Rapport de jury capeps ecrit 1 2005








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Rapport de jury CAPEPS Ecrit 1 2005

SUJET : Le développement des loisirs en France depuis ces quarante dernières années a-t-il eu une influence sur les objectifs et les méthodes de l’éducation physique et sportive ?
Le sujet de la session 2005 incitait les candidats à réfléchir aux influences exercées par l’évolution sociale des loisirs au sens large sur l’éducation physique et sportive appréhendée du seul point de vue de ses objectifs et de ses méthodes. Les effets repérés du mouvement des loisirs, la nécessaire distinction entre objectifs et méthodes, ainsi que les relations apparemment antinomiques entre les valeurs du loisir et celles de l’école constituaient le socle indispensable sur

lequel tout candidat devait construire sa réflexion.

Dans un contexte conjuguant l’évolution du système d’éducation et l’évolution des pratiques physiques sociales de loisirs, l’interrogation centrale reposait sur le traitement de la notion d’influence. Le langage commun situe l’influence comme une action généralement lente et continue entraînant des modifications. Partant de ce présupposé simple, les tâches auxquelles devait satisfaire le candidat consistaient à mettre en évidence les changements repérés, à préciser les moteurs d’évolution, à en apprécier les effets, l’intensité, la permanence, à dégager les temps de rupture. Un regard comparatif sur d’autres influences exercées au niveau des objectifs et des méthodes de l’ÉPS permettait de restituer de manière plus raisonnée l’impact du développement des loisirs. L’influence en retour de ce qui s’enseigne dans le milieu scolaire sur les pratiques sociales de loisirs offrait des perspectives que les meilleurs candidats ont su exploiter. La faiblesse d’une certaine quantité de copies a tantôt résidé dans l’indifférence relative accordée au concept d’influence tantôt dans l’absence d’approfondissement de cette notion essentielle à l’établissement d’une problématique.

Une difficulté supplémentaire apparaissait dans la prise en compte des niveaux d’influence et dans la nécessité d’en rendre compte de manière distincte. Ainsi, devaient être dissociées les influences traduites dans les textes officiels successivement publiés depuis la fin des années 1950 et les pratiques instaurées au quotidien dans les établissements scolaires, lors du cours d’ÉPS comme dans les diverses actions pédagogiques, institutionnellement constitutives de la discipline (demi-journée de sport, association sportive…). Ce distingo entre une ÉPS prescrite dans les textes et une ÉPS mise en oeuvre dans les pratiques devait être éclairé, en fonction des périodes, par la réalité des contextes sociaux, culturels et politiques.

La qualité de la problématique résidait dans les articulations faites par le candidat entre le développement des loisirs et les objectifs et méthodes de l’ÉPS. Il s’agissait de faire ressortir les liens étroits qui se sont tantôt noués, tantôt dénoués mais aussi parfois renoués. La seule juxtaposition des évolutions n’a pas été jugée recevable. L’intensité et la nature des influences devaient être questionnées et argumentées à partir d’exemples précis.
Acquérir et mobiliser des connaissances pour construire une démonstration argumentée

Le loisir en France devait être abordé dans une double dimension sociale et temporelle. Dans le respect d’une analyse portant sur l’intégralité de la période de la fin des années 1950 à nos jours, aucune des étapes de l’évolution ne pouvait être ignorée. La définition que Joffre Dumazedier propose en 1962 dans son ouvrage La civilisation du loisir est construite en référence aux contraintes du temps de travail. Elle pouvait constituer un excellent point de départ. « Le loisir est un ensemble d’occupation auxquelles l’individu peut s’adonner de plein gré, soit pour se reposer, soit pour se divertir, soit pour développer son information ou sa formation désintéressée, sa participation sociale volontaire ou sa libre capacité créatrice après s’être dégagé de ses obligations professionnelles, familiales et sociales ». Plusieurs dimensions apparaissent, la plus importante établissant le loisir comme un corollaire du temps libéré. La mutation des mentalités se perçoit dans l’accroissement des activités sportives qui représentent un champ privilégié d’expression quant à l’utilisation d’un temps pour soi.

De ce point de vue, il n’était pas envisageable d’exclure le monde des pratiques sportives des pratiques de loisirs. La vision restrictive de certains candidats, le rejet du sport en raison d’une assimilation caricaturale de la pratique sportive aux excès du sport de haut niveau ne pouvait que traduire la méconnaissance historique du phénomène des loisirs et de la réalité du monde du sport.

Les évolutions sociales vont cependant induire une diversification des formes du loisir sportif. Progressivement, la pluralité s’affirme comme une caractéristique qu’il convenait d’exposer et de discuter. Des alternatives s’offrent aux dimensions institutionnelles, fédérales, compétitives. Le paysage des pratiques s’orne de possibilités nouvelles et multiples. Loin de la bipolarité opposant compétition et détente, les motivations qui s’expriment renvoient à une transformation des attentes et des mentalités. La logique centrée sur la satisfaction à maîtriser le geste technique, la volonté de dépassement de soi et le goût de la victoire persiste dans les enseignements, mais apparaît de plus en plus concurrencée par une démarche centrée sur la recherche de plaisir, l’accentuation des émotions et l’évitement des contraintes. Seuls les candidats attentifs aux relations entre l’ÉPS et la culture ont su retranscrire avec nuances et mesure toute la complexité de cette évolution.

L’orientation sportive qui se développe dans la société française durant les années 1960 participe largement à l’avènement de la civilisation des loisirs étudiée par Joffre Dumazedier. Ces changements pouvaient être démontrés à plusieurs niveaux. La politique nationale en faveur des équipements sportifs, la croissance du nombre des licenciés, le taux de féminisation, la diversification et la réorientation des pratiques, la constitution d’un secteur économique spécifique font figure d’exemples pour lesquels, par exemple, les travaux de Jacques Defrance et Jean-Paul Clément pouvaient servir de référence. Á cet ensemble, devaient être associés dans un contexte de croissance, les effets de la réduction du temps de travail, l’apparition de la quatrième semaine de congés payés ainsi que la diminution de la pénibilité du travail telle que révélée par l’accroissement du secteur tertiaire. Ces éléments établis, le candidat devait ensuite examiner les conséquences du développement des loisirs sportifs sur les objectifs et les méthodes de l’éducation physique et sportive.

La connaissance des textes, depuis les instructions officielles de 1959 jusqu’aux textes des programmes actuels, s’avérait indispensable pour proposer une argumentation de qualité. C’est dans ce corpus que devaient être puisées les références renvoyant aux méthodes en tant qu’ensemble de moyens et de démarches permettant d’atteindre le résultat fixé par la hiérarchie institutionnelle. Ce niveau formel d’une éducation physique prescrite ne pouvait ignorer la réalité des mises en oeuvre. Ainsi, les travaux de l’historien Pierre Arnaud constituaient-ils un des outils d’analyse utilisables pour examiner la nature et l’évolution des pratiques professionnelles. Un regard longitudinal sur les différentes modalités d’enseignement et sur les propositions pédagogiques effectuées permettait de repérer avec une meilleure précision les caractéristiques des méthodes successivement en vigueur.

La mise en place de l’initiation et de la compétition sportive dans le cadre de l’association sportive puis de l’ÉPS résulte des circulaires de 1961 et 1962. Le mouvement est accentué par les instructions officielles de 1967 dont l’objet est de développer le goût de la pratique et la diffusion d’une culture sportive pour le plus grand nombre. Des similitudes entre l’éducation physique et les associations sportives fédérales pouvaient être mises en évidence tant dans les démarches d’enseignement -pédagogie du modèle- que dans les structures d’organisation et de fonctionnement -expériences de Corbeil-Essonnes, République des Sports de Calais-. Dans le texte de 1962, la mission du sport scolaire passe de manière privilégiée par la spécialisation et la compétition sportive. Cet accès renforcé à la culture sportive pouvait être ici considéré au regard du phénomène social grandissant du loisir sportif.

Le phénomène des pratiques touristiques de plein-air est encore marginal dans les années 1960. Mais, l’accroissement des migrations saisonnières des Français, la multiplication des bases de loisirs ainsi que la mise en place de formations de cadres spécialisés accentue le mouvement. Une forte ouverture apparaît dans les instructions officielles de 1967 qui posent de manière définitive les relations entre l’éducation physique et le domaine de la culture. La forme est encore traditionnelle et l’influence reste réservée. On peut cependant noter l’apparition de la référence à la maîtrise du milieu. La classification des activités physiques et sportives évoque l’utilisation de pratiques de plein-air. Au quotidien cependant, athlétisme, gymnastique et sports collectifs constituent l’essentiel d’enseignements où domine l’apprentissage du geste technique.

Olivier Hoibian a bien montré que le développement de l’eutonie, de l’expression corporelle et des pratiques de plein-air s’organisait sur le mode de la substitution au modèle compétitif. Cette nouvelle forme de loisir, cependant, se voit rapidement associée à l’émergence d’un autre registre de valeurs, celui d’une jeunesse en rupture de lien hiérarchique et en quête d’un équilibre individuel. Ce temps marqué par les événements de mai 1968 constitue une deuxième étape dans le développement des loisirs. En EPS, l’élan du loisir contre-culture en réaction aux sports compétitifs s’est répercuté dans les propositions d’une éducation physique alternative fondée sur la critique de l’orientation sportive et le souci de renforcer la légitimité scolaire. De cette manière, le phénomène des loisirs a contribué à accentuer la diversification des objectifs et des méthodes de l’ÉPS et la prise de distance de la discipline vis-à-vis des pratiques sportives. L’intitulé même d’un secrétariat d’Etat à la Jeunesse, aux Sports et aux Loisirs dirigé par Joseph Comiti signale une inflexion institutionnelle que concrétisent la publication des circulaires du 9 septembre 1971 et du 1er juillet 1972 invitant les enseignants à s’ouvrir aux pratiques sociales. Ainsi, la création de centre d’animation sportive offre-t-elle la possibilité de pratiquer sur des structures mixtes du canoë-kayak, de la voile ou de l’équitation. Non pas défavorables à ces contenus mais à la politique mise en oeuvre, un certain nombre d’enseignants s’avèrent rétifs et proposent de nouvelles méthodes dans le dessein d’affirmer une distinction franche entre le champ de l’ÉPS et celui du sport fédéral. En particulier, le traitement didactique des disciplines se présente alors comme un moyen au service d’une politique de distanciation. Ce contexte de crise n’est pas favorable à l’intégration des pratiques de plein air.

Durant les années 1980, le loisir contre-culture perd progressivement sa logique contestataire pour s’imprégner d’une logique marchande. Alain Loret et Olivier Hoibian ont étudié les modalités d’évolution des sports de plein-air, d’aventure et de rue qui deviennent autant des sports dits « funs » que la marque distinctive d’une nouvelle génération. Un autre style de vie sportif, à la fois libre et dynamique et une mode de la forme et du jeunisme s’imposent alors comme de nouveaux standards. Dans la civilisation du loisir, la commercialisation bat son plein. Jacques Defrance a mis en évidence la dépolitisation et le déclin de la contre-culture des loisirs. Les pratiques sportives institutionnalisées trouvent ainsi une nouvelle impulsion. Les pratiques hors institution se radicalisent suite à l’émergence des sports dits extrêmes ou s’industrialisent par le développement des pratiques d’entretien corporel. Une troisième période, à partir du milieu des années 1980, voit donc apparaître une sorte de consécration de la reconnaissance et de la démocratisation des loisirs sportifs selon des formes de pratique diverses. L’évolution est liée à l’attribution d’une cinquième semaine de congés payés en 1981. Elle est accentuée par la loi du 13 juin 1998 et l’adoption des 35 heures. À la phase d’accroissement du temps libre correspond celle de l’augmentation de l’offre qui confronte les individus à une multiplicité de pratiques institutionnalisées et, a fortiori, de pratiques dites libres.

La prise de conscience de l’existence d’un sujet en auto-formation dans ce domaine particulier des activités physiques s’opère. L’importance économique, sociale et culturelle des loisirs pèse sur les mises en oeuvre éducatives où se perçoit la prise compte de l’évolution des valeurs du monde des pratiques de loisirs. Or, ancrées dans la culture et la société, les missions de l’ÉPS visent la transmission d’un ensemble non exclusif de cultures sportives. L’école qui prépare au temps du travail ne s’interdit pas de préparer au temps du loisir pour former un citoyen cultivé, lucide et autonome. Les effets de l’influence du développement des loisirs apparaissent de manière lente mais progressive. Ils devaient être distingués du processus d’orthodoxie scolaire décrit par Pierre Arnaud. Le contraste des valeurs du sérieux du travail à l’école et du plaisir des loisirs n’est pas étranger à l’ensemble des réticences. Les multiples actions pédagogiques et autres projets éducatifs constituent la principale voie d’intégration de nouvelles pratiques comme le ski, le surf, la voile, le VTT… En cela, l’influence reste modérée et seules les activités pouvant être adaptées aux normes de l’école ont droit de cité.

L’influence des loisirs pouvait donc être mise en évidence sur la longue durée à condition de bien repérer les formes exercées, les champs concernés, la variété des intensités et des modalités d’intégration.
Fautes à éviter et conseils de préparation

Il est attendu des candidats qu’ils identifient et dégagent les données historiques, philosophiques, sociologiques et institutionnelles qui accompagnent l’évolution de l’enseignement de l’éducation physique en France et qu’ils examinent les dynamiques et les conflits qui ont pu être générés. Ce rappel met en évidence l’importance des regards croisés dans des champs dont il convient d’apprécier le poids des influences dans les lenteurs, les résistances ou les accélérations de l’histoire. Le sens donné aux activités du corps ne peut ignorer les valeurs et les symboles, les modalités d’ancrage et de diffusion des représentations collectives. L’évolution de l’éducation physique et les liens particuliers et variables entretenus entre l’école et le monde des activités physiques de loisir s’inscrivaient dans le cadre plus large de la culture et de la société française. La démarche attendue n’était donc pas dans la linéarité du discours, ni dans la juxtaposition des connaissances mais dans la mobilisation d’arguments sélectionnés et organisés par une réflexion élargie à l’ensemble des déterminants du système d’éducation. Connaissances multiples, qualités de synthèse, pertinence des choix et clarté des propositions sont les axes prioritaires qui doivent guider le candidat dans sa préparation afin de lui permettre d’affronter les difficultés de l’épreuve.

Un recentrage sur la qualité de la forme semble indispensable. Le jury se plaint du laxisme méthodologique constaté dans beaucoup trop de copies. Certains candidats transforment l’épreuve en exercice pratique de commentaire dirigé, le plus souvent mal mené, dans lequel on “ interroge le sujet ”, on “ analyse les termes du sujet ”. Ni les allusions directes, ni l’examen mécanique des mots-clés ne peuvent se substituer à une introduction rédigée selon les règles d’usage. Ces pratiques constituent une faute méthodologique au même titre que le dialogue implicite (ou non) avec le correcteur dans lequel certains se lancent sans hésitation. Calligraphie et présentation négligées, orthographe et syntaxe défaillantes, soulignements, citations erronées ou trop souvent même inventées sont quelques-uns des défauts également inacceptables dénoncés par les correcteurs. Les remarques personnelles, les plaisanteries et autres avis sensationnels n’ont pas lieu d’être dans une copie de concours. L’épreuve est une épreuve écrite et il serait souhaitable que tous les candidats prennent conscience que la capacité à exposer par écrit est un des critères importants de l’appréciation de leur production. Par conséquent, un soin particulier doit être apporté au style et à l’orthographe, à l’organisation d’une démonstration pertinente et argumentée. Une bonne préparation au concours passe aussi par une maîtrise de l’art de la dissertation.
Les rapports de jury font depuis de nombreuses années des rappels méthodologiques qui lorsqu’ils sont suivis apparaissent comme une aide précieuse pour les candidats. Bien qu’ils ne soient pas repris ici, l’importance de ces conseils est réaffirmée. Ils représentent pour certains postulants, auxquels le jury suggère la lecture des rapports antérieurs, une base indispensable qu’ils doivent s’efforcer de maîtriser pour mobiliser au mieux l’ensemble de leurs connaissances. Le jury a souhaité inclure dans le rapport de la session 2005 de larges extraits d’une copie jugée satisfaisante. Cette illustration, incomplète pour des raisons de place, ne se pose pas en modèle mais en exemple de développement argumenté et référencé.

Après avoir mis en évidence la capacité de remise en question et l’adaptabilité aux changements sociaux de l’éducation physique et sportive dans la seconde moitié du XXe siècle, le candidat précise les principaux temps de l’évolution des modes de vie dans le rapport du temps de travail au temps libre. S’appuyant sur les travaux de Joffre Dumazedier, il introduit ensuite l’évolution des pratiques de loisir, leur multiplicité et leur complexité, la spécificité des valeurs qui leur sont associées.

Il poursuit par une analyse des trajectoires de l’éducation physique et sportive en distinguant tout particulièrement les objectifs et les méthodes de l’ÉPS. Il pose ensuite la question de l’influence, de la nature des effets, de leur intensité et de leur permanence, des différents niveaux auxquels elle se situe. Ainsi, la problématique est-elle posée en termes de décalage, de mise à distance et de rapprochement sur le double plan d’un « curriculum formel » et d’un « curriculum réel ». La fin de l’introduction dégage les analyseurs et pose les bornes temporelles d’un découpage chronologique en trois parties.

« La société française du début des années 1960 entre dans une ère de prospérité économique favorable à l’apparition de conditions de vie confortables et à l’avènement du phénomène des loisirs. En effet, dès les années 1950, quelques éléments, comme la naissance du tiercé en 1954, permettent d’en percevoir les prémices. Les années 1960 vont consacrer le phénomène notamment au travers de la pratique physique. Les instructions officielles tentent de s’en faire l’écho mais nous verrons que les pratiques sont difficilement prises en compte dans la réalité.

Selon Yves Travaillot dans L’histoire de l’ÉPS, genèse d’une discipline scolaire, les pratiquants sportifs licenciés voient leur nombre doubler entre 1960 et 1970 passant de 2,5 à 5 millions. Le système sportif se structure progressivement avec la mise en place des brevets d’état en 1963 et des directions techniques nationales, régionales et locales comme le montre Saint-Martin dans «L’emploi sportif à travers son histoire » (EPS Sport et Loisir, AFRAPS, 2000). Le phénomène sportif prend de l’ampleur mais si les sports olympiques traditionnels restent les plus pratiqués Yves Travaillot mentionne une « baisse relative » entendant par cela que ces fédérations évoluent moins que d’autres. C’est le début d’une « diversification du champ sportif ». L’apparition de nouvelles pratiques notamment des pratiques de pleine nature avec le développement de ce que Hoibian nomme « un esprit plein-air » remet en cause progressivement en question l’organisation et les pratiques traditionnelles. Ces activités où prime la recherche d’aventure sont essentiellement masculines. Yves Travaillot note l’opposition des pratiques d’entretien en relation avec une nouvelle vision du corps, une recherche éperdue de la jeunesse, de la forme, regroupant principalement les femmes de la FFEPGV qui voit ses effectifs augmenter considérablement. Suite à la crise sociale, Jacques Defrance dans « Les sports traditionnels après la fin de la tradition sportive » » (EPS Sport et Loisir, AFRAPS) évoque une certaine radicalisation, polarisation des pratiques permettant notamment de se démarquer du sport traditionnel. Si le loisir physique est essentiellement sportif et traditionnel (athlétisme, football, natation) au début des années 1960, il évolue vers plus de diversité avec l’essor de nouvelles pratiques et de nouvelles modalités de pratiques. Mais le loisir sportif ne se réduit pas à la pratique sportive, la diffusion par l’intermédiaire de la télévision des spectacles sportifs constitue également un élément majeur dans une « société du spectacle » analysée par Guy Debord en 1967. Comment l’ÉPS prend-elle la mesure de ces évolutions ? »

Le candidat poursuit en mettant en évidence la prise en compte des nouvelles pratiques par des courants qu’il qualifie de « contestataires cherchant à s’opposer à l’exclusivité du sport ».

« Les textes officiels de 1967 légitiment l’utilisation des APS en ÉPS. Dans la programmation proposée, on retrouve notamment les sports de plein air, les activités comme la danse ou la gymnastique rythmique. Si l’on pouvait y percevoir une certaine influence du développement des loisirs, il conviendrait de souligner que le plein air s’apparente davantage aux pratiques de la demi-journée de plein-air transformée en demi-journée de sport, que les pratiques d’expression sont réservées exclusivement aux filles. Si les textes ne tiennent pas ou peu compte de l’évolution des loisirs dans les contenus qu’ils proposent, en revanche, l’apparition d’un nouvel objectif « culturel » semble prendre en considération le développement du sport comme loisir. En cherchant à former des sportifs et des dirigeants et en se voulant l’écho des pratiques sociales, les instructions officielles de 1967 apparaissent influencées au niveau des objectifs par le phénomène grandissant des loisirs.

Pour ce qui est des pratiques de terrain, même si Pierre Arnaud dans son analyse des articles de la revue EPS constate un équilibre entre les différents titres de la programmation de 1967, nous pouvons penser que les pratiques majoritairement enseignées, au regard de l’étude de J. Marsenach, demeurent des sports traditionnels. En effet, les enseignants enseignent ce à quoi ils ont été formés. Même si une option APPN fait son apparition au CAPEPS en 1970, et que la formation professionnelle continue est instaurée en 1971, l’essentiel des enseignants a été formé à l’ENSEP ou dans les UEREPS de manière traditionnelle aux sports traditionnels.

Après une courte synthèse et un temps de liaison, le candidat débute sa deuxième partie par un regard rapide sur la société française après 1968. Il montre la massification ainsi que la complexification des pratiques dans le champ sportif. L’émergence des valeurs de l’individualisme, le rejet des contraintes et de l’autorité, la recherche des sensations liées au plaisir et à l’impression de liberté ouvrent le « nouvel âge du sport » en alliant des modalités de pratiques originales aux innovations technologiques. Le candidat poursuit :

« Les instructions de 1985 pour les collèges insistent dès l’introduction sur le fait qu’il existe dans la société des formes diversifiées de pratique : loisir, détente, entretien. Cela montre l’influence de l’essor des pratiques sportives de loisir dans la conception du rôle de l’ÉPS. De plus, le texte classe les APS en 7 familles introduisant notamment une famille d’activités physiques d’expression. Ces différents éléments, tout comme la modification de l’examen du baccalauréat permettant de choisir une APS autre que la gymnastique, l’athlétisme ou la natation, traduisent bien la volonté de diversification et la prise en considération des nouvelles activités sportives. Toutefois, cette prise en considération est ségrégative n’accordant que peu de place aux activités physiques d’entretien par rapport aux APPN.

Les pratiques, là encore laissent apparaître un décalage flagrant avec la réalité. Alors que les différentes familles d’APS devraient être théoriquement dispensées à part égales, nous pouvons constater en nous appuyant sur les travaux de D. Bertrand et O. Bessy que ce n’est pas le cas. En effet, ces recherches montrent que le triptyque gymnastique, athlétisme natation occupe à lui seul près de 85 % des activités proposées. Cela peut s’expliquer par les difficultés de mise en oeuvre de certaines activités de pleine nature (escalade, canoë…) mais également par une certaine méfiance des enseignants à l’égard de pratiques véhiculant des valeurs parfois en contradiction avec le cadre scolaire (aspect consumériste des pratiques d’entretien…)

Nous avons vu dans cette deuxième partie que les instructions officielles pouvaient, en proposant une diversification des activités prendre en compte l’évolution des pratiques de loisir se caractérisant pas une profonde modification de l’espace des sports. Toutefois, cette prise en compte peut-être perçue comme ségrégative et ne se retrouve pas dans les pratiques enseignantes qui restent centrées sur les sports de base. »

La dernière partie traite de la période de 1990 à nos jours. L’évolution des loisirs est tout d’abord examinée sur la base des travaux de Christian Pociello et d’Alain Loret. Un lien est ensuite établi avec les programmes d’ÉPS de 1996 et plus particulièrement l’importance que revêtent actuellement les objectifs de gestion de la vie adulte et d’entretien de soi. L’évolution des supports d’enseignement et le traitement didactique des activités de pleine nature sont alors discutés du point de vue des exigences de la norme scolaire et des valeurs véhiculées par les pratiques et par l’école. Suit une conclusion.

« Nous avons voulu mettre en évidence les différentes influences que le développement des loisirs, notamment des loisirs sportifs, a pu avoir sur les différents niveaux de l’ÉPS. Les instructions officielles tentent aussi dans une certaine mesure de s’adapter à l’évolution des loisirs avec toutefois un décalage temporel inévitable et une adaptation ségrégative. La diversification et la complexification des pratiques sportives de loisir mais aussi l’essor des loisirs en général se traduit par une évolution des objectifs de la discipline : orientation culturelle de 1967 et utilitaire en 1996 ; ou par de nouveaux contenus : nouveaux groupements en 1985, en 1998, ou encore en 2000. Les pratiques enseignantes apparaissent quant à elles nettement moins influençables par l’évolution des loisirs, les contenus proposés aux élèves n’évoluent que lentement. Nous avons envisagé différentes hypothèses explicatives à cette inertie. En nous appuyant sur l’article de J. Marsenach, « La dynamique évolutive des pratiques enseignantes », nous pouvons qualifier l’évolution des pratiques de « lente germination », le changement devant s’envisager non pas à l’échelle de quelques années mais plutôt d’une génération. Un autre facteur serait la difficulté de mettre en place ces nouvelles pratiques demandant parfois de l’espace, du matériel et du temps. Enfin, la représentation sociale des pratiques de loisirs, les valeurs auxquelles elles sont associées ont indéniablement constitué un obstacle à leur introduction. »

Le candidat consacre la dernière partie de sa conclusion aux perspectives ouvertes par les textes régissant aujourd’hui l’enseignement de l’éducation physique et sportive, plus particulièrement au regard du groupement des activités physiques d’entretien et des finalités liées à la santé, au bien-être et à la gestion de la vie physique adulte.

Le jury tient à rappeler que les extraits présentés ci-dessus n’ont aucunement valeur de corrigé. Ils ont été retenus pour illustrer une possibilité parmi d’autres de construction d’une démonstration argumentée élaborée en réponse à la question du sujet.
Bibliographie

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Dumazedier Joffre, Vers une civilisation du loisir, Paris, Seuil, 1962.

Irlinger Pierre, Louveau Catherine et Métoudi Michèle, Les pratiques sportives des Français, Paris : INSEP, 1987.

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