3 ) Le mouvement humaniste a ) Carl Rogers Psychotérapeute et psychanalyste, il a travaillé à l'écart des grands centres urbains et de grands mouvements d'idée, ce qui lui a permis une certain indépendance d'esprit. C'est de son expérience clinique (!) qu'il a tiré toutes ses théories sur le travail.
Pour lui , l'individu a d'abord une stratégie en matière de développement personnel, et toute sa vie est orientée vers un but. C'est cette grille de lecture-là qui serait la seule pertinente pour comprendre les phénomène humains au travail. "L'homme est devenir", plein de potentiel, non-figé, et il n'est pas qu'une composante d'un groupe.
La notion de devenir est iconoclaste pour un psychanalyste. Rogers s'oppose au principes de répétition freudien et lacanien ; pour lui, tout n'est pas joué dès l'enfance, on ne rejoue pas toute sa vie sa place d'enfant.
S'il faut résumer son apport en une phrase : "tout individu est animé d'une tendance à développer toutes ses potentialités de manière à favoriser sa conservation et son développement." Cela correspond à une psychologie et une philosophie très US (recherche de la perfection, potentiel...) et une idéologie positive, optimiste. Elle s'articule en 5 points :
L'autonomie : les objectifs sont personnels, donc déterminés par l'histoire de chacun. Chaque individu a ses zones d'autonomie, qui ne peut être définie de l'extérieur. Ce qui compte pour un individu, c'est le degré de liberté qu'il ressent, sa capacité à décideer de sa vie. La plainte tourne autour du manque d'autonomie, du locus of control (càd du sentiment de peser dans ce qui vous arrive). Les symptômes ne sont pas primordiaux. La thérapie rogerienne propose de profiter de ces moments d'autonomie (savoir les repérer et les développer : activité artistique, intellectuelle...)
L'estime de soi : Roger voit dans l'école une machine à instaurer de la dépendance et à brimer l'estime de soi des individus. Plutôt que d'actualiser les potentiels des individus, elle vise à gommer les différences. Il y a d'ailleurs toujours un débat possible sur le rôle de l'école : transmettre des connaissances ou favoriser le développement de la singularité de l'individu. La philosophie positive respecte l'intégrité de l'individu et ne le découpe pas en morceaux.
La croissance continue : on se perçoit en perpétuel changement.
Autoactualisation : cela consiste à se mettre soi-même en acte, en scène. Dans le psychisme, il y aurait une instance qui verrait le sujet parler et bouger, et qui le contrôlerait et jugerait, dans l'optique d'un mieux. C'est important pour Roger car ce serait un bon outil de travail. Il a utilisé le jeu de rôle, le psychodrame, pour faire prendre conscience au sujet que son rôle social est aussi un jeu. Cela renforcerait son estime de soi et son sentiment de contrôle. Quelque soit le jeu, il est contrôlable, il n'y a donc pas de fatalité.
L'autorégulation : il y aurait un mécanisme d'ajustement permanent à l'environnement. Une pathologie ou une souffrance se développerait quand l'autorégulation se ferait trop souvent au profit de l'extérieur.
Son approche de l'homme au travail Pour écouter les individus, il soutient qu'il faut les entendre mais aussi les regarder (lgg du corps) ; il y a des symptômes physiques du stress (insomnie, migraine, troubles digestifs..).
Roger est contre les thérapies médicamenteuses (!!). Il est pour le repérage des peurs de l'individu, des symptômes. Il n'en cherche cependant pas le sens de manière symbolique : le corps se défend, mais sans signification. Il a une approche organique des choses. Pour lui, ce qui compte, ce n'est pas la répétition mais le changement. Il va valoriser les dimensions nouvelles qui apparaissent dans les fonctionnement gestuels, de la parole... des individus. L'objectif est de faire confiance à son corps, d'établir une relation de confiance entre corps et psychisme : c'est sur cette confiance que peuvent croître les potentialités. C'est une théorie qui est très connotée, datée (60, 70).
L'approche rogerienne ne met en cause que l'individu. C'est une psychologie du sujet, une approche holistique du sujet.
Elle a été très critiquée :
par les psyK européens, pour qui elle n'expliquait pas les comportements d'autodestruction et aberrants. Il y avait aussi une suspicion du fait de sa nationalité, en rapport avec la doctrine économique, politique et sociale des US.
On peut le taxer de rousseauisme : "l'homme serait naturellement bon"...
Cependant, Roger n'avait pas d'ambition d'explication globale du monde contrairement à Freud, mais menait une action de terrain. Il a une certaine légitimité dans le monde du travail. Les lois Auroux avaient quelque chose de rogerien. Il n'est cependant pas très présent au niveau du management, mais plus dans les technique d'intervention des psychologues.
Pour toute une génération, cette vision de l'homme, du travail et du monde perdure? Elle est donc importante pour comprendre les vieux cons. Quelques auteurs ont repris cette vision.
b ) Mc Gregor C'est un professeur de psychologie industrielle. Il a recherché les théories implicites de management dans la direction, et not. les présupposés sur l'homme. Ses instruments de travail et ses objets étudiés sont très divers : outils de communication, types, mots utilisés pour désigner les choses... Son approche se fait en termes de modèle d'organisation (ce qui n'est pas très spécifique). Il est connu pour ses assomptions (bible de la PT) :
Les êtres humains sont par nature actifs et aiment la difficulté, le défi.
L'humain est fier de réussir et éprouve du plaisir à changer.
Au travail, il continue à mûrir et à s'épanouir, si son activité le lui permet.
Les individus sont capables de décider, de réfléchir, si on leur donne les moyens de le faire.
Les salariés ont besoin de confiance et non de défiance.
Les individus au travail cherchent à donner un sens à leur vie, car ils ont de leur une perception totale. L'individu est dans un perspective unifiée de son existence.
Ce sont des messages. McGregor incite à une révolution dans le monde de l'entreprise. Il s'oppose à certaines habitudes, et not. au système de sanction. Ce qui doit motiver, c'est la conviction que le travail peut être un moyen d'aépanouissement.
Il va à l'encontre de l'hyperspécialisation et préconise des fonctions plus polyvalentes.
Il remet en cause la hiérarchie. L'autorité n'est plus fondée sur un e spécialisation technique, mais sur des capacités à repérer les capacités, les potentiels des individus (ce qui est approximativement une recommandation toujours actuelle dans le management). Via des bilans de compétence, il va chercher à détecter les compétences, les potentiels. Le pb est de savoir comment.
Les éditions du centre de psychologie appliquée ont mis au point un outil pour "détecter les potentialités", qui proposait à un ancien salarié de devenir botaniste parce qu'il s'occupait de son jardin. Ce n'était en fait qu'un test classique. Les tests de détections sont en fait souvent de simples techniques visant à détecter les hobbies, etc.
Cette problématique a presque été inventée par les rogeriens. Aujourd'hui, on n'a pas de technique permettant d'évaluer, de prédire le plaisir éprouvé dans le futur travail.
(opposition recrutement / orientation)
La stratégie des projets pro est une manière empirique, pragmatique de mettre à l'épreuve la motivation. MacGregor s'est attaché à une analyse du discours de l'entreprise et de son idéologie. C'est une approche structurelle de l'entreprise ; il l'explique et la modifie...
c ) Marlow
Il s'intéresse aux motivations, et va élaborer un schéma encore très utilisé aujourd'hui (bien qu'il soit sans grand intérêt) : la pyramide de besoins. Du moins important au plus vital, on a :
objectif personnel élevé,
estime de soi,
besoins sociaux : motivation en termes d'échanges d'interaction, de participation aux activités sociales. C'est celle que satisfait le fait d'avoir un emploi.
Besoin de constance,
besoins physiologiques (subsistance).
Pour Marlow, chaque échelon inférieur doit être assuré pour que le supérieur puisse être rempli. Pas d'estime de soi sans contacts sociaux, etc. L'addition est itérative.
Les psy du développement ont repris ce modèle pour l'enfant... Il pose au moins un pb : l'exemple d'artistes clochardisés qui continuent à peindre plutôt que de satisfaire leurs besoins primaires. Intérêt et pertinence ?? Elle n'a aucune justification théorique.
d ) Hertzberg
C'est un psychologue célèbre pour une étude longue et importante sur la motivation et la satisfaction au travail d'ingénieurs US. Celle-ci a été à la base de beaucoup de travaux et a fourni des outils pour tester cette satisfaction. Hertzberg a répertorié 10 facteurs principaux de satisfaction :
Subjectifs :
représentation de soi,
attrait du travail
reconnaissance sociale...
Environnementaux :
politique de rémunération,
cadre et conditions de travail,
possibilités de progression, d'avancement...
Ce n'est pas une révolution, mais cela présente tout de même l'intérêt de permettre de mesurer la satisfaction au travail, en ne tenant pas compte que de la qualité objective des conditions de travail, qui ne sont plus les seules à influer la productivité. Ce qui compte, c'est la perception des individus. (Aux Pays-Bas, l'incapacité à trouver de la satisfaction au travail est considérée comme un handicap.)
Cela pose le pb déontologique d'en venir à ne s'occuper que de la perception, au détriment des éléments objectifs.
Hertzberg est à l'origine de l'enrichissement des tâches. Cela permet au travailleur d'avoir une vision plus globale de la tâche, et d'avoir plus de responsabilités. Il n'est cependant pas évident que chacun cherche à en assumer !
Le terme de responsabilité est équivoque et recouvre deux acceptions : c'est aussi une charge, une contrainte supplémentaire, "vendue" comme une chance grâce à H, sans forcément de rétribution, puisqu'elle elle est une "récompense". Cela explique qu'une augmentation des responsabilité, dans le cadre de l'enrichissement des tâches rencontre généralement peu de contestation. Du fait d'un pb sémantique, et de l'idéologie régnante, refuser des responsabilités est plutôt interprété comme un manque d'ambition (!) ou de la mauvaise volonté à s'intégrer, et non un signe d'affirmation ou d'intelligence.
Le second apport de H a été de créer un espace de décision spécifique à chaque niveau hiérarchique (et de casser l'opposition penseurs / faiseurs). Par ex., en cas de modification du poste de travail, on informe et questionne le personnel. Il n'y a cependant pas de réel processus de co-conception....?????????????
Son troisième apport a été d'introduire la flexibilité dans le temps et l'espace de travail, pour laquelle il aura été un précurseur. La notion de flexibilité du temps de travail est une idée qui "sonne bien", qui s'oppose à une notion de rigidité du travail. C'est une souplesse qui permet une diminution de la monotonie, de la répétitivité.
Son 4e apport concerne la notion de groupe autonome. Il a repris les travaux sur le dynamique des groupes et l'a analysée en termes de bonheur individuel. Des groupes autonomes ont été mis en application dans les années 70 en Suède chez Volvo. L'assignation d'objectifs se faisait directement à un groupe d'individus, qu'on laissait s'auto-organiser. Cela a augmenté la compétitivité inter-groupe et a rendu les groupes plus performants (Lewin) et plus épanouissants (Hertzberg).
On peut mettre cela en rapport avec l'enrichissement de la tâche : il y a création de nouvelles fonctions, organisation et gestion du groupe. Cela requiert des compétences managériales, cela alourdit la tâche de travaux différents voire supérieurs. Les phénomènes de groupes induisent des conséquences :
positives : le sentiment d'appartenance.
négatives :
perte d'identité,
boucs émissaires,
conformisme,
dépendance des individus envers le groupe (ce qui peut provoquer des situations de détresse en cas de départ).
e ) Argirys C'est un psychologue qui a cherché à caractériser l' entreprise performante. Quels en sont les points communs ?
Flexibilité : capacité à s'adapter à son environnement (ce qui passe par la flexibilité des individus qui la compose).
Bonne capacité à décrire son fonctionnement interne : savoir repérer son système d'organisation (
la manière dont circule l'info,
fonctionnement de l'autorité et du pouvoir,
gestion des ressources humaines : suivi des carrières, définition des tâches, organisation interne,
formation, gestion des compétences : pour Argyris, c'est un facteur important de compétitivité ; c'est un capital à gérer et à faire fructifier. On le visualise par l'existence de plans de formation.
Son parcours est plus freudien que celui de Rogers. Il utilise les concepts de pulsion de vie, en rapport avec la volonté de changer, d'avancer, et celui de la pulsion de mort pour la "répétition". C'est l'aspect le plus daté de son travail. Il a également introduit le concept de compétences relationnelles.
Si on ne peut reprocher à quelqu'un son manque d'aptitude, on peut lui reprocher son manque de compétence, celle-ci se développent, s'acquérant.
C'est un savoir-faire quasi technique à l'échange d'information, qu'il soit hiérarchique ou non (on le dit alors fonctionnel).
Conclusion du chapitre "mouvement RH"
C'est une étape importante dans l'histoire des idées en Occident et dans la PT. Il correspond à l'arrivée du niveau individuel comme niveau d'analyse. Il est en relation avec le mouvement d'idées des années 60 et la prospérité économique.
Il est néanmoins à l'origine d'une évolution plus critiquable : c'est une évolution du niveau de responsabilité, qui requiert de nouveaux types d'exigences, en écho aux visions rogériennes de l'homme au travail.
L'entreprise a commencé à se soucier du bien-être psychologique de ses cadres, et à fait irruption dans la sphère émotionnelle et sociale. Ceci a pris un dimension culturelle. IBM, par ex. a établi un centre de recherche à Montpellier dans les 70ies : il a créé des drèches, logements, organisés des vacances, bref tout fait pour favoriser (organiser) le vie de ses salariés. Aux US, c'est un métier que d'organiser la vie des salariés.
La contrepartie de la diminution de charge incombant aux salariés est la dépendance accrue, qui est une conséquence inattendue (mais pas forcément mal accueillie). (Le dénigrement de son E est devenu en France, par jurisprudence, un péché). Cela ne correspond pas à ce que voulait provoquer Rogers. Un autre conséquence néfaste est la manipulation possible de la qualité perçue plutôt que celle de la réalité. C'est le mouvement de qualité totale : ce qui compte, c'est la perception qu'ont les gens du produit.
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