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Non, en effet, je ne connais pas... je viens pour une psychothérapie, déclara Fred, honteux et rusé. - Eh! Bien d'accord, assuma Lange; alors allons-y, apprenez qui était Vélikovsky. Et Lange, fougueux de paradoxe, recommença de parler. - Vous avez vu, sur l'exemplaire que vous avez consulté, que Vélikovsky était psychiatre. Il voyagea et fréquenta les universités des différents pays dont il étudiait l'histoire; c'est ce qu'on raconte. Ce qui est certain c'est qu'il publia plusieurs livres dont cet "Oedipus and Akhenaton" qui figure comme un opuscule léger, marginal, presque un détail dans son oeuvre et l'immense histoire qu'il prétendait décrire, du système solaire et de l'histoire géologique des planètes. En astronomie les thèses qu'il soutenait sont inadmissibles; selon lui l'interprétation d'un nombre considérable de légendes en cours et écrites - puisqu'on les retrouve - en ces époques, 3000avJC, 2000avJC, 1000avJC, atteste que des modifications du système solaire avaient lieu à ces époques-même, de façon plus ou moins cycliques; rien de moins que des renversement de la terre sur son axe! Sans parler des passages à courtes distances de planètes les unes avec les autres, des croisements d'orbites, des changement dans les vitesses de rotation, etc... le tableau est impressionnant, agrémenté de cataclysmes climatiques et géologiques. Impressionnante aussi la somme de documents que Vélikovsky rassembla, qui décrivaient ces phénomènes; de Chine, d'Amérique, d'Asie et du Proche-Orient la précision et les corrélations de ces textes anciens est manifestement le signe de quelque chose... Cependant, pour vous donner une idée du genre d'aporie à quoi ses théories étaient menées; imaginez que la planète Vénus elle-même fut venue rebondir sur la terre en Ethiopie; il serait invraisemblable dans ce cas que les immenses pyramides et temples de la région gardassent leur architecture millimétrée! J'emploie un légère caricature; elle vous indique comment, selon tous les physiciens, astronomes et anthropologues, il y a une incompatibilité entre les énergies et les forces appelées par Vélikovsky et l'ordonnance précaire, fragile et complexe d'une race humaine; en tous cas, dans l'hypothèse d'une proximité de quelques millénaires seulement, pour nous qui l'observerions. C'est pourquoi, affirma Lange, Vélikovsky fut ridiculisé et traité de manière mesquine et honteuse, tant que défendu par un petit nombre de scientifiques qui dénoncèrent l'excès, de manière mesquine et honteuse; on parla de "l'affaire Vélikovsky". Lange resta un moment pensif. Il semblait même si absorbé que Fred n'envisagea pas de le déranger. Lentement il se réanima et semblait se réveiller en regardant son jeune vis à vis avec un sourire. - Aujourd'hui, voyez-vous, il y a quelque chose que je voudrais que vous imaginiez, expliqua-t-il. Vous avez lu OEDIPE ET AKHENATON. Vous avez vu que Vélikovsky opère avec Sophocle une révélation qui pourrait s'indiquer du slogan: "Prenez la légende (Oedipe-400avJC) et reportez-vous 1000ans précédemment"; car en se reportant en arrière, il trouve la coïncidence (Akhenaton-1350avJC). Eh! Bien, considérez comme il est curieux qu'il n'ait pas suivit cet excellent précepte à partir d'autres légendes, écrites et concernant le cosmos vers les 2000avJC. Il n'appliqua pas la même idée dans ce cas. Pourtant il aurait pu interpréter les phénomènes décrits, non pas se réalisant sur l'instant - comme il parut ridicule - mais éventuellement s'étant "réellement" produits, tels qu'en tous cas à des époques considérablement plus anciennes. Pourquoi Vélikovsky fut-il si contraire à lui-même, s'agissant du système solaire? interrogea Lange; eh! Bien, admettez que, pire que le frisson du cataclysme, il nous aurait confronte au vertige d'une mémoire extraordinairement ancienne, qui aurait déjà été précise et reformulable avant que les corps humains, tels que nous les connaissons, n'existent. Une telle angoisse impliquée dans le recensement de mythes que fit Vélikovsky donnerait une explication positive aux passions muettes, obtues ou criardes qui répondirent aux invraisemblances du pseudo-démiurge. Autrement dit les géologues et cosmologues académiques et scholastiques qui s'humilièrent à trahir la neutralité de leur critique scientifique affichèrent les tenants de l'angoisse qui les rassemblaient. Et ils ne persuadèrent par leur collègue téméraire que Dieu ne créa ni ne détruisit le monde il y a quelques millénaires; tandis qu'il avait la mémoire longue. Lange expliqua ensuite que dans le temps du scandale on cria que Vélikovsky avait gagné beaucoup d'argent en jetant de la poudre aux yeux du populaire toujours ravi de pouvoir prendre les universitaires pour des gogos. Il expliqua aussi que sa famille, depuis sa mort, s'opposait à la diffusion de ses oeuvres abhorrées et que l'on avait eu de la chance, en France, d'avoir eu avec OEDIPE ET AKHENATON cette "petite crevette" qui échappa aux mailles des filets de la censure. Et finalement, Lange put conclure: - La seule chose qui nous intéresse, pour l'instant, dit-il en agitant sa main - et vous comprendrez bien que je dus parler de tout ça pour que vous y puissiez goûter - la chose remarquable, quant à notre sujet circonscrit, est ceci: cette énorme masse abjecte du travail décrié de Vélikovsky, interprétations précipités, calomnies et vérités travesties, cultes pervertis, concernant l'archéologie et l'éthologie, la géologie, la cosmologie, la planétologie et la mythologie entassée voire concassée et condensée entre 3000avJC et 1500avJC, toute cette gangue semblable à un délire opaque, recouvrit une pousse, enroba un colophon, ce que j'ai appelé "la crevette": ce petit livre que vous avez consulté et qui est généralement resté assourdi derrière le vacarme de l'oeuvre entière. Or quand je dis "assourdi", je pourrais dire "ourdi"; comme si le cumul infâme d'une mythologie comparable à ce que Freud appelait "fleuve debout" en parlant de l'occultisme - avait été le cocon de ce transfuge qu'on laissa publier en France; délire tissé et ourdi par la petite pointe de vérité elle-même, parce qu'elle détournait le censeur, qui la laissa passer, ne croyant pas si bien se disculper! - Pour tout vous dire, continua Lange, de fameux égyptologues, en France, n'ont jamais entendu parler d'OEDIPE ET AKHENATON; quant à Vélikovsky, s'ils le connaissent, ils pensent qu'il est aux Etat-Unis, un cosmographe mégalomane. Mais enfin, promenez-vous dans ces milieux soufrés, obscurs et secrets, où l'avarice colle au savoir, où l'on se rencontre avec mille prudences, dans des bars le soir on vous dira: "Vélikovsky avait raison, quant à Oedipe". Vous ai-je éclairé sur cette question partielle mais essentielle à la bonne tenue de votre psychothérapie? - Oui, assentit mollement Fred, que la traduction et la publication de Vélikovsky soit maintenant interdite en France est une chose intéressante. Et si la seule analyse où il ne délirait pas consiste en ce petit livre, c'est en effet saisissant comme une perle d'huître; toute l'attention était portée ailleurs et l'émotion de la révélation ainsi déplacée. De cette façon vous voulez signifier qu'OEDIPUS AND AKHNATON s'est trouvé protégé. Evidemment Fred pensait que Lange, toujours suspect, exagérait avec ses descriptions d'inquisition au 20m siècle. Autant le médecin était enflammé et passionné, autant Fred n'avait jamais cru devoir comparer l'intellectualisation contemporaine des peuples avec le refroidissement d'une nuit glaciaire. Ne se méfiant pas d'être comme ceux qui, séduits par l'engourdissement, meurent contents, il n'avait jamais songé à autre chose que garder la tête froide. - Bien, fit Lange, vous comprenez bien; si vous vous souvenez de ce que je vous ai dit; s'agissant du mensonge complexe, tel que sa dénonciation ne pouvait se réaliser qu'en révélant les nom d'un seul coup, tous les trois ensemble; alors, vous savez pourquoi, en effet il a fallu attendre; et donc, OEDIPE EST AKHENATON ne pouvait pas être entretenu autrement que caché par le scandale - tout comme MOISE ET LE MONOTHEISME de Freud, couvé par cet autre scandale qu'est la psychanalyse elle-même telle que "singulière" avant les expériences de notre Kelper (qui la définit "plurielle"). Mais une fois qu'on peut conjoindre ces deux livre, on peut appuyer Oedipe et Moïse l'un sur l'autre pour dresser ce triangle qui prend Akhenaton pour base. Mais nous n'avons pas parlé de ce livre de Freud; il va falloir que nous y venions. - La prochaine fois, continua le médecin; aujourd'hui je vais vous laisser vous familiariser avec les locaux. - Ah! dit encore Lange, vous pourrez trouver dans la bibliothèque un livre de Lacan - vous y verrez comment il explique la sortie de trois prisonniers d'une prison semblable à la caverne de Platon. Ils sortent "les trois ensemble" à l'époque de Lacan déjà - vous verrez; Lacan parle d'une "Taverne" et il ne mettait pas encore de nom sur ses prototypes ou ses personnages mais vous pourrez consulter le calcul logique qui les mène à atteindre un lieu de liberté grâce à ce qui s'appelle leur identité triale. Vous verrez qu'ils opèrent de "temps logiques" et de "motions suspendues" pour conclure à la certitude à la fin. C'est la vérité. Ces derniers mots saisirent Fred en pleine cogitation. Il venait juste de repenser à Claude quand Lange lui conseillait de lire le texte que précisément il étudiait en Tarquel (un des dispositifs d'éducation les plus sophistiqués de la SAMCDA)! Par force, il avait tout de suite reconnu l'article dont parlait Lange; écrit qui soutenait une des dernières illusions du diabolique psychanalyste parisien, quant à réaliser de son Art une logique collective. Fred avait frissonné et il pâlit. Heureusement déjà Lange se mettait à lui parler d'autre chose; à savoir de la contribution qu'il aurait à financer s'il voulait avancer dans sa psychanalyse avec lui; il put estimer que le docteur mettrait son trouble au compte des manifestations émotives qui saisissent les névrosés lorsqu'il s'agit d'appeler "prix" quelque chose qui ne fut pas sur une étiquette. Il se repris une couleur en appréciant l'efficace et le secours de son alibi sur le chemin de sa périlleuse enquête. Les tarifs de Lange n'étaient pas définitifs mais ils étaient modestes; il les accepta sans négocier. Ils se séparèrent et Fred se retrouva dans la petite bibliothèque qu'ils avaient traversée le premier jour, meublée d'une table à quatre sièges et dont une partie des rayonnages servait au rangement de dossiers. Fred était seul, outre la présence de Mme la Voaof certainement dans l'appartement, Lange aussi et peut-être d'autres occupants. Curieusement, plutôt que se réjouir de pouvoir consulter feuillets et dossiers qui trônaient, à portée de main, sur quelques rayonnages, il connut une irritation qu'il justifia de ladite présence des autres personnages; de façon aberrante il s'en éprouvait pressé de fouiller livres et archives; ce qu'il eut désiré faire en assumant sa liberté. Serait-il seulement resté inactif qu'il eut fait figure étrange à quiconque aurait pénétré brusquement la pièce. C'était douloureusement ressentir les paradoxes et les absurdités où l'émotion égare, principalement lorsqu'elle rode privée de l'éclairage de ses raisons premières - car Fred éprouvait mal l'enjeu de ce qu'il apprenait, Il négocia en lui-même un moyen terme et, couvant sans y toucher, d'un souffle retenu, un premier dossier titré COLLECTIF, en date de l'année, il prit le livre d'à coté - non pas celui conseillé par l'épuisant médecin, puisqu'il connaissait l'article par coeur! Décidément, il se sentait plutôt incommodé que Lange, maladroitement, fut venu introduire ses déroutantes considérations dans ses délicates études. Seul et pour se donner un contenance dans cette perplexité fantomatique, il prit donc un livre au hasard et lut: "" D'une manière générale, les mots qui désignent le sexe mâle désignent aussi la femme, et ceux qui désignent le sexe féminin, désignent aussi l'homme. La femme est ainsi la propre chair de l'homme, et l'homme la propre chair de la femme. Les deux ne sont qu'une chair. Cette loi est frappante dans le mot con qui nomme le sexe féminin et l'homme stupide, de même la femme est le membre de son mari. Il s'ensuit que celui qui touche à la femme d'un autre, caresse le membre de cet autre, et celle qui prend le mari d'une autre femme prend le con de cette dernière. Il y a plus de moralité dans ces quelques lignes que dans le plus beau traité: sur la sainteté des liens du mariage; car le beau langage est une incitation au vice. "" Fred s'ébahit; qu'avait-il déniché! si semblable aux assertions de Freud, mais d'un tout autre ton? Il retourna le livre. Il lut: LES ORIGINES HUMAINES, deuxième édition de la Science de Dieu. La première publication était de 1900 et en regardant de nouveau la couverture il vit la fantastique annotation qui doublait le titre - un singe regardait le lecteur, écrivant au pinceau Les zoos rient, j'inhume haine. Il rouvrit à la page que son doigt gardait et lut le paragraphe précédent: "" Le coq ai eu, le queue au cu, le cocu: le cocu est à l'épouse ce que la concubine, la queue on cu bine ou redouble, est à l'époux. L'homme et la femme qui vivent honnêtement ensemble ne sont point en concubinage devant Dieu, ils ne trahissent personne; ils sont moins honorables que l'époux et l'épouse, le mari et la femme. Celui qui donne le nom de cocu à l'époux et de maîtresse à la concubine, renverse les rôles, altère la parole de Dieu et mérite le mépris de tout homme de bien. Le cocu c'est le troisième. ""' Tout cela faisait partie d'un chapitre titré L'Eternité. Et cet homme parlait du "troisième"- comme Freud dans LE MOT D'ESPRIT! Fred voulut en avoir le coeur net; au hasard il poursuivit: ""On ne meurt qu'une fois; quand on est mort, c'est pour longtemps; si on ne meurt qu'une fois, c'est nécessairement pour toujours. Il y a longtemps que nous sommes morts: nous mourûmes à l'état d'enfants de la terre en quittant nos corps de grenouilles; mais nous renaquîmes avec nos péres...""et ""...Même pour ressusciter, il faut être mort: les vivants ne peuvent ressusciter. Nous étions donc bien morts et tous morts, puisque le livre de la vie nous ressuscite tous en nous rappelant notre mort unique à l'époque où nous abandonnâmes nos corps de grenouilles pour vivre dans les corps des dieux, nos péres...""et ""..Mais il y a encore d'autres morts qui ne sont pas ressuscités, leurs noms ne sont pas écrits dans le livre de vie; ce sont les trépassés. Les trépassés n'ont point de nom connu, nous ne les connaissons que comme morts. On ne trépasse plus depuis l'état parfait des enfants de la terre. Les trépassés furent de simples grenouilles non arrivées à leur parfaite transformation, non sexuées et, par conséquent, sans nom."" Un fiche glissa du livre et interrompit Fred. Il la ramassa et lut: "" D'autre part, comme tout mot désigna d'abord le sexe, quand nous parlons d'une autre personne, c'est de notre propre sexe ou de nous-même que nous parlons."" Le jeune étudiant en psychanalyse n'en revenait pas; certaines formules étaient si freudiennes qu'il devait examiner ce qu'en disait la SAMCDA. Il retint mentalement le nom de l'auteur et conçut d'en consulter les références dans la documentation de sa Société. Jubilant et un peu allégé:, oublieux de Claude mais sans remarquer qu'il venait de diriger lui-même une identification - qui de plus en direction de la SAMCDA - il constata que l'heure était avancée. Pour la première fois son enquête offrait des aspects alléchants. Il se prépara pour sortir, prit un rendez-vous et salua Ella de la Voaof. Quelques jours plus tard Fred franchissait de nouveau le portail du 21 rue Nette orné du "détecteur de mensonge". Ses recherches sur l'auteur de LA SCIENCE DE DIEU étaient en cours mais il se maintenait ferme sur ses intentions quant à Claude. Mme la Voaof était pimpante, il s'adressa à elle et reçut confirmation qu'il pouvait bel et bien avoir accès à toute pièce, document ou matériel que ce soit qui se trouvaient dans les lieux. Cependant Lange l'attendait et il le rejoignit, cette fois-ci dans la bibliothèque aux quatre chaises, où il trouva le médecin fouillant parmi des prospectus issus d'un tiroir. - Bonjour, Fred, comment allez-vous? s'enquit le docteur. Achevant son inspection il referma le meuble et suggéra au jeune homme de prendre place en face de lui à la table. Puis il sortit un livre des rayonnages et Fred reconnut le livre de Freud consacré à Moïse et titré: MOISE ET LE MONOTHEISME. - Connaissez-vous ce livre? demanda Lange. - |
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