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L’EVOLUTION DE LA POPULATION ACTIVE DEPUIS DEUX SIECLES EN FRANCE
● Une croissance irrégulière Voir Annexe 7 Depuis le début de la Révolution industrielle, la population active a eu tendance à augmenter mais avec des rythmes différents selon les périodes.
Au début du 19ème siècle, repérée dans les concepts actuels, la population active se serait élevée à 12,9 millions de personnes, dont près de 4,5 millions de femmes, soit un peu plus du tiers. Le nombre total d’actifs augmente durant tout le 19ème siècle, mais de moins en moins rapidement; proche de + O.6 % l’an vers 1800, le taux d’accroissement est inférieur à + 0,3% à l’aube du 20ème siècle. Toutefois, ce ralentissement est surtout le fait des hommes : la part des femmes dans la population active progresse à partir de 1850 pour atteindre 36 % à la veille de la Première Guerre mondiale. Le diagnostic habituel — l’offre de travail n’a commencé à croître en France qu’au début des années 1960, sous l’effet conjoint du baby-boom et de décollage de l’activité féminine salariée — n’est donc pas exact replacé dans le très long terme. Durant les années 1910-1960, il y eut un très long palier où la population active resta stable : en 1911, sur un territoire amputé de l’Alsace-Lorraine, le nombre d’actifs est même légèrement plus important que cinquante ans plus tard, en 1962. Par rapport à ce palier, la croissance des trente-cinq dernières années offre bien un contraste saisissant. Mais auparavant, durant tout le 19ème siècle, l’augmentation a également été sensible, faisant passer le nombre d’actifs de moins de 13 millions en 1806 à plus de 20 millions en 1911. À partir du début des années 1960, la population active progresse donc de nouveau fortement (+ 1 % par an durant les années 1960 et 1970) pour dépasser aujourd’hui 27,5 millions d’actifs (27,6 millions en 2007). Au 20ème siècle, l’importance relative des femmes dans la population active a d’abord reculé (36 % en 1911, 34 % en 1962), puis elle a véritablement décollé, atteignant 47,2 % en 2007. De fait, au cours des trente-cinq dernières années, le mouvement est net:
● Les facteurs explicatifs Au 19ème siècle et jusqu’à la Première Guerre mondiale, le nombre d’actifs augmente régulièrement, bien que de moins en moins vite à partir de 1850; l’augmentation comme son inflexion sont principalement imputables à des facteurs démographiques De 1910 à 1960-1965, la population active, malgré quelques fluctuations, est stable; l’incidence des taux d’activité (c’est-à-dire des comportements) est, durant ces cinquante années, négative. Depuis 1965, le nombre d’actifs augmente rapidement, renouant avec la tendance du 19ème siècle, et même la dépassant; en dépit de l’accroissement de l’activité féminine, l’effet des taux d’activité demeure négatif car la vie active se « raccourcit aux deux bouts »; la croissance du nombre d’actifs est donc, pour l’essentiel, due à l’incidence de l’évolution démographique. Indépendamment de ces variations de longue période, l’offre de travail dépend aussi de variations plus conjoncturelles. La situation du marché du travail et la demande de travail des entreprises incitent les ménages à offrir ou non leur travail. C’est ainsi qu’en période de récession, les chômeurs peuvent se décourager et les inactifs en âge de travailler peuvent ne pas présenter leur offre. La population active se restreint ou n’augmente pas autant que le permettrait la population en âge de travailler.
Cette baisse prévue de la population active peut-elle être une chance ou handicap pour l’emploi ? Penser que la baisse de la population active permettra, en termes constants, de libérer le même volume d’emplois ne correspond pas à la réalité des faits (tout comme les départs à la retraite remplacés à l’identique). La relation entre population active, emploi et chômage est complexe. Déjà, dans les années 60, la croissance de la population active n’a pas entraîné une montée du chômage et dans les années 70, la montée du chômage n’a pas ralenti la croissance de la population active. ![]() La croissance économique, elle, semble par contre au cœur de cette relation. Le chômage présente également une composante structurelle sur laquelle l’effectif de la population active ne peut pas jouer (rigidités salariales, faibles mobilités, inadéquations entre offre et demande, …). Ainsi, maintien du chômage et pénurie de main d’œuvre peuvent coexister même en période de baisse du nombre des actifs. De plus, l’impact du vieillissement de la population active sur la productivité est loin d’être évident car il n’est pas prouvé que la productivité aux âges jeunes soit plus élevée que celle aux âges élevés. De toute manière, les effets de la productivité sur l’emploi sont également ambigus. La baisse de la population active par accélération des départs à la retraite crée aussi des contraintes financières sur les actifs et les futurs actifs ce qui peut bloquer une reprise de la demande. Les entreprises comme les administrations ne remplacent pas non plus à l’identique les postes vacants. Donc, la baisse de la population active n’est pas une condition suffisante d’une reprise de l’emploi voire elle peut être un facteur de ralentissement économique et de limitation de l’emploi. Elle peut être aussi une des causes ou un des indicateurs de la baisse de la compétitivité et du dynamisme d’une nation.
● Salarisation et féminisation La salarisation Les salariés représentent 53 % des actifs en 1900, 62% en 1950 et 89,2 % en 2007, la part des non-salariés baisse donc de 47 % à environ 11 %, perdant plus des deux tiers de leurs effectifs. Le salariat naquit avec la révolution industrielle et ne cessa de se développer avec la disparition massive des exploitations agricoles au profit des entreprises industrielles ou de services et des administrations. En revanche, depuis la crise, un mouvement inverse s’opère : un nombre non négligeable de chômeurs créent leur propre entreprise, des statuts précaires semi-indépendants se développent pour favoriser l’adaptation de l’effectif au marché sans avoir à licencier (système des self employed fréquent au Royaume-Uni). La féminisation
La population active féminine française en 1900 était de 7 millions, aujourd’hui 13 millions. Cette multiplication par près de deux s’est surtout réalisée à partir de 1960.
La nouveauté pour les femmes n’est pas le travail mais l’emploi et en particulier l’emploi salarié. De plus, l’activité féminine s’est développée en période de croissance mais s’est aussi poursuivie après la rupture de croissance des années 1970 bien que le coût social soit élevé (chômage féminin plus élevé, salaires plus faibles, conditions de travail difficiles, sous-emploi avec les temps partiels subis, …). Cependant les conditions de travail et de rémunération sont encore loin d’être égalitaires entre les sexes.
La féminisation de la population active apparait comme une donnée structurelle. L’activité féminine permet :
Mais l’explication tient aussi à la structure du marché du travail. D’un côté les femmes occupent massivement les emplois « féminisés » des secteurs secondaires et surtout tertiaire; d’un autre côté, elles sont de plus en plus nombreuses à des niveaux de qualification et dans des professions ou elles étaient peu nombreuses. L’élévation du niveau de formation des femmes et les mutations socioculturelles constituent ainsi les facteurs explicatifs essentiels. ● Les mutations sectorielles Définitions Depuis les travaux de Colin Clark (1940) et, plus tard, ceux de Jean Fourastié (1949), on a coutume, pour résumer les changements structurels de la répartition des activités, de partager celles- ci en trois grands secteurs: le primaire, le secondaire et le tertiaire. Secteur d’activité : un secteur regroupe des entreprises de fabrication, de commerce ou de service qui ont la même activité principale (au regard de la nomenclature d’activité économique considérée). L’activité d’un secteur n’est donc pas tout à fait homogène et comprend des productions ou services secondaires qui relèveraient d’autres items de la nomenclature que celui du secteur considéré. Au contraire, une branche regroupe des unités de production homogènes.
donc surtout des activités qui transforment les produits bruts.
Le constat ![]() Le secteur primaire est caractérisé par un déclin continu. Si la baisse relative de ce secteur commença au début du 19ème siècle, la croissance de la population active agricole s’est poursuivie jusqu’aux années 1860. Mais depuis les années 1870, le secteur primaire ne regroupe plus la majorité absolue de l’effectif de la population active, même s’il resta le secteur le plus important jusqu’aux années 1920. La baisse absolue et relative du secteur primaire s’est accélérée après la Seconde Guerre mondiale. Au milieu du 19ème siècle, un actif sur deux était dans l’agriculture, aujourd’hui en France, les agriculteurs représentent moins de 3 % de la population active. Causes :
Le secteur secondaire a connu une évolution contrastée marquée par une croissance puis un ralentissement.
L’industrie employait 25 % des actifs en 1850, puis a vu sa part croître pendant la période fordiste pour atteindre près de 35 % en 1975 et ensuite connaître une chute irréversible de ses effectifs et représenter aujourd’hui un quart des actifs. Enfin, la croissance du secteur tertiaire fut ininterrompue.
C’est le secteur tertiaire qui accueille aujourd’hui le plus d’actifs (3 actifs sur 4). Cependant, les activités tertiaires étaient déjà présentes lors de l’industrialisation (27 % des actifs en 1850) mais il est certain que le mouvement de tertiarisation des économies s’est produit à partir de 1960. Afin de comprendre l’irrésistible montée des activités de service, il faut tenir compte de la croissance de la demande et des faibles gains de productivité. Pour des auteurs comme C. Clark (« Les conditions du progrès technique » 1960) ou encore J. Fourastié (« Le grand espoir du XXème siècle » 1949), ces évolutions sectorielles sont le signe du développement économique car ils sont induits par l’intégration de progrès technique entraînant des effets de déversements sectoriels d’emplois. ●L’évolution de la structure par âge de la PA La composition par âges a aussi beaucoup changé. ![]() Les taux d’activité aux âges jeunes et élevés se sont fortement abaissés. ![]() Source : Premier rapport du conseil d’orientation des finances publiques, février 2007
Ainsi, s’opère une concentration de l’activité sur une tranche d’âge réduite entre 25 et 55 ans. Exercice Les taux d’activité par âge ont aussi une influence sur le niveau de la population active. Pour le comprendre, prenons un exemple : Soit une population de 20 000 000 de personnes en âge de travailler. La moitié ont moins de 40 ans, l’autre moitié ont plus de 40 ans. Le taux d’activité moins de 40 ans est de 80 %, celui des plus de 40 ans est de 50%. Question 1 : quel est le nombre total d’actifs ? Réponse : Imaginons maintenant que le taux d’activité des moins de 40 ans reste le même, mais que le taux d’activité des plus de 40 ans passe à 40 %. Question 2 : quel est à présent le nombre total d’actifs ? Réponse : on voit bien que le taux d’activité par âge influence le niveau de la population active. Ce chapitre permet de révéler les difficultés de l’analyse économique et historique. Il rappelle que les activités économiques et sociales s’inscrivent dans un cadre, qu’elles ne se déroulent pas dans un vide économique et social, mais dans un environnement, caractérisé par des institutions particulières. Le principe qui conduit à parler et à distinguer des faits économiques, des faits sociologiques, etc., constitue une catégorisation, c’est-à-dire une démarche scientifique. Or, ce travail de catégorisation révèle une part d’arbitraire et de conventions : il en va ainsi de la définition de la production de l’activité, de l’emploi, etc. |