Littérature québécoise








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Claude Roux

Combat royal



BeQ

Claude Roux


Diane la belle aventurière # 102

Combat royal
roman


La Bibliothèque électronique du Québec

Collection Littérature québécoise

Volume 518 : version 1.0

Combat royal
Collection Diane la belle aventurière

gracieuseté de Jean Layette

http ://www.editions-police-journal.besaba.com/

I


Ben Laurie se tenait devant Diane, énorme et immobile, rappelant quelque statue de Bacchus avec une flamme pétillante dans le fond de ses prunelles bleues.

Ce qu’il venait de proposer à la jeune femme, il le savait, était irrégulier, spécial, étrange et même dangereux. Mais diable ! Quand on veut faire un coup d’argent, il n’y a pas quatre moyens et l’argent fait vite l’est toujours par des moyens peu ordinaires. Pourquoi faire de l’argent ? C’était une manie chez Laurie car il en avait à jeter par les fenêtre.

– Je ne sais pas si je devrais accepter, mon oncle Minou, fît Diane songeuse, après tout il peut y avoir de la casse et je ne tiens pas du tout à me faire aplatir le museau par un mi-lourd.

Ben Laurie, en toute vérité, n’était pas l’oncle de la jeune femme. Il en prenait le titre avec affection car il s’était institué son protecteur depuis la mort de son père. Curieusement, cette fois, il n’agissait pas du tout en protecteur mais bien plus en comparse qui refile un travail délicat à un associé inférieur.

– De la casse ! De la casse ! s’exclama-t-il en agitant son corps grassouillet. Qu’est-ce que tu chantes là donc Diane ! Il y a de la casse à faire les doux yeux à un boxeur ? Je te jure que Rocky est très gentil, le plus gentil des garçons et que tu auras un temps fou avec lui.

Diane hocha la tête.

– Vous me dites également qu’il y a une amie qui fait l’impossible pour qu’il relâche l’entraînement, pour qu’il perde le combat à venir ; qu’il a été approché par des gamblers qui misent sur sa défaite et qu’il a accepté ou presque de se laisser battre.

– C’est un garçon magnifique, Diane. Il devrait battre Morelli les yeux fermés. Pense au bien que tu lui feras si tu le convaincs à se battre honnêtement et à expédier son adversaire entre les câbles avant la fin du match.

– Quels sont vos intérêts dans cette affaire, mon oncle ?

–Mais je n’en ai aucun ! fit Laurie en agitant ses grosses mains velues. Si je te demande ça, c’est parce que je trouve le garçon sympathique et que...

– Mon oncle Minou, fit Diane sur un ton de reproche.

– Mais je te jure, Diane ! Voyons tu ne crois pas que...

– Mon oncle Minou !.....

Laurie s’arrêta, se gratta l’occiput puis après un moment de combat intérieur, lequel la meilleure partie de lui-même sembla perdre, il avoua :

– Je l’ai acheté, il y a trois mois.

– Rocky !

– Oui. Je l’ai acheté d’un petit promoteur à la manque qui l’aurait détruit en moins de deux ans. J’ai payé cher. Je vois une chance de rentrer dans mon argent et d’envoyer Rocky se battre en Europe et voilà qu’il tombe amoureux de cette putain de Bella et qu’il entre en connivence avec la bande des Donato pour se laisser coucher par un boxeur de troisième ordre. Qu’est-ce que tu veux Diane, on se défend comme on peut ? C’est une femme qui a mis Rocky à l’envers alors je crois que ça va prendre une femme pour le remettre sur le piton.

– Comment qu’il s’appelle exactement ?

– Roger Compte. Il s’entraîne cet après-midi, pourquoi ne viendrais-tu pas le voir ?

– Comment vous l’avez payé au juste ?

– Trente-cinq mille !

Laurie avait soufflé le prix comme pour lui donner moins d’importance. Il s’attendait à être proprement morigéné par Diane et la chose ne manqua pas. En entendant son oncle dire la somme fabuleuse, Diane s’était écriée :

– Trente-cinq mille ! Mais c’est de la folie pure ! Y a pas un boxeur canadien qui vaut ça !

– Tu veux dire que nos gars sont moins bons que les gars d’ailleurs ?

– Mais non, je veux dire qu’ici au Canada, la boxe est moins populaire qu’ailleurs et que partant les recettes sont moins importantes et qu’il n’y a pas du tout raison de payer un prix aussi fou pour faire battre un gars qui ne rentrera dans cet argent qu’après cinq ans, s’il ne se fait pas démolir ou s’il ne se « tanne » pas avant. Mon oncle, vous êtes tout un homme d’affaire, vous !

Cela était drôle. Laurie, millionnaire, était le plus curieux des financiers qui soient. Toutes ses combines frisaient la folie. Néanmoins, il arrivait toujours à bon port, le drapeau claquant, poussé par le vent du succès. C’était à se demander si l’original Laurie n’avait pas un petit dieu personnel qui s’occupait uniquement de remettre à flot ses entreprises chambranlantes. Pour cette fois, le dieu était absent et Diane devait faire les frais du sauvetage.

– Alors... demanda Laurie avec un peu d’inquiétude en s’approchant de l’aventurière, tu viens le voir Rocky.

– Ah ! Écoutez ! Si j’accepte c’est pour vous mon oncle, uniquement pour vous. Je me fiche pas mal de ce Rocky qui n’a même pas le cœur de se battre honnêtement. Laissez-moi seule un peu et j’irai vous rejoindre au gym.

– Parfait, parfait ! fit Ben Laurie en se pourléchant les babines. J’étais sûr que tu me sortirais de là, Diane.

– Comment vous sortir de là ! dit Diane en sursautant. Qu’est-ce qui vous dit que votre boxeur me jettera un coup d’œil ; encore plus, qu’il acceptera d’abandonner sa « blonde » et de rentrer dans le droit chemin, si on peut dire.

– Je suis sûr que tu pourras le fléchir, Diane, j’en suis positif.

– Et pour ça, il faudra peut-être que je me laisse palper dans le fond d’une voiture par un gars qui pue l’alcool à friction. Je vous dis, mon oncle, comme protecteur, vous, vous êtes tout là !

– Donc à cet après-midi trois heures ?

– À cet après-midi, trois heures.

Laurie sortit précipitamment, heureux d’en finir et Diane resta dans son fauteuil, songeuse et dégoûtée.

Voilà qui venait contrarier ses plans d’une façon absolue. Depuis qu’elle était revenue de New-York, elle essayait de faire la paix avec Michel et elle n’avait même pas réussi à le rejoindre. Elle pensa au jeune homme, se sentit envahir par un sentiment d’angoisse puis porta ses yeux sur l’appareil du téléphone qui, jusqu’à ce jour, avait été incapable de lui faire rejoindre le garçon.

Michel lui avait dit pourtant : « Si tu vas à New-York avec le lieutenant Pascal, je ne voudrai plus de toi à ton retour. » Diane avait pris la menace à la légère.

– Il m’aime, s’était-elle dit, alors, tout peut s’arranger. Pourquoi que ça ne s’arrangerait pas ?

Mais elle songea à New-York, à l’affaire extraordinaire à laquelle elle avait été mêlée dans la grande ville, aux lèvres dures et brûlantes du policier qui avait empli son corps d’un trouble qui l’ébranlait encore.

Le lieutenant l’aimait. Aimait-elle le lieutenant ? Des fois, elle allait se demander si elle avait le cœur bien accroché car le fait qu’elle ne pouvait savoir, réellement savoir, lequel des deux hommes, Michel ou Yvan, elle préférait, la laissa craintive et sceptique quant à sa capacité d’éprouver l’amour.

Et il y avait Fabien, le comte Fabien de Mortbois qui était retourné aux Indes remplir son destin.

Aimait-elle le comte ?

Devant chaque garçon, elle demeurait perplexe, incapable de trouver l’émotion sincère qui lui révélerait un amour.

Elle soupira, marcha jusqu’au téléphone et composa le numéro du journal La Trompette, Ce fut Louise, la secrétaire de Michel, qui lui répondit :

– Michel est là ?

– Je regrette mademoiselle Roy, fit la voix légère de la jeune fille, mais monsieur Dupuis est en conférence. Je ferai votre message.

– Il en a pour longtemps ?

– Je ne saurais dire...

– Dites-lui donc de passer chez moi lorsqu’il sera libre.

– C’est que... monsieur Dupuis a un rendez-vous très urgent et...

– Louise....

– Oui, mademoiselle Roy, fit la jeune fille sur le même ton plaisant.

– Louise, quand je vous demande de dire à Michel de me téléphoner, êtes-vous bien sûre que vous n’oubliez pas ?

– Je n’ai jamais oublié, répondit la jeune fille sans s’émouvoir.

– Qu’est-ce qu’il fait Michel ce soir ? Il est en devoir ?

– Non, mademoiselle,

– Alors dites-lui que je passerai chez lui ?

Il y eut une pause puis Louise dit :

– Je crois que ce serait bien inutile, mademoiselle Roy.

– Pourquoi dites-vous ça ?

– Parce que Michel m’amène au cinéma en sortant du bureau.

La main de Diane se crispa sur l’appareil. Un goût d’insulter la fille lui fit entrouvrir les lèvres mais elle ne trouva qu’à répondre :

– Alors... c’est comme ça, Louise ?

– Je regrette, mademoiselle Diane, mais oui... Michel est gentil, je serais bête de lui faire de la peine.

– Comment de lui faire de la peine ?

– Il a un brillant avenir ; il a décidé d’être sérieux....

– Louise, fit Diane haletante, savez-vous que vous parlez presque de mariage quand vous dites ce que vous dites ?

– Je le sais, mademoiselle Roy.

– Bon... alors ne faites pas ma commission, voulez-vous ?

– Oh ! Je la ferai comme les autres. Toutefois laissez-moi vous faire remarquer qu’elle ne sera pas plus fructueuse.

– Vous êtes... d’une gentillesse...

– Je sais....

Diane raccrocha avec précaution. Des larmes montèrent à ses yeux. Elle se dit la rage au cœur :

– Bah ! Un de perdu, dix de retrouvés.

Mais à quoi cela servirait-il d’en retrouver mille si Michel, Michel, était l’élu.

Elle pénétra dans sa chambre, se choisit une robe « sexy » au possible pour aller à son rendez-vous avec le boxeur Rocky.
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