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C'est très difficile... et il ne resta de lui que son regard perché sur une gorge nouée. Lange fut attendri . Il s'excusa et l'admit en lui expliquant que ce sentiment d'épreuve tenait de façon mineure à la chose en elle-même - il s'agissait moins d'un problème mental qu'affectif; et pour mieux s'expliquer il avoua même que parlant de traiter le scandale il tendait d'éviter que, soulevant les figures bien plus fortes du sacrilège, immanquablement des réactions émotives se fassent sourdent jusqu'absorber, pour leur amortissement, toute les énergies de l'attention [NOTE: pour Lange, alias "de la tension"]. - C'est pourquoi il faut que je vous parle de la religion, expliqua Lange. Il faut nous demander si quelque chose risque d'être malmené de ce qui est bon et raisonnable dans la religion; cela pourrait inciter, comme le scandale, à ce qu'on résiste sur nos recherches concernant le prophète de la religion chrétienne et quelques autres. Je puis vous éclairer avec quelque chose de très simple, si vous le voulez. Tenez! C'est notre associé E.H. qui a apporté ça, il y a quelque temps. C'est un livre d'Edouard Shuré qui naquit en 1841. Lange présenta à Fred un ouvrage orné d'une photo où il reconnut le Moïse sculpté par Michel-Ange. LES GRANDS INITIES faisait le titre du livre que le médecin ouvrit, recherchant une page précise. - Je dois vous dire d'abord, s'interrompit-il, que ce texte publié en 1889 parvenait, en 1926 à sa 91em édition. Il s'agit d'un ouvrage populaire qui en appelle à la tradition ésotérique et qui trace les portraits romancés de certains comme Hermès, Pythagore, Platon et pour finir, Jésus. Aux chapitres consacrés à Moïse et sous-titrés "La mission d'Israël", il est conté l'histoire d'un égyptien, prêtre d'Osiris, destiné à retirer du Nil le peuple d'Israël. Ce prêtre devint Moïse. Ne parlons pas des sources d'où Shuré tirait ses renseignements, je ne veux pas examiner ici si la thèse est exacte (en de nombreux points elle est fausse). Ne considérons que l'exemple en lui-même; pour que vous puissiez constater qu'avec une idée de ce genre, le sens chrétien ne semble pas avoir totalement quitté l'auteur. Permettez que je vous lise la page qui termine le dernier chapitre, consacré à la mort de Moïse. Et Lange commença la lecture: "" A mesure que l'esprit de Moïse se détachait de la terre, il vit la terrible réalité de l'avenir; il vit les trahisons d'Israël; l'anarchie redressant la tête; la royauté succédant aux Juges; les crimes des rois souillant le temple du Seigneur; son livre mutilé, incompris; sa pensée travestie, rabaissée par des prêtres ignorants ou hypocrites; les apostasies des rois; l'adultère de Juda avec les nations idolâtres; la pure tradition, la doctrine sacrée étouffées et les prophètes, possesseurs du verbe vivant, persécutés jusqu'au fond du désert. ""Assis dans une caverne du mont Nébo, Moïse vit tout cela en lui-même. Mais déjà la Mort étendait son aile sur son front et posait sa main froide sur son coeur. Alors ce coeur de lion essaya de rugir encore une fois. Irrité contre son peuple, Moïse appela la vengeance d'Aelohim sur la race de Juda. Il leva son bras pesant. Josué et les lévites qui l'assistaient, entendirent avec épouvante ces paroles sortir de la bouche du prophète mourant: "Israël a trahi son Dieu, qu'il soit dispersé aux quatre vents du ciel! "" Cependant les lévites et Josué regardaient avec terreur leur maître qui ne donnait plus signe de vie. Sa dernière parole avait été une malédiction. Avait-il rendu le dernier soupir avec elle? Mais Moïse ouvrit les yeux une dernière fois et dit: "Retournez vers Israël. Quand les temps seront venus, l'Eternel vous suscitera un prophète comme moi d'entre vos frères et il mettra son verbe dans sa bouche, et ce prophète vous dira tout ce que l'Eternel lui aura commandé. Et il arrivera que quiconque n'écoutera pas les paroles qu'il vous aura dites, l'Eternel lui en demandera compte." (Deut...) ""Après ces parole prophétiques, Moïse rendit l'esprit. L'Ange solaire au glaive de feu, qui d'abord lui était apparu au Sinaï, l'attendait. Il l'entraîna dans le sein le plus profond de l'Isis céleste, dans les onde de cette lumière qui est l'épouse de Dieu. Loin des régions terrestres, ils traversèrent des cercles d'âmes d'une splendeur grandissante. Enfin l'Ange du Seigneur lui montra un esprit d'une beauté merveilleuse et d'une douceur céleste, mais d'une telle radiance et d'une clarté si fulgurante, que la sienne propre n'était qu'une ombre auprès. Il ne portait pas le glaive du châtiment, mais la palme du sacrifice et de la victoire. Moïse comprit que celui-là accomplirait son oeuvre et ramènerait les hommes vers le Père, par la puissance de l'Eternel-Féminin, par la Grâce divine et pas l'Amour parfait. "" Alors le Législateur se prosterna devant le Rédempteur, et Moïse adora Jésus-Christ. "" Lange reposa le livre, réfléchit un moment et repris: - Outre qu'il soit probable et raisonnable de penser que les origines, les lumières précédentes et causales de la morale chrétienne ou monothéiste aient elles-mêmes été cachées par le propre caractère achevé de ladite morale; et que lesdites lumières soient restées à l'insu de la civilisation pendant un long moment - nous voyons qu'il n'est pas forcément sacrilège d'attribuer à la fondation d'Israël une tradition historique, c'est à dire politique et en l'espèce égyptienne. Les accents de la Connaissance et de l'Amour peuvent y persister; tandis que le sacrilège pourrait bien figurer à la solde des Oeuvres qui résisteraient à ce développement du Savoir. - Bon! Eh, bien, cher ami, ponctua Lange, puisque nous avons dit cela, je dois encore me doubler d'une remarque. Car vous avez bien entendu que Shuré considérait Moïse, non seulement comme un égyptien, mais encore comme un prêtre de la religion de son pays. Il n'allait pas au-delà; c'est à dire qu'il n'identifiait pas Moïse (le nom signifie: "le retireur", "le sauveur") au pharaon lui-même; qui figurait dieu selon les entendus de l'époque. Pour franchir ce stade et reconnaître derrière le "prêtre d'Osiris" le Maître des prêtres le pharaon Akhenaton, il faut une condition - je vous l'ai déjà dit: le mensonge (Moïse un Hébreu) qui aurait véhiculé la vérité (Moïse est Akhenaton) doit être complexe; et son éclaircissement pareillement nécessite, non seulement un certain temps, mais certaines conditions. En l'occurrence pour atteindre le sens que Moïse fut le roi d'Egypte, il faut avoir analysé et situé le complexe d'Oedipe tel que troisième pseudonyme dudit Akhenaton (vous savez qu'Akhenaton était déjà un pseudonyme, il naquit comme Aménophis.4) - Cela ne signifie pas qu'Akhenaton était névrosé! plaisanta Lange, Sophocle écrivit les pièces d'Oedipe mille ans plus tard; ils avaient eu le temps de faire un complexe! Et Lange en riant prétendit rassurer Fred en lui déclarant que l'état d'Akhenaton était peut-être pire! selon les critères d'un psychiatre de notre époque. - Cette logique particulière, conclut-il pour Fred, doit maintenant nous faire comprendre pourquoi Freud, à partir de 1912, déclara alors, comme Shuré en 1884 et d'autres que Moïse était un prélat, fidèle au prince Akhenaton. Sur ces mots, le médecin lui suggéra de ne pas trop penser à tout cela. S'il avait seulement compris ou admis qu'il n'y avait pas de scandale à éclairer une probable inconnaissance, il pensait qu'il pourrait aborder de façon sereine une étude et un examen qui pourrait le mener au terme de résoudre facilement nombre d'angoisses névrotiques et ressourcer le sens de son existence d'homme moderne. C'était pourquoi Lange avait posé ce préalable à une analyse du psychisme de son client potentiel. L'épisode paraissait sympathique à Fred; il avait écouté et reconnaissait maintenant qu'il y avait quelques arguments audibles dans les longues prévenances de Lange. De ce fait il se trouvait rassuré et pouvait réviser ses soupçons d'un état délirant. Bien qu'il s'en fut amusé l'hypothèse avait été angoissante. Avec ce préjugé favorable il notait qu'il était rare qu'un psychosé parla d'Histoire, encore moins qu'il put traiter de dialectique de !'Histoire. Ce fait commençait à pénétrer l'entendement du pseudo-client et il en venait à diagnostiquer un caractère orgueilleux, ou bien pervers, peut-être psychopathe mais quoiqu'il en soit, habilité à une quelconque relation humaine que les délirants, selon lui avaient irrémédiablement perdue. - Mais qu'est-ce que ça changerait? risqua-t-il d'interroger? Lange ne se fit pas attendre pour répondre: - Le silence sur ce sujet a assez duré. De toute façon l'ordre du monde change et il vaut mieux s'armer de lucidité. La pure spéculation est une affaire de malade au regard de la vie sociale. Il faut pratiquer la connaissance et le meilleur moyen, c'est d'en faire état quant à des choses concrètes. Pensez-vous qu'un individu puisse vivre de façon réaliste s'il pensait qu'il avait rêvé de tuer son père sans que ç'ait été le cas? Akhenaton (1350avJC) ne semble pas avoir assassiné son père - je vous ai dit qu'Oedipe était postérieur (Sophocle écrit en 400avJC) - alors peut-être quiconque contemporain ferait-il mieux de s'avertir qu'il a seulement imaginé avoir rêvé (qu'il tuait son père). Sinon, à la fin de la religion du père, qu'on l'ait assassiné - avant le fils! - ça peut flanquer un malaise dont la civilisation pourrait bien se passer. Et puis je vous ai dit que la résolution mal traitée du mensonge pouvait avoir des effets négatifs, comme une initiation manquée; maintenant qu'on a toutes les pièces (et ça ne fait pas longtemps) pour le dénoncer, il faut s'y mettre. Si depuis Fabre d'Olivet, en 1815, l'égyptianisme de Moïse apparaît, lorsqu'aujourd'hui en 1950 nous pouvons certifier la connexion, cette fois-ci, d'Oedipe avec le pharaon exilé, le moment d'attendre a cessé et les trois figures doivent être exposées sans plus de délai. - Nous n'avons pas besoin d'être prophète, continua Lange, pour savoir qu'une logique nouvelle de la pensée scientifique est sur le point d'advenir - particulièrement avec le traitement du langage, puis de la parole, par des machines, mais pour bien d'autres raisons encore; cette nouvelle attitude qui attend, des corps humains vis à vis du Savoir correspond à ce que Freud désignait lorsqu'il pointait l'Inconscient. En quelque sorte, cela veut dire que les savants compteront bientôt avec leur propre psychisme dans leurs formulations - et vous admettrez que ce sera autre chose que de s'en remettre aux politiciens pour gérer le sens des signes algébriques qu'ils alignent comme des bêtes. Enfin! Les championnats de l'irresponsabilité se joueront ailleurs que sur la scène de la culture et de la démagogie... - Mais enfin, cher Monsieur, tempéra Lange, je vous ennuierais si je continuais. Je vous ait dit ce qu'il fallait pour que vous puissiez tranquillement aborder votre travail ici. Y a-t-il quelque chose que j'aurais omis? - Certainement pas, ironisa Fred soulagé, mais si je comprends bien, je vais collaborer selon une méthode qui n'est plus de la science et dont on ne connaît pas le nom. - Vous comprenez bien, assentit Lange, qui décidément était, ou bien en grâce de Naïveté, ou bien goûteur de l'ironie masquée où la personne se subtilise. Il resta un moment hésitant puis, en se levant - il resta suspendu - un bruit dans le couloir indiquait que quelqu'un franchissait la porte d'entrée. - Nous allons nous quitter, annonça-t-il; pour ce soir je vous présenterai à notre secrétaire qui vous expliquera tout ce que je n'ai pas pu vous dire sur l'organisation de nos locaux. Car s'il restait quelque chose à dire, c'est donc du coté de cette nouvelle pensée que les scientifiques ignorent avec passion. Etes-vous de ceux qui imaginent qu'une écologie puisse s'épargner une analyse du désir? Pensez-vous que ce capitalisme ravageur pollue en dépit du sens commun? Croyez-vous qu'une Société de Consommation puisse se cultiver sans connaître l'objet de ses fantasmes, phobique ou fétiche? Quant aux sociétés scientifiques qui matérialisent la dialectique de l'Histoire, n'est-il pas clair que leurs orientations ignorent ce que signifie l'Etat? - Mais tout cela est bien compliqué, réalisa Lange; je devrais vous fournir des exemples concrets. Tenez! Connaissez-vous le Professeur Yoghourt? C'est un égyptologue béarnais qui nous a carrément fauché un dossier. Depuis qu'il l'a eu en main, non seulement il ne nous répond plus, mais il ne veut pas nous le rendre. C'est pour vous dire à quel point la mentalité universitaire elle-même est provoquée par ce que déloge la découverte du pharaon démocrate dans notre système centrique qui date de la Renaissance. Je parle de la centralisation du Savoir, du Pouvoir qui nous a permis d'imaginer le système solaire avant Louis.14... mais enfin venez, vous allez voir, allons au secrétariat. Sur ces mots, il invita Fred à le suivre jusqu'au bureau de secrétaire - c'était elle qui venait d'arriver et se pressait de préparer des dossiers, sans doute pour la réunion à venir. - Vous avez déjà rencontré Mme Ella de la Voaof, notre assistante, présenta Lange et se tournant vers elle: Ella, voulez-vous sortir le dossier des réponses à nos derniers envois; voyons où nous en sommes aujourd'hui - ça fait trois ans que ça dure, glissa-t-il à Fred. Lange saisit le dossier pour le feuilleter et demanda: - Raoul a-t-il répondu? Et Guiton? Bouquin, Cigogne, Jérobe, Bringue, Person, Bassine, Koleforth, Bloké, Didon, Liévre, Lermitte - ce sont tous des "supposé-sachants n'est-ce pas - Placard, Nespaspalsor, Jardinier, Atom, Deguére, Hubert, Marmot, Pocho et Ciment ont-ils répondu? De la Voaof s'acharnait avec un taille-crayon qui de toute évidence avait rendu l'âme. Elle affirma que non. - Combien y a-t-il eu de réponses? insista Lange. - Deux, déclara la femme en plongeant dans un tiroir pour ressortir un boite de crayons neufs. - N'ayez pas honte, Ella, dit Lange... Des pas dans le couloir signalaient un nouvel arrivant, puis un autre, qui semblaient se diriger vers une des salles adjacentes. Lange allait les rejoindre, il salua Fred et s'adressa à la Voaof: - Expliquez à Fred le fonctionnement de la maison. Qu'il puisse venir ici quand il veut. Ah! Tenez, dit-il en saisissant un livre sur une pile, lisez cela, c'est la condition pour que tout soit révélé du mensonge; revoyez-moi après. Il salua et sortit. Fred resta seul avec la jeune femme qui l'écoutait: - Le Docteur Lange m'a suggéré d'observer, dit Fred aussi énigmatique qu'il pouvait l'être, mais il ne m'a pas beaucoup expliqué les moyens pour cela. Il paraît que je peux rencontrer ici des gens qui travaillent avec lui; s'agit-il d'une Association? - Non, expliqua Ella De la Voaof, il existe une Association mais son siège n'est pas ici et ne c'est pas Monsieur Lange qui l'analyse. Ici vous pouvez venir, c'est la définition. Et vous pouvez utiliser tout ce qu'il y a dans les lieux. Bien sûr chacun peut parler à ceux qui sont là, mais personne ne peut venir qui n'ait pas été invité par moi-même comme je vous invite à venir, quand vous voulez à partir d'aujourd'hui, en prenant rendez-vous s'il vous plaît; pour le financement, vous voyez avec le Docteur Lange. Ella De la Voaof semblait avoir tout dit et Fred l'imagina pressée de rejoindre la réunion. Une organisation si simple ne demandait pas à être explicitée plus longtemps; Fred s'en aperçut en comprenant qu'elle était idéale pour mener son enquête et procéder à l'identification de Claude. - Vous trouverez dans la bibliothèque un règlement intérieur pour des petites choses concernant le courrier, la circulation des documents dans la maison, et d'autres détails, conclut Ella De la Voaof; quand comptez-vous revenir? - Je vais lire ce livre d'abord, tempéra Fred en montrant l'ouvrage que Lange lui avait laissé dans la main. - Oui, salua la jeune femme, je crois qu'il est à vous maintenant. Mais vous pouvez le ramener, bien entendu. Il s'avancèrent ensemble jusqu'à la porte d'entrée et Fred sortit en croisant un grand barbu brun qui, après les avoir salués, se dirigeait vers le salon d'observation des joueurs de boule. En descendant il feuilleta l'ouvrage dont la couverture avouait avoir été modifiée, recouverte et secondairement réimprimée; il s'en alla téléphoner à son amie pour lui dire qu'il rentrait. CHAP.3 - PAGE#34 Fred lut le livre que Lange lui avait donné. Rien ne l'y obligeait mais les accents et les propos du docteur avaient renversé sa critique. Ce n'était plus à sa personne mais au contenu de ses paroles qu'il désirait s'en prendre. D'autre part, Fred avait une raison supplémentaire pour être intéressé: les questions que Lange avait soulevées l'interpelait car elles concernaient - ce que Lange était censé ignorer - les arcanes de ses propres activités, étudiantes et professionnelles: par coïncidence il avait lu, l'année passée, un article résumant la naïveté que Freud devait à son siècle en ayant cherché l'origine historique de Moïse. Que l'Hébreu ait été égyptien ou chinois n'intéressait pas la psychanalyse qui n'était pas raciste et qui ne se mêlait pas de politique. L'ouvrage semblait intitulé OEDIPE EST AKHENATON, dont il avait facilement repéré le titre falsifié; on retrouvait aux secondes pages qu'un premier traducteur l'avait désigné OEDIPE ET AKHENATON; ce qui était plus conforme au titre anglais. Cependant il avait rapidement compris que la modification, faite par Lange peut-être, était tout à fait justifiée; elle indiquait mieux l'essence du message que le texte démontrait. Quelques notes indiquaient que le livre, écrit par un psychiatre, un certain Immanuel Vélikovsky, avait été publié à NewYork en 1960apJC. Pour faire le rapprochement entre le personnage légendaire (Oedipe) et le personnage historique (Akhenaton), le livre utilisait la comparaison entre les textes grecs dont la figure d'Oedipe était issue et les résultats d'une égyptologie dont Fred s'était toujours plu à imaginer le début en date des premiers exploits de Napoléon Bonaparte - de la fameuse expédition d'Egypte que le futur Empereur fit avant de rentrer à Paris pour prendre le pouvoir, passées les prémisses d'une République Française, cinq ans après l'exécution du dernier roi, en France. Evidemment cette égyptologie avait depuis lors ramené de nombreuses autres choses que des obélisques - entre autres on commença à entendre parler d'Akhenaton vers les années 1900. Quant à l'histoire d'Oedipe, elle avait été magistralement statuée par Sophocle en 400avJC; en trois pièces qui contaient la vie d'OEDIPE ROI, puis son exil: OEDIPE A COLONE; avec une troisième pièce titrée du nom de sa fille ANTIGONE qui contait ce qu'il advint de ses enfants. Au décours des pages du livre, Fred avait retenu de Vélikovsky quelques formules: "" Si nous avons raison l'histoire d'Akhenaton est celle d'Oedipe lui-même "";ou bien: ""S'il est vrai dans notre thèse que la légende d'Oedipe se développa à partir des expériences réelles du pharaon Akhenaton et de sa famille, alors Freud se fourvoie en soutenant qu'aucune base historique, mais seul un besoin caché, commun à tous, est la source de la légende "". S'agissant de l'égyptologie le livre de 1960 disait encore: ""L'histoire projetait sa lumière sur la vieille légende; mais la vieille légende aussi éclairait l'histoire. "Le règne d'Akhenaton qui fut dix sept ans peraâ (autre façon de dire "phare à on") d'Egypte apparaît comme l'époque la plus intéressante dans la longue suite de l'histoire égyptienne" écrivait A.W. en 1922, ajoutant: "Il n'y a probablement aucune période de l'histoire ancienne qui mérite une telle élucidation." Ceci est très connu: la réforme religieuse d'Akhenaton fut abolie, sa lignée s'éteignit, ses cités et son palais furent abandonnés; l'histoire, quoiqu'il en soit, professe ne pas connaître la cause de tout cela, ni le destin personnel d'Akhenaton, ni ce qui arriva durant la période d'anarchie qui suivit ou, peut-être, précéda la fin de cette glorieuse dynastie. "" Et cette inconnaissance avait subsisté jusqu'en 1959. Fred avait lu le livre dans son intégralité. Il était composé de deux parties; l'une montrait les similitudes tenant à la pièce OEDIPE ROI; la seconde exploitait celles de la pièce ANTIGONE (par contre, peu cas était fait d'OEDIPE A COLONE). En quelque sorte Vélikovsky racontait cela: A l'origine, Oedipe élevé loin de ses parents, revint jeune homme en son pays, premièrement pour résoudre les énigmes du Sphynx et ensuite pour régner sur Thébes. Or s'il y a en effet une Thébes en Grèce que l'on dit "aux sept portes", bâtie sans doute ou identifiée après 1000avJC - c'est à dire après la fin de la Crête Minotaurienne, bien avant déjà, une ville s'appelait Thébes en Egypte, dite "aux cent portes", pour en être la capitale; et où régna Akhenaton peu de siècles avant l'an 1000avJC. Et bien sûr le Sphinx de Guizeh trônait aussi depuis longtemps aux coté de la grande pyramide de Chéops; c'est à dire depuis 2500avJC. Donc les figures monumentales et les lieu-dits de part et d'autre, nord et sud de la Méditerranée, ont répété en Grèce une sorte de modèle-réduit de l'Egypte - sans qu'il soit nécessaire même de voir qu'un "Isthme" (sur lequel Oedipe était promis à régner entre le Péloponnèse et le continent) ressemblait dans le même rapport à l'isthme que fait l'Arabie entre l'Afrique et le continent eurasien; tandis qu'en ce lieu de connexion, Akhenaton avait eu l'ambition de régner en unificateur. Une fois cette géopolitique campée et figurée, Vélikovsky continuait à étudier Sophocle. Le dramaturge avait conté qu'Oedipe rentrant au pays avait tué son père. Le psychiatre examinait si quelque chose correspondait au fait selon l'égyptologie. Or sur ce point, jugea Fred, Vélikovsky ne trouvait rien de bien convainquant: ses allusions à la décadence morale et à l'homosexualité d'Aménophis.3, le père d'Akhenaton, n'avaient pas beaucoup de poids en songeant aux milliers d'années de dynasties diverses qui avaient pratiqué ce que la préhistoire avait déjà établi comme une spécificité des rapports humains parmi les espèces de naturelles. Par contre il était plus fondé d'apposer qu'Oedipe avait eu une enfance menacée - c'était le motif de sa "quarantaine" à Corinthe, loin des attaques de son père et des jupons de sa mère; à coté du fait qu'Akhenaton, réapparaissant en Egypte jeune homme, sur ses premiers monuments s'attribuait régulièrement l'épithète du "qui-vécu-longtemps" ou plus précisément "qui-survécu-pour-vivre-longtemps" au point qu'un égyptologue s'était interrogé: "" Est-il possible que dans sa jeunesse Akhenaton n'ait pas été considéré comme devant vivre longtemps? "". En continuant à lire Sophocle, une pièce majeure de la comparaison était examinée; il était dit en 400avJC que le légendaire Oedipe avait épousé sa mère. Or c'est aussi ce qui, spectaculairement, apparaît de plus remarquable avec Akhenaton: "" le roi égyptien selon toute vraisemblance, ne fit pas que désirer sa mère, ainsi que tant de névrosés: il la posséda "". Vélikovsky argumentait que cet inceste s'était produit non pas du fait de l'ignorance, mais dans un contexte où tous les pays voisins pratiquaient des relations maritales avec père, soeur ou fille - conçues comme des accouplements sacrés. Or la mère d'Akhenaton était du sang des gens du pays voisin d'Egypte situé de sorte qu'il y avait peu de chance que ce ne fut pas là que la jeunesse du prince se soit passée. Dans ce pays l'inceste maternel s'agissait parmi ces coutumes admises ou sacrées tandis qu'il était propre à l'Egypte que soit abhorrée la copulation mère-fils. En admirant les fresque où Akhenaton côtoie sa mère Tiy dans "la chambre du congrès" on comprends que le bouleversement apporté dans le royaume était internationalement relatif mais qu'aussi, il dut entraîner de grands troubles. Donc en fin de compte: le fait de "l'ignorance" quant à l'inceste, si central dans la fable d'Oedipe, apparaît très logiquement s'intégrer au fait, pour Akhenaton et sa famille, de n'avoir pas été bien jugé quant aux fondations universelles du tabou, ni selon qu'avec l'Atonisme (la nouvelle religion d'Akhenaton) il allait précipiter sa perte (fondations au demeurant que nous ignorons encore aujourd'hui). Le contexte culturel, plus vaste que la simple tragédie de moeurs, était encore examiné par Vélikovsky. Il concernait cette fois-ci la politique et la révolution sociale qu'Akhenaton avait tenté d'imposer à son peuple; ce fait historique était aussi décrit comme un élément caractéristique dans OEDIPE ROI: Oedipe régnant avait apporté une amélioration et une satisfaction, appréciées mais temporaires dans la cité de Thébes. Au fil des pages Fred lut qu'un disciple de Freud, Karl Abraham, avait consacré en 1912, un article qui notait: "" L'idée du dieu d'Akhenaton est plus proche du concept chrétien que du mosaïque "".Il lut encore la description du culte solaire (Atonisme) et apprit qu'une cité (Akhetaton ou Amarna) fut bâtie pour promouvoir l'expérience de "la vérité" telle qu'une démocratie y avait pris place. Fred, lisant ces pages, pensa à "La cité du Soleil" que le moine Campanella, faux-ami de Galilée, avait tenté d'instaurer, bien plus tard, après 1600apJC, en participant de façon majeure aux convulsions de la Renaissance occidentale; où se joua une phase essentielle de la constitution de l'Europe - mais il repoussa ces allusions qui n'entraient pas dans son sujet. Pour que tout soit historique de la pièce de Sophocle, il manquait, dans la première partie du livre, un ultime élément important à comparer avec l'égyptologie. Il s'agissait du personnage de Créon, frère de Jocaste, la mère d'Oedipe; qui lui succéda après sa pendaison et l'exil de son fils; Or effectivement, il y avait à Akhetaton un proche de la reine mère Tiy que la généalogie égyptologique met en perspective d'en être le frère; et qui fut allié d'Akhenaton, comme Créon d'Oedipe, pour lui succéder ensuite. Ainsi l'américain montrait que chaque élément d'OEDIPE ROI correspondaient à un fait précis, voire anecdotique, antérieur d'un millier d'année en Egypte - et réciproquement chaque fait sensible de la période égyptienne était conté par Sophocle; tandis que troisièmement aucune incongruité ou fait irrelaté ne dépareillait, ou ne désassemblait les deux descriptions, sophocléenne (400avJC) et égyptologique (1900apJC). Fred comprit qu'il avait été important d'arrimer par les anecdotes et les aléas conjoncturels, une telle similitude entre l'histoire et la légende; car le débat devait décider si le rapport de Sophocle ne dut prêter qu'à une estimation mythologique qui, s'imposant à tous les hommes, trouvait sa fondation dans la nature des choses (dans ce cas seules des généralités universelles devaient correspondre); ou bien si telle ascendance sur les destins multiples devait correspondre à la volonté et à l'histoire d'un et un seul individu - aurait-il même été sujet d'une identification (sujet royal) particulièrement conditionnée, à la Masse et à l'Histoire - tel était le cas où des singularités hasardeuses étaient controuvées. Fred continua à lire en se souvenant de ce que disait Lange: identifier Oedipe à Akhenaton devait être conclu par la reconnaissance qu'Akhenaton était aussi devenu le personnage de Moïse. Pourtant Vélikovsky considérait qu'Akhenaton était mort en Egypte - ou plutôt il était très laconique sur la question: "La fin d'Akhenaton fut soudaine", c'était à peu prés tout ce qu'il affirmait. Encore que d'une façon générale - bien qu'il lâchait une pathétique description du matin où "" le disque du soleil s'éleva au-dessus de l'horizon, et rayonna sur un homme, hier roi, maintenant vagabond errant vers l'exil "",il situait incontestablement un exil hors d'Akhetaton, la cité du soleil; tant qu'il en référait l'idée à l'opinion de l'égyptologue Noblecourt pour qui Akhenaton vécut en exil au Sud du pays - la fin d'Akhenaton restait incontestablement floue et OEDIPE ET AKHENATON ne cherchait pas à trouver la correspondance d'un exil décrit par Sophocle à Colone. Par contre, Vélikovsky examinait avec plus de précision la question de la cécité d'Oedipe. Fred s'amusait toujours à ce sujet; il ne comprenait pas pourquoi un homme qui avait couché avec sa mère dût s'arracher les globes oculaires plutôt qu'autres choses... mais enfin, le psychiatre américain remarquait qu'Akhenaton portait à l'occasion le nom d'Imenhotep, devin protecteur des aveugle et assimilable à Tiresias, autre devin homologue en Grèce était connu pour avoir été transformé en femme puis, redevenu homme, castré par Hera, la femme de Zeus (c'est pour consoler le malheureux que Le dieu le rendit aveugle). Mais encore Fred se rappela du curieux livre de celui que Freud appelait le Grand Gustav Théodore Fechner, un très sérieux philosophe égal, selon le psychanalyste, à Shopenhauer et Nietzche. L'important était moins que, lorsque Fechner se demandait si les anges avaient des pieds et que, pour résoudre l'énigme, il examinait comment une mère tient son fils par les dessous, comme ceux liés d'Oedipe; tandis qu'Akhenaton que certaines statues montrent sans testicules avait d'énormes cuisses, enflées sur des chevilles étranglées ("oedipus" valant pour "oedème de patte"); bref, l'important était que Fechner, qui avouait volontier voir des bulles angéliques et vaporeuses ""dans l'humidité aqueuse des chambres intérieures de son propre oeil, fatigué d'avoir fixé le soleil (!)""; que Fechner, donc, pendant les années de 1840 à 1843 vécu, quasiment aveugle, tant ulcéré par la lumière que ne pouvant sortir qu'avec un bandeau, de la chambre totalement obscure qu'il dut occuper. Fred donc, songea de la sorte à Akhenaton qui priait en fixant l'astre solaire. Mais enfin, ayant un moment médité sur ces analogies, il attaqua la seconde partie du livre de Vélikovsky qui appliquait aussi la méthode comparative, appliquée cette fois, à la pièce ANTIGONE. De nouveau les détails, la précision et l'anecdotisme, venaient faire pâlir l'idée qu'Oedipe fut avant tout un mythe - à moins d'être déterminé à être aveugle devant l'évidence - cas de le dire. Il ne s'agissait plus du destin seulement, mais jusqu'en la famille et les enfants du prince, la similitude se retrouve entre Oedipe et le pharaon, solaire et celluliteux (qui comme Moïse réputé pour son élocution difficile pouvait se faire aider par un cousin lorsqu'il avait du mal à jaculer avec fécondité). S'agissant de Néfertiti, épouse d'Akhenaton qui laissa un trace émouvante dans l'histoire, des pièces annexes à celles de Sophocle content qu'Oedipe eut d'autres femmes que sa mère. Et pour s'en tenir aux enfants, il était tout de même remarquable que, si le phénomène majeur qui suivit la fin du règne d'Oedipe est marqué par l'opposition entre deux règnes très brefs de ses deux fils - quant à Akhenaton, le cas se présenta avec ses fils Semenkhare et Toutankhamon (dénommé Toutankhaton à sa naissance). Or, si les deux enfants s'entre-tuent dans une lutte politique, des deux d'Oedipe, l'un est enterré comme un parias, en cachette et de façon maladroite, à moitié déterré; l'autre est inhumé selon une procédure royale particulièrement fastueuse et auspicieuse. A coté de cela, l'histoire égyptienne révèle que des deux jeunes princes, l'un fut retrouvé inhumé avec une précipitation honteuse, sur le catafalque de Tiy, dans le cercueil d'Akhenaton, l'ensemble ayant été à moitié entrouvert - tandis que Toutankhamon connut la nuit protégée et célèbre que l'on sait. C'est à dire que la similitude entre Oedipe et Akhenaton atteignait même les épisodes anecdotiques ultérieurs au prince lui-même. Il devenait évident que l'égyptologie apprenait de la Grèce des liens insoupçonnés... Avant de refermer le livre de Vélikovsky Fred lut encore les derniers chapitres qui concernaient la théorie du fait que le souvenir d'Akhenaton avait persisté dans la République d'Athènes; puis l'ultime chapitre consacré à Freud - Vélikovsky tentant d'expliquer pourquoi l'inventeur de la psychanalyse n'avait pas vu que le sujet du "complexe d'Oedipe", qui l'avait rendu célèbre, n'était autre que le même Akhenaton qui, dans son dernier livre, éclaircissait la personnalité de Moïse... L'affaire était "complexe" et à cette occasion le psychiatre américain rappelait qu'une étude de Freud, fondamentale pour l'histoire de la psychanalyse, fut appliquée à "un éminent juriste"... que Vélikovsky ne nommait pas, mais décrivait ""souffrant de l'illusion qu'il était destiné à apporter la rédemption à la race humaine, que l'énergie solaire lui était distribuée sous forme de rayons donnant la vie, comme à personne d'autre - concept très similaire à celui qui qualifiait Akhenaton ""- tandis qu'une troisième illusion rapprochait les deux cas selon qu'ils étaient touchés par une métamorphose et par l'acquisition d'un corps de femme. Il devenait oppressant que l'égyptologie apportait à la psychanalyse des lumières insoupçonnées... Durant cette période, Fred ne parla pas de sa lecture à la SAMCDA, où il était professé qu'arriver à comprendre que l'histoire d'Oedipe était un mythe représentait une grande conquête pour l'humanité. Et il continua à ne pas parler de Lange. Cependant quoiqu'il fut troublé, l'ébranlement n'était pas tel qu'il ne cessa de penser à Claude. C'était le but de la manoeuvre - et quelqu'en fussent les chants de sirènes, il aurait encore proclamé comme une nue lisse, attaché à un totem, que ce mat n'était qu'un mythe (et le chant désir-haine une irréductible réalité qu'il fallait bien nous mettre dans la tête - pour supporter la guerre). Fort d'un si bel Inconscient, il revint voir Lange, se disant qu'avec le Vélikovsky - et les publications de la SAMCDA dans sa mallette - il en savait de nouveau plus que lui. Lange l'accueillit avec bonheur. Il le remercia de ramener l'ouvrage pour un autre lecteur. Fred déclarant qu'il avait néanmoins lu chaque ligne, le médecin entreprit de converser un moment avec lui. - Vous avez donc apprécié, se réjouit-il; il va falloir que nous parlions de Freud maintenant, pour rehausser tout ça. Mais avant cela il y a deux ou trois petites choses que je voudrais assurer que vous ayez remarqué dans le livre de Vélikovsky; ensuite nous parlerons de Vélikovsky lui-même; vous verrez que cet écrivain déborde de ce livre d'une façon tout à fait singulière. - Mais tout d'abord, débuta Lange, avez-vous goûté comme Vélikovsky se tire de l'affaire du meurtre du père? Car Oedipe assassine son père Laïos, n'est-ce-pas; et le père d'Akhenaton, Aménophis.3, n'est pas connu pour avoir subit le même sort. Nous n'en savons rien, il est vrai; mais d'autres sources sur lesquelles Vélikovsky n'a pas mis l'accent nous indiquent que, plutôt que réputé d'une ambiance décadente, pédéraste et haïssable pour son fils, le règne d'Aménophis.3 fut en vérité grandiose. L'Egypte depuis un siècle venait de se remettre de l'épreuve profonde d'un quasi engloutissement sous l'occupation d'un peuple que l'on appelait Hyxos - nous n'avons pas beaucoup de renseignements à ce sujet; l'Egypte n'affichait pas ses mauvais souvenirs ou les effaçait. Mais la grande tradition dynastique venait de se rétablir et, Aménophis.3 à son apogée rendit public qu'un Messie était annoncé, par les mages, les signes, les augures... Car la religion Egyptienne était messianique. Vous savez que dès sa fondation, elle déclarait la résurrection des corps sur la terre; et que depuis les premières pyramides, la population était prévenue d'attendre un sauveur... Nous ne savons pas s'il y eut beaucoup de Messies entre 3000avJC (premières pyramides) et 1350avJC; mais en tous cas Aménophis.3 sembla préparer le terrain et, selon une certaine probabilité, pour son fils. Il n'estima pas être lui-même cette incarnation rénovatrice de la divinisation. Cependant ça faisait presque deux millénaire que les égyptiens attendaient ça! Pour passer le temps, ils s'étaient occupés à aménager le temps passé à attendre ladite résurrection; c'est à dire qu'ils avaient une religion activement tournée vers la mort. Il est possible même qu'ils ne croyaient plus tellement à la résurrection... qu'en pensez-vous? Fred indiqua qu'il n'avait pas de lumières particulières sur la question; et Lange poursuivit: - Donc relativement à la question de l'assassinat d'Aménophis.3 rien n'est certain. Et si on a certaines raisons de croire qu'Akhenaton porta atteinte, au moins à la mémoire de son père, en faisant effacer son nom de certains temples et monuments, rien ne dit que ce ne fut assez tard dans son règne; quoiqu'il en soit, au début, il n'avait pas de raison d'en vouloir à son papa, puisqu'il aurait été tout à fait d'accord avec lui et se serait comporté pour de bon comme le Messie. D'ailleurs, la religion solaire qu'il établit n'était pas celle de quelque peuple voisin qui adorait une identification féminine de l'astre solaire, cultivant en même temps cet inceste, que Vélikovsky découvre là où Akhenaton aurait été élevé durant son jeune age. Non! La religion qu'Akhenaton remit en scène était la pure, la dure et la primitive essence de l'Egypte-même. Ses sources étaient à prendre d'Héliopolis et de la ville d'On. Ils se pourrait donc que l'assassinat du père fut tout ce qui subsistât de mythique dans la légende de l'Oedipe historique, relança Lange; mais à part ça la seconde chose qu'il est heureux de voir à la lecture de Vélikovsky concerne le fait que ce savant n'employa pratiquement pas la pièce où Sophocle décrit la fin d'Oedipe à Colone. Pourtant il se passe des choses très importantes à Colone. Et non des moindres puisque s'y affirme qu'Oedipe sort du pays de Thébes et transmet toute sa puissance et son destin au roi du pays voisin qui s'appelle Thésée. Alors si Sophocle est décidément historien, à l'évidence avec deux autres pièces, pourquoi diable ne le serait-il pas aussi avec OEDIPE A COLONE? - Il y a donc de fortes chances, expliqua Lange, que Vélikovsky ait chuté, buté, de la même manière qu'il le dénonce si bien chez les autres - chez Freud spécialement. Et de fait; comme il se voit souvent dans ce cas d'en recoudre avec un symptôme, il s'en prend à Sophocle - c'est à dire comme dans le "transfert", à celui-là-même qui, dudit symptôme l'avait délié. Ainsi dans OEDIPE ET AKHENATON Vélikovsky dénigre celui à qui il doit la vérité; et il estime que, pour la bonne raison que le fils du dramaturge grec, pressé d'hériter, fit déclarer le vieil homme irresponsable et dément, ce dernier dut être pris d'une rage telle que, lui-même étant né à Colone, il se met à débloquer et songe qu'Oedipe, c'est lui-même, à 90 ans, dans le village de son enfance. Voilà pourquoi, selon Vélikovsky, Sophocle aurait écrit OEDIPE A COLONE; et la bonne raison pour laquelle lui-même se fiche de cette pièce. - Vous savez que Lacan aussi, indiqua Lange, fut traité comme sénile parce qu'à 80ans il n'avait pas su quoi dire en arrivant en Argentine. Pourtant chacun sait qu'on a pas besoin d'être intelligent ni d'avoir vingt ans pour être psychanalyste, encore moins pour raconter des histoires vraies. Je ne suis pour ma part même pas certain que l'on sache avec certitude à quel moment OEDIPE A COLONE fut écrit - et puis de toutes façons comparez avec ce qu'on fit croire de MOISE ET LE MONOTHEISME, le livre que Freud publia la veille de sa mort. Mais enfin, OEDIPE A COLONE contant l'exil d'Akhenaton prend de telles couleurs quand on la regarde sous un autre angle qu'une oeuvre sénile! Ne serait-ce que pour ceci, cher Monsieur, que Colone vaut pour Kolona, qui désigne la ville de Troie, de l'autre coté de la mer Egée, face à Athènes, en Turquie actuelle, qui à l'époque était en pays Hittite dont nous reparlerons. Pour le moment il nous suffit bien de louer Vélikovsky pour l'immense apport que son étude fournit à une question primordiale dans l'Histoire et par conséquent l'avenir de l'humanité actuelle; pour que nous puissions l'interroger du même ton critique qu'il appuie sur autrui. Et, pour élever ce qui gît toujours d'aimable dans l'ironie rappelez-vous de cela que je retrouve dans l'avant-propos: Et Lange cita du livre qu'il récupérait de Fred: "" Il y a une connotation ironique dans le fait d'accoler le nom de ces deux personnages: Oedipe et Akhenaton furent tous deux évoqués par Freud. Celui-ci ne réalisa pas cette étroite ressemblance, qui va jusqu'à l'identité." - Avouez que c'est amusant, sourit Lange, car l"'ironie" lui "connota" sur le nez - précieux Vélikovsky! - enfouisseur d'Oedipe à Colone, quand il termine son livre en évoquant l'héroïque Freud décrivant que Moïse était un Egyptien, disciple si proche de son instructeur Akhenaton. Car Vélikovsky ne réalisait pas qu'entre Oedipe et Moïse, l'étroite semblance... allait jusqu'à l'identité. - Mais au fait, pensa Lange tout haut, connaissez-vous cette pièce, OEDIPE A COLONE? Car ce n'est pas la lecture de Vélikovsky qui vous en aurait appris beaucoup! Savez-vous même que les psychanalystes ne connaissent pas du tout cet "aspect" du complexé dont ils sont émules et spécialistes! Au demeurant, d'une façon générale, personne ne fait référence à cette pièce; les philosophes préférèrent parler d'Antigone, c'est leur sainte vierge de l'Ethique; et quand un psychanalyste se mêle d'Oedipe à Colone, c'est Lacan qui déclare éhonteusement l'inverse de ce qu'il prétend lire (c'était le 19/05/55 je crois). Mais enfin, avez-vous appris ça à l'école? Vous ne m'avez même pas dit quelles études vous avez faites parlez! Vous voyez, je parle tout le temps! Je sais bien qu'il est préférable que je vous apprenne des choses que vous ne savez pas - mais peut-être connaissez-vous tout ça... - |
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