, dos, bâton, loques, Nul trait ne distinguait, du même enfer venu, Ce jumeau centenaire, et ces spectres baroques Marchaient du même pas vers un but inconnu. À quel complot infâme étais-je donc en butte, Ou quel méchant hasard ainsi m'humiliait? Car je comptai sept fois, de minute en minute, Ce sinistre vieillard qui se multipliait! Que celui-là qui rit de mon inquiétude Et qui n'est pas saisi d'un frisson fraternel Songe bien que malgré tant de décrépitude Ces sept monstres hideux avaient l'air éternel! Aurais-je, sans mourir, contemplé le huitième, Sosie inexorable, ironique et fatal Dégoûtant Phénix, fils et père de lui-même? — Mais je tournai le dos au cortège infernal. Exaspéré comme un ivrogne qui voit double, Je rentrai, je fermai ma porte, épouvanté, Malade et morfondu, l'esprit fiévreux et trouble, Blessé par le mystère et par l'absurdité! Vainement ma raison voulait prendre la barre; La tempête en jouant déroutait ses efforts, Et mon âme dansait, dansait, vieille gabarre Sans mâts, sur une mer monstrueuse et sans bords! In List 2- LES AVEUGLES Contemple-les, mon âme; ils sont vraiment affreux!
Pareils aux mannequins; vaguement ridicules;
Terribles, singuliers comme les somnambules;
Dardant on ne sait où leurs globes ténébreux. Leurs yeux, d'où la divine étincelle est partie,
Comme s'ils regardaient au loin, restent levés
Au ciel; on ne les voit jamais vers les pavés
Pencher rêveusement leur tête appesantie. Ils traversent ainsi le noir illimité,
Ce frère du silence éternel. ô cité!
Pendant qu'autour de nous tu chantes, ris et beugles, Éprise du plaisir jusqu'à l'atrocité,
Vois! je me traîne aussi! mais, plus qu'eux hébété,
Je dis: que cherchent-ils au Ciel, tous ces aveugles?
Introduction:
Les Aveugles apparaissent dans les Fleurs du Mal après les Sept Vieillards et les Petites Vieilles juste avant la passante. Les trois pièces font défiler de grotesques marionnettes auprès desquelles Baudelaire cherche une paix fraternelle. Car les aveugles sont les hommes en général. Tous sont plongés dans une nuit atroce, celle de l'esprit ou celle du corps, incapables de rejoindre le pays natal, éternellement solitaires. Et la ville qui hurle autour d'eux est perdue comme ils sont perdus en elle.
Dans ce cortège inquiétant, le poème Les Aveugles provoque un certain malaise, une difficulté à se positionner pour le lecteur : faut-il rire d’eux méchamment comme semble nous y inviter le premier vers ? Doit-on plutôt s’intéresser au poète « hébété » qui se compare à eux ? Qu’est-ce, au juste, qu’on semble nous inviter à contempler ?
La portée du poème est triple : l’inquiétude que crée une apparition monstrueuse, permet d’en inférer une allégorie, et nous rappelle dans le même temps à nous-mêmes, habitants de la grande ville.
I- la description cruelle d’êtres inquiétants
Cruauté de la description des aveugles
1. Jeu sur l’énonciation :
→ l’apostrophe « mon âme », v.1, instaure dès le 1er vers une situation de complicité (interlocution) entre le
poète et lui-même (son âme), c’est à dire, indirectement, une mise à distance des aveugles (qui héritent de la 3e
personne, qui les exclut de cette complicité ; ils sont mis à distance par cette 3e personne). Le 1er vers du 1er
tercet semble résumer cette énonciation « en creux » dans les deux premiers quatrains : ils traversent ainsi...
(avant qu’on passe à un autre type d’énonciation, voir infra)
→ Mise en scène, effet de retard : le titre et le dernier vers seuls « encadrent » le pronom « ils » en jeu dans le
poème, et révèlent de qui l’on parle : on n’a accès aux aveugles que par leur aspect, leur attitude, mais on ne
pénètre pas leur pensée dans l’espace du poème. Le « ils » du premier vers n’est compréhensible qu’à travers le
dernier vers, et le titre.
→ on maintient la distance avec le neutre de la 3e personne : « on ne sait où », « on ne les voit jamais »... 2. Le premier quatrain semble exhiber la volonté méchante du locuteur de se moquer :
→ Ironie cruelle :
vaguement ridicules → litote, qui en dit plus en feignant d’atténuer le propos
« Contemple-les » : impératif dont l’admiration sous-entendue (par l’idée de contemplation) est démentie dès la
fin du vers par le terme affreux (antithèse : contempler / affreux) → sarcasme
→ Lexique ouvertement péjoratif :
affreux, ridicules, terribles), adverbe évaluatif qui intensifie le jugement (degrés de l’adjectif) : « vraiment
affreux »
→ Noter les rimes qui renforcent ce jugement, associant tous les termes péjoratifs : affreux /
ténébreux ridicules / somnambules 3. Insistance sur l’étrangeté menaçante des aveugles :
Le terme de « singulier » définit cette étrangeté : le monstre échappe à la compréhension par son caractère
singulier, unique : en cela il nous échappe et nous inquiète.
→ Des êtres menaçants
Lexique de la menace : terribles, dardant, ténébreux
allitération (consonnes dentales dans le 4e vers - DarDanT_on ne saiT_où leurs globes Ténébreux + rythme «
boitant » du vers 2/4 + 2/4)
→ Caractère monstrueux :
Périphrase : « globes ténébreux » pour désigner leurs yeux ou les cavités oculaires → description médicale,
réification
Réification, absence de vie ou de conscience : mannequins, somnambules, « d’où la divine étincelle est partie».
A mettre en relation avec les Petites vieilles, comparées à des marionnettes.
→ Des êtres déchus
Description partielle, quasi métonymique : ce sont des êtres partiels, dont on ne décrit que la silhouette de «
mannequins », ou bien les yeux et la tête : ils n’ont pas de membres, ne peuvent agir que par leur regard absent (dardant...)
Étrangeté des aveugles, qu’on ne saisit qu’à travers des comparaisons : pareils aux mannequins, comme les
somnambules, comme s’ils regardaient au loin
Ils ne sont pas nommés autrement que par le titre : ce sont des êtres sans nom jusqu’à la chute dans le dernier
vers.
Transition : vive cruauté de ce « tableau », certes, mais cette cruauté ne vise pas seulement les aveugles.
II-Comment le poète se situe lui-même face à son sujet : les aveugles, une allégorie du poète partagé entre
Spleen et Idéal 1. Un jeu d’oppositions entre deux mondes
Le 2e quatrain met en place une opposition entre deux mondes :
→ Champ lexical de l’élévation spirituelle → l’idéal
Divine étincelle
au loin
rêveusement
noir illimité
silence éternel
au Ciel
→ Le poids de la vie et du corps → spleen
pavés
appesantie
autour de nous
hébété
je me traîne
→ Observer les rimes qui à partir du 2e quatrain mettent en jeu cette opposition de « l’élevé » contre le « bas »
partie / appesantie = mouvement VS lourdeur
levés / pavés = regard vers le ciel VS le sol
illimité / cité = le lointain, ce à quoi on rêve VS ce qui est là, autour de nous
beugles / aveugles : opposition entre ceux qui se livrent aux plaisirs vulgaires, et ceux qui sont tournés vers le
ciel 2. Entre spleen et idéal
→ Opposition entre spleen et idéal très claire dans Les Tableaux parisiens à travers le poème Rêve parisien.
le « noir illimité » (= « ténébreux » du 1er quatrain) s’associe à l’éternité, marquée par une valeur positive (la
fraternité) : « ce frère du silence éternel ». En d’autres termes, on évoque un lieu où il est inutile de parler, un
monde qui se suffit à lui-même : le monde de la perfection. Ce qu’ailleurs dans les Fleurs du Mal on nomme «
L’idéal ». Dénonciation de la vulgarité de notre existence :
plaisir → atrocité
gradation (qu’on pourrait appeler ici une dé-gradation...) : chantes, ris, beugle : termes de plus en plus
péjoratifs, qui marquent précisément le glissement du plaisir vers la vulgarité.
Deux vers suffisent à régler leur compte aux prétendus plaisirs de la cité, et l’on peut mettre ces vers en relation
avec Le Crépuscule du soir, sorte de « veille » du Crépuscule du matin, et décrivant l’éveil de la cité livrée aux
plaisirs de la prostitution, du jeu, du vice... 3. Une allégorie du poète
le 2e vers du 2e tercet introduit une nouvelle comparaison : le poète se compare aux aveugles : « je me traîne
aussi »
→ recherche de la perfection, de l’illimité, qui se heurte à une incapacité, à la finitude, à la lâcheté, à l’horreur
de soi-même, comme le suggère le comparatif « plus qu’eux », qui induit un jugement moral.
→ Allégorie du poète : soucieux de beauté, de perfection, d’infinitude, il se trouve confronté en permanence à
sa propre « hébétude ». On peut faire ici un lien avec le « sommeil stupide » des femmes de plaisir du
Crépuscule du matin.
==> Au poète hébété, il ne reste que l’hébétude ou la parole « je dis »... Tout le jeu du poème sera de dire le
mieux possible (voir conclusion), et de donner cette parole en partage au lecteur (le « don du poème », qui
cherche la communion – j’ai bien dit communion, pas « communication »)
III- L’investissement possible par le lecteur, « l’effet miroir »… et plus que le seul poète, c’est aussi le lecteur
qui est invité à se reconnaître 1. Du « on » au « nous »
→ Ce n’est plus « on », c’est « nous » et « je » → on s’adresse autant au lecteur qu’à la supposée cité.
→ « Autour de nous » renvoie autant à la situation supposée du locuteur dans le texte qu’à celle du lecteur,
invité par là-même à se projeter dans le poème.
→ « Ô cité » : le lecteur, au sens large de cité (communauté des hommes), est inclus... Il est donc indirectement
interpellé.
2. « Je » est un autre : c’est (entre autres) le lecteur
→ Ambiguïté de la 1e personne : ce « je » qui assiste au passage est certes celui qui parle, mais « mon âme »
englobe la notion de sujet en général. C’est donc une injonction qu’on peut prendre, en temps que lecteur, à son
propre compte.
→ Le « je dis » final s’imprègne de cette ambiguïté : « je » poète, mais aussi « je » du lecteur, amené, par la
description à laquelle il vient d’assister, à se poser la même question. Le fait que la question « que cherchent
ils... » soit posée au discours direct tend à faire de cet énoncé un énoncé valable de lui-même, rapportable à
d’autres locuteurs que le seul poète.
=> mise en abîme du lecteur, renvoyé à sa propre existence dans la ville, englobé (voire visé, puisqu’on lui
parle à la 2e personne) par l’apostrophe « ô cité », renvoyé à sa propre finitude. Ce poème est à mettre en
relation avec le dernier vers du poème initial des Fleurs du Mal : « hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère
»
Conclusion ( trop longue, elle peut de subdiviser en parties pour être utilisée en intro/entretien.) D’un apparent sarcasme, on en est venu en « retourner » la description pour qu’elle se mette à désigner d’une
part le poète, d’autre part le lecteur, appelé à réfléchir à l’humanité tout entière, une humanité qui a perdu accès
à la divinité (le « Dieu est mort, et c’est nous qui l’avons tué » de Nietzsche n’est pas loin).
Ce poème suscite donc une certaine inquiétude, mais aussi un certain pathétique, celui de l’ironie, de
l’amertume, : il constitue un rappel de notre existence laborieuse, affirmant que nous vivons du côté du spleen, comme des aveugles tournés vers l’idéal, mais incapables de le voir ( Rappel La caverne de Platon- Apologue- donc texte à visée argumentative donc mythe au service de la dimension visionnaire du poète)... Pourtant, on n’en cherche pas moins l’élévation dans et par la parole. On peut mettre ce texte en relation avec Le crépuscule du matin, qui lui aussi «s’ouvre » par une allégorie finale, ou avec le premier poème de la section, Paysage, qui décrit l’ambition du poète d’accéder à un monde de douceur que seule la parole permet. Qu’est-ce qu’il « ouvre » comme chemin ?
—> Observation de la ville qui nous renvoie à nous-mêmes, tension vers les autres dans la ville, chacun
représentant à sa façon un des aspects de notre existence sur terre. Question de la politique baudelairienne : un
corps nouveau s’est constitué, celui de la ville : qu’est-ce qu’on y partage ? Qu’est-ce qui nous y sépare ?
Qu’avons-nous à partager ? Il semble répondre par : rien, sinon l’art et la beauté. A savoir : on ne peut partager que la tentative de dire cela avec beauté. L’art seul devient l’enjeu d’un partage. Plus que tout, ce que semble nous dire la poésie de Baudelaire, c’est d’aller chercher les « Fleurs » dans le «Mal », comme nous y invite la fin du poème À une heure du matin dans les Petits Poèmes en prose : après avoir fait l’inventaire des ratés de sa journée, le poète conclut, invoquant malgré lui le dieu auquel il ne croit plus : «Seigneur mon Dieu ! accordez-moi la grâce de produire quelques beaux vers qui me prouvent à moi-même que je ne suis pas le dernier des hommes, que je ne suis pas inférieur à ceux que je méprise ! ». Quelques « beaux » vers, donc : la beauté qui traverse les métaphores les plus fulgurantes de sa poésie, qu’il nous est donné de recueillir. In List 3- À une passante
La rue assourdissante autour de moi hurlait. Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse, Une femme passa, d'une main fastueuse Soulevant, balançant le feston et l'ourlet;
Agile et noble, avec sa jambe de statue. Moi, je buvais, crispé comme un extravagant, Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan, La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit! - fugitive beauté Dont le regard m'a fait soudainement renaître, Ne te verrai-je plus que dans l'éternité?
Ailleurs, bien loin d'ici! trop tard! jamais peut-être! Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais, Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais!
Introduction
La ville constitue, par la multiplicité de spectacles et les possibilités de rencontres qu’elle offre, un puissant excitant pour l’imagination et pourrait donc distraire du spleen (la première et la plus importante partie des Fleurs du mal s’intitule spleen et idéal : 85 poèmes). Mais la fraternité au sein de la grande ville est illusoire et le poète est renvoyé à sa solitude.
Le poème fait partie de l’ensemble de 18 poèmes intitulé « Tableaux parisiens », dans les Fleurs du Mal publiées en 1861(deuxième édition). Le poème A une passante a été publié pour la première fois en 1860 dans l’Artiste. le poète évoque une rencontre : celle, très brève, d’une femme croisée dans la rue, et il comprend qu’ils auraient pu être destinés l’un à l’autre , qu’il frôle en le croisant le bonheur.
Composition : Les deux quatrains donnent successivement une vision de la rue d’abord, puis de l’inconnue vue de loin d’abord, puis gros plan sur son visage, ses yeux surtout, alors qu’ils se croisent.
Dans les tercets le poète s’adresse à cette femme qui est irrémédiablement passée et s’interroge sur des futurs possibles avant de faire un double constat d’échec.
I. La rue Sa description tient en un vers unique. (vers 1)
Elle est présentée par son impact sur l’ouïe : assourdissante ; hurlait. Ces deux mots suggèrent l’absence d’harmonie et un bruit plutôt désagréable. Remarquer la personnification opérée par la métonymie : ce n’est pas la rue qui hurle, mais ses différents éléments.
Cacophonie des sons vocaliques dans le vers, des voyelles écartées sur la voûte palatale, d’où effet de hiatus : a y a u i a // o u oe a y è
La structure rythmique du vers met encore mieux en relief cette cacophonie des sons.
La rue est présentée en relation avec le poète : autour de moi. Le poète est isolé, au centre de la rue. Il ne participe pas au mouvement ni au bruit qui lui sont extérieurs. Il est étranger.
II. La présentation de la femme (vers 2-5) Elle est présentée en mouvement : elle arrive et se rapproche du poète : passa ; soulevant ; balançant ; jambe.
Elle frappe d’abord par sa silhouette qui évoque une minceur souple et élancée : longue ; mince ; agile ; ses mouvements sont souples et gracieux : soulevant ; balançant ;
Cette souplesse, ce mouvement dansant sont rendus également par le rythme : les vers 3 et 4 sont deux tétramètres réguliers.
Il émane d’elle une grande séduction qui est renforcée par l’emploi des mots feston (jupon) ourlet (bas de la jupe) qui dégagent la jambe.
Elle frappe ensuite par la douleur qui émane d’elle :
en grand deuil, douleur majestueuse. Remarquer la construction symétrique qui crée un effet d’insistance.
Les caractéristiques a et b sont mises en évidence par leur position détachée avant le sujet une femme.
Le rythme du vers 2 dont les segments vont en s’allongeant semble accorder une importance particulière à l’aspect douloureux
Elle frappe enfin par son aspect noble : majestueuse ; fastueuse ; noble ; statue. Trois de ces mots sont placés à la rime ; un autre à une coupe forte. La statue évoque à la fois la perfection esthétique et une certaine froideur, étonnante ici. Mais la statue est l’idéal de beauté chez Baudelaire.
C’est donc une personne qui tranche sur l’ordinaire des personnes rencontrées dans les tableaux parisiens qui sont plus souvent des personnages laids ou déchus (vieillards, aveugles, prostituées). Elle tranche aussi par son harmonie sur la cacophonie de la rue.
III. Le gros plan sur les yeux et les premières réactions du poète (vers 6-9)
C’est maintenant l’instant où les deux êtres se croisent et où leurs regards se rencontrent.
Cet instant prend une durée importante avec l’imparfait moi, je buvais. C’est un instant d’éternité que trouve le poète à ce moment.
le regard de la femme
l’œil est présenté au singulier. C’est la porte d’entrée vers le monde intérieur de la femme. C’est la fenêtre (cf. Les fenêtres dans Spleen de Paris).
Il est assimilé par métaphore à un ciel livide où germe l’ouragan, image classique chez Baudelaire (cf. Invitation au voyage). Le mot livide évoque la couleur plombée, bleuâtre du ciel d’orage, en même temps que celle des yeux.
L’ouragan en germe suggère toutes les passions contenues.
Cet œil frappe également par tout ce qu’on peut y lire de douceur et de plaisir. (images de la femme sœur /mère et de la femme sensuelle).
les réactions du poète :
contemplation égarée : crispé comme un extravagant et presque angoissée : crispé.
L’immobilité du poète est accentuée par le moi, je et par l’opposition entre lui crispé, et elle toute souplesse et mouvement.
Le poète qui était seul dans la foule au vers 1 est bouleversé par la sensation d’avoir rencontré l’âme sœur. La douceur et le plaisir qu’il lit dans les yeux de la femme sont envisagés par rapport à l’effet qu’ils ont sur lui : qui fascine (qui ensorcèle); qui tue. Les deux postulations qui sont en lui pourraient chacune trouver satisfaction dans cette femme.
Remarquer aussi la force du verbe je buvais : il se remplit de cette douceur, de ce plaisir. Il les absorbe par son propre regard.
Ils se sont croisés : un éclair, puis la nuit.
La perspective de vies possibles avec cette inconnue a duré le temps d’un éclair. On pense à la photographie qui existait déjà à cette époque. Ce mot suggère aussi la brièveté de l’épisode en même temps que la lumière intérieure de cette femme.
Dès que ce visage est passé, le poète retombe immédiatement dans sa nuit intérieure. L’opposition lumière/nuit introduit une note pessimiste.
Mais l’éclair, c’est aussi le temps : la perspective de vies possibles avec cette inconnue a duré le temps d’un éclair. Ce mot évoque en même temps que la brièveté, la lumière qu’offre ce qu’il lit dans les yeux de cette femme.
Mais il retombe immédiatement dans sa nuit intérieure, en voyant un dos s’éloigner, vêtu de noir.
L’opposition lumière/nuit introduit une note pessimiste.
IV. Le poète s’adresse à l’inconnue qui a déjà disparu (vers 9 à 14), en une sorte de monologue intérieur introduit par le tiret
La périphrase par laquelle l’auteur désigne cette femme acquiert de l’importance par l’enjambement qui l’allonge.
Le mot fugitive évoque la brièveté de la rencontre et le mouvement de marche rapide de la femme.
C’est sa beauté et son regard qui la caractérisent physiquement.
C’est surtout l’impact profond que cette rencontre a eue sur l’auteur qui est accentué : effet immédiat soudainement ; effet vital renaître.
L’espace d’un instant, grâce à cette femme, le poète a échappé à son spleen, et il lui en est reconnaissant.
Interrogation sur le futur
Ne te verrai-je plus : accent mis sur le regard ; car c’est le regard qui lui a permis de renaître.
Croyance en un au-delà où les âmes se retrouvent pour l’éternité.
Incertitude du futur terrestre par rapport à la certitude de cet au-delà : ailleurs, bien loin d’ici ! trop tard ! jamais peut-être ! Remarquer la gradation, dans l’espace d’abord, puis dans le temps (le temps est la 4e dimension) qui prend le relai de l’espace pour bien montrer l’éloignement irrémédiable.
On dénote donc une certaine angoisse du poète ; il se sent seul devant le destin ; il a l’impression d’avoir raté quelque chose. Son émotion est marquée par les nombreuses exclamations. Le jamais prend une dimension particulière (il est mis en relief par les italiques) car il semble exclure aussi la possibilité de retrouvailles dans l’éternité, même s’il est atténué par le peut-être.
Constats finals (introduits par car)
Premier constat : un constat d’ignorance du projet de l’autre. Insistance marquée par le parallélisme des constructions opposant je et tu ; fuir et aller,: fuir et aller, c’est le mouvement physique, mais c’est aussi une métaphore de la destinée de chacun."Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais"
Chiasme: Elle semble vouloir échapper à quelque chose, alors que lui semble marcher vers un destin plus concerté.
Le deuxième constat s’oppose au premier car c’est un constat de certitude. Ici l’insistance est marquée par l’anaphore à valeur incantatoire ô toi, qui sublime la passante.
Ô toi que j’eusse aimée : L’hypothèse fonctionne dans l’irréel avec le cond. passé 2e forme. Regret très fort d’un amour qui n’a pu être réalisé.
Ô toi qui le savais : le poète regrette peut-être qu’elle n’ait pas fait le premier pas. Il a lu une connivence dans son regard.
Ils sont ainsi doublement semblables : pour avoir reconnu chez l’autre un amour possible, pour avoir identifié l’âme sœur ; pour avoir choisi de passer sans s’arrêter, pour n’avoir pas voulu saisir ce moment. Et c’est en ceci qu’ils sont tragiques : ils ne veulent pas changer leur destinée ; ils l’assument.
Conclusion : Ce sonnet fait une sorte de synthèse de différents aspects du spleen baudelairien et de l’image de la femme:
Le poète est en proie au spleen, mais il laisse échapper une chance d’échapper à sa solitude
La femme associe douceur et plaisir, ce qui fait vivre et ce qui tue.
L’image de sa beauté est sculpturale et mouvante en même temps (cf La beauté et Le beau navire)
Le tableau parisien est suggestif, quoique rapide : l’individu isolé au milieu d’une foule bruyante. Cf. le tableau de Renoir : les parapluies. C’est un thème que l’on retrouve dans spleen de Paris (cf. Les foules : « multitude, solitude" : termes égaux et convertibles pour le poète "actif et fécond »)
Le poète touche le lecteur car il rapporte une expérience qui a pu être vécue par bien des lecteurs, et il le fait d’une façon très belle (sans pleurer sur son sort).
In List 4- Rêves parisiens (dédié à Constantin Guys) De ce terrible paysage, Tel que jamais mortel n'en vit, Ce matin encore l'image, Vague et lointaine, me ravit. Le sommeil est plein de miracles ! Par un caprice singulier, J'avais banni de ces spectacles Le végétal irrégulier, Et, peintre fier de mon génie, Je savourais dans mon tableau L'enivrante monotonie Du métal, du marbre et de l'eau. Babel d'escaliers et d'arcades, C'était un palais infini, Plein de bassins et de cascades Tombant dans l'or mat ou bruni ; Et des cataractes pesantes, Comme des rideaux de cristal, Se suspendaient, éblouissantes, A des murailles de métal. Non d'arbres, mais de colonnades Les étangs dormants s'entouraient, Où de gigantesques naïades, Comme des femmes, se miraient.
Des nappes d'eau s'épanchaient, bleues, Entre des quais roses et verts, Pendant des millions de lieues, Vers les confins de l'univers ;
C'étaient des pierres inouïes Et des flots magiques ; c'étaient D'immenses glaces éblouies Par tout ce qu'elles reflétaient ! Insouciants et taciturnes, Des Ganges, dans le firmament], Versaient le trésor de leurs urnes Dans des gouffres de diamant. Architecte de mes féeries, Je faisais, à ma volonté, Sous un tunnel de pierreries Passer un océan dompté ; Et tout, même la couleur noire, Semblait fourbi, clair, irisé ; Le liquide enchâssait sa gloire Dans le rayon cristallisé. Nul astre d'ailleurs, nuls vestiges De soleil, même au bas du ciel, Pour illuminer ces prodiges, Qui brillaient d'un feu personnel ! Et sur ces mouvantes merveilles Planait (terrible nouveauté ! Tout pour l'œil, rien pour les oreilles !) Un silence d'éternité. II
En rouvrant mes yeux pleins de flamme J'ai vu l'horreur de mon taudis, Et senti, rentrant dans mon âme, La pointe des soucis maudits ; La pendule aux accents funèbres Sonnait brutalement midi, Et le ciel versait des ténèbres Sur le triste monde engourdi.
« Rêve parisien » est l’avant dernier poème de la section des Tableaux parisiens, il est constitué de quatrains aux rimes croisées et est séparé en deux parties
Il est dédié au peintre Constantin Guys, admire par Baudelaire, qui le qualifiait de « peintre de la vie moderne".
Le poème, composé de deux parties très inégales. la première compte 13 strophes, et est dédiée à la description du rêve. C' est l'évocation détaillée d'un univers somptueux, entièrement minéral, avec lequel le poète entretient une relation ambiguë, puisqu'il est difficile de dire qu'il s'agit d'une création ou d'un rêve. La seconde partie, réduite a deux strophes, est un retour à une réalité sordide et marquée par un spleen désespérant. il créé son poème à la manière du peintre pour créer par touches successives un tableau qu'il oppose à la réalité maussade.
Première partie, un rêve fabuleux
-Le Paris idéalisé de Baudelaire repose sur l’équilibre entre deux éléments : l’œuvre des hommes et un élément naturel. Quels sont exactement ces éléments ?
Deuxième partie, un réveil douloureux :
-Relevez le champ lexical de l’enfer.
-Quel sentiment a Baudelaire pour la ville qui l’entoure ? Pourquoi son réveil est-il si brutal ?
-Dans ce poème, quelle fonction a le rêve ?
-Baudelaire, dans ce poème, ne décrit pas le Paris du XIXème siècle, cependant, à votre avis, comment le perçoit-il ? Plan
I. Un terrible paysage
A. L'idée de miracle, un paysage terrible par son étendue
B. Les composantes minérales
C. Les reflets et les couleurs II. La présence de je
A. Le bénéficiaire d'un rêve fabuleux
B. La présence d'un créateur III. Les deux étapes du texte
A. La réalité
B. La situation de je [...] La réalité : elle est présentée en contradiction avec la somptuosité féerique du paysage. Les connotations sont toutes négatives et les termes définissent un univers d'obscurité et de misère : horreur, taudis, soucis, funèbres, ténèbres, triste a 60). On y retrouve obsession du temps (indication de midi, référence à la pendule) et une atmosphère qui renvoie aux plus terribles manifestations du spleen (impression d'ensevelissement et d'étouffement, obscurité, poids du temps). B. La situation de je: L'utilisation du possessif mon dans mon taudis rappelle que cet univers-la est précisément celui du poète. [...]
[...] Pour ce qui est des couleurs on peut remarquer l'or, 1'argent, la lumière, le vert et le rose, l'image du rayonnement, la gloire ou illumination qui entoure un élément pictural d'inspiration sacrée. TR : Composé d'une multitude d'éléments eux mêmes en quantité infinie, le paysage présenté est somptueux, éblouissant, merveilleux et gigantesque. Fait d'une architecture qui dépasse tout ce que peut concevoir l'imagination humaine, il est a l'échelle, hyperbolique, du monde divin, échappant aux limites de l'espace et du temps. On peut alors se demander quelle est son origine et quel est le rôle joue par celui qui peut passer pour son créateur II. [...]
[...] Moreau: insistance sur la minéralité, sur la multiplicité. On peut aussi remarquer l'emploi de termes qui renvoient au monde de la peinture : le mot gloire (v. les termes image et spectacles 7). Conclusion Rêve parisien est un texte étrangement figuratif. Soulignant la condition misérable du poète accablé par le poids du spleen, il montre aussi à quel point ses capacités imaginatives lui permettent de recréer un univers féerique et merveilleux, inhabité, sans trace végétale, froid, lumineux et éblouissant, d'une magie somptueuse et foisonnante. [...] A- « Les Embarras de Paris », Satires, Nicolas Boileau
Dès le XVIIe siècle, Nicolas Boileau se plaignait des embarras de Paris et du bruit.
| « Tout conspire à la fois à troubler mon repos,
Et je me plains ici du moindre de mes maux :
Car à peine les coqs, commençant leur ramage,
Auront de cris aigus frappé le voisinage
Qu’un affreux serrurier, laborieux Vulcain,
Qu’éveillera bientôt l’ardente soif du gain,
Avec un fer maudit, qu’à grand bruit il apprête,
De cent coups de marteau me va fendre la tête.
J’entends déjà partout les charrettes courir,
Les maçons travailler, les boutiques s’ouvrir :
Tandis que dans les airs mille cloches émues
D’un funèbre concert font retentir les nues ;
Et, se mêlant au bruit de la grêle et des vents,
Pour honorer les morts font mourir les vivants. »
eau
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