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Poétique et Herméneutique musicale Analyses Musicales Musicologie La poétique est la discipline qui s'intéresse à la façon dont l'oeuvre produit un discours. Si l'oeuvre musicale signifie, elle signifie quelle qu'elle soit, qu'il y ait du texte ou non. Il faut ainsi partir d'une oeuvre littéraire, pour montrer que les procédés d'analyse du discours propre à la littérature sont aussi valables en peinture, en sculpture, qu'en musique. Peintures étudiées Le rêve d'Ursule - Vittore Carpaccio St. Augustin dans son cabinet La Sainte conversation Sculpture étudiée Le Tombeau d'Ilaria del Carretto - Jacopo della Quercia Musique étudiée Ave Regina Celorum - Marchetto da Padova Genette fait la différence entre ce qu'il appelle "la situation réelle de production d'une oeuvre" et "le contenu fictionnel de cette oeuvre" (le discours qu'elle tient). La fiction interne à une oeuvre est appelée la diégèse (définit par Platon au préalable ; Dia : à travers - Gèse : agir --> L'action qui est racontée dans une oeuvre de fiction). En revanche, la situation dans laquelle on a produit cette oeuvre est appelée l'extradiégèse. Parfois, au lieu de dire Diégèse, on peut employer intradiégèse. Par exemple, quand Homère dans l'Iliade met en scène Ulysse qui raconte ses aventures est de l'intradiégèse, le fictionnel. L'extradiégèse s'applique à Homère qui écrit le récit, le factuel. Le lien présent entre les deux concepts, lorsque l'intradiégèse renvoie à l'extradiégèse est appelée la métalepse. Par exemple, dans certaines oeuvres, l'on fait difficilement la différence entre le narrateur fictif et l'auteur du roman (À la recherche du temps perdu - M. Proust. Le lien entre les deux entités est de l'ordre de la métalespse. Deux catégories peuvent se dégager : la métalepse référentielle, qui unit l'intradiégèse à l'extradiégèse, de la fiction au factuel ; la métalepse fictionnelle, qui est le lien entre un niveau de discours et un autre à l'intérieur de la fiction, un moment de la fiction à un moment de la fiction. Par exemple, si dans une oeuvre musicale religieuse on emploie la nom de Marie (au niveau de la terre), et le terme reine des cieux (au niveau du ciel), il y a une différence de niveau de discours bien qu'il s'agisse du même personnage. Si le renvoi et le lien entre les niveau est absent, il n'y a pas de cohérence et d'unité de l'oeuvre d'un point de vue du discours. Dans le premier cas de la métalepse, il s'agit de l'aptitude de l'oeuvre musicale à parler de la réalité. Le second cas ne parle pas du renvoi à la réalité, du réalisme de la fiction, mais traite de la cohérence de la fiction, de la logique tenu par le discours de la fiction de l'oeuvre artistique. Dans cette métalespse fictionnelle, il y a différents niveaux à l'intérieur de la fiction. Dans les Mille et une nuits, l'auteur a mis en place le personnage de Scheherazade. Dans une des histoires, Simbad le Marin raconte l'histoire de ses voyages, dans laquelle il a rencontré quelqu'un qui lui a raconté une histoire, tandis que l'auteur lui même raconte l'histoire de Scheherazade. Le niveau de Scheherazade est le premier diégétique, l'histoire de Simbad est le deuxième niveau diégétique. Les niveaux peuvent être en tiroir ou indépendant (L'Orfeo de Monteverdi : La musica qui raconte l'histoire de l'Orfeo, qui met en place la Messagère qui raconte l'histoire de l'histoire même ; il n'est pas question d'intradiégèse puisque le niveau de la messagère découle malgré tout du niveau de la musica, et qu'il permet la cohérence du discours ainsi énoncé). Il se créé ainsi une topographie des agencements du discours. Genette, dans Fiction et diction (1986, Seuil), introduit une distinction entre des régimes de discours. Le discours de l'histoire, tout en étant un récit, vise à être de nature factuelle. Le discours romanesque est un discours fictionnel. Baudelaire écrit des poèmes de nature fictionnel, tandis qu'un essai sur ses poèmes est de nature factuelle. Mais on est en droit de se dire qu'il n'existe jamais que l'un ou que l'autre ; un discours factuel a toujours une part fictionnelle, et vice-versa. Mais dans chaque cas, la proportion n'est pas la même. Ce n'est pas forcément la visée qui est factuelle et les modalités du récit qui sont fictionnelles ; en musique, la visée est fictionnelle tandis que les modalités sont factuelles. ------------------------------------------------------------------------------------------------------- Il faut faire une distinction entre le récit et le discours. Le récit est unique, car il représente le texte. Mais les discours que le récit unique tient sont multiples. Ces discours sont des niveaux diégétiques différents. --> ANALYSE DU TABLEAU "Le Rêve d'Ursule" - Carpaccio Ce tableau fait partie d'un cycle de 8 tableaux retraçant la vie d'Ursule peints dans les années 1490-1495 pour le couvent des Ursulines de Venise, où l'on éduquait les jeunes filles de bonne famille. Il y a avait une salle dans laquelle se donnait les cours d'éducation religieuse. Ursule est la file d'un roi de Bretagne. Son père décide de la marier à un roi Païen d'Europe centrale. Ursule accepte de se marier à la condition que son futur époux se convertisse à la religion chrétienne, après un mariage avec le Pape. Mais en arrivant dans les terres du Roi Païen, la suite est tuée, Ursule violée et démembrée. La scène du Tableau où Ursule dort est à la moitié du cycle. La scène se passe dans la chambre d'Ursule, dans un décor typiquement de la fin du XVe siècle, mis à part le personnage à droite. La scène raconte le rêve d'Ursule qui met en scène un ange arrivant pour lui annoncer son martyr. Le peintre divise le tableau en deux parties exactes, symbolisé par une ligne qui prend la poutre du lit à baldaquin ; Ursule dormant d'un côté dans un lit rouge, couleur du sang, du martyr, de la terre / l'Ange d'un autre, de couleur bleu, rappelant le Ciel. Ursule allongée à l'horizontale évoque la terre, tandis que l'ange est en position verticale, éclairé dans l'au-delà du tableau, en lien entre la terre et le ciel, qui est la fonction même de l'ange. La fenêtre en arrière plan est coupée en deux par la ligne de séparation, ce qui donne une fenêtre moitié terre, avec une plante non fleurie (myrte: symbole des amours violentes) avec un col fermé, tandis que la partie fenêtre côté ange est une plante fleurie (oeillets, symbole de fécondité et prospérité : annonce que son martyr lui permettra d'accéder au ciel) tenu par un tuteur en forme de croix Dans le dessin préparatoire du peintre, il y avait deux fenêtres, et le lit n'était qu'à une place, au milieu de la pièce. On remarque que le peintre a enlevé le chat (symbole du mal) et a gardé le chien, symbole de fidélité pour montrer la foi d'Ursule, et non plus relater du bien et du mal. Dans le dessin final, Ursule est dans un lit à deux places dont elle n'occupe que la partie droite, symbole du mariage non consommé et virginité. ------------------------------------------------------------------------------------------------------- La source de la lumière qui éclaire l'ange vient de l'extérieur du tableau ; ce n'est pas dans le récit, car elle est hors cadre. Cette lumière qui éclaire la couronne d'Ursule se retrouve dans le plafond matérialisée par la fenêtre à droite. Cet élément qui est en dehors de l'énoncé est déterminant pour la compréhension du récit. C'est une autre sorte d'extradiégèse, car nous sommes hors du récit, mais pas hors de l'histoire. Cette lumière ne renvoie pas en effet au factuel, mais à un élément de l'histoire qui n'est pas dans le récit. Ce ne peut pas être de l'intradiégèse fictionnelle puisque la lumière n'est pas à l'intérieur du cadre de l'oeuvre. Cette lumière est un mixte entre extra et intradiégèse. Il faut se demander pourquoi les deux sources de lumières proviennent du sol et du plafond. Le plafond à caisson possède la même valeur qu'une voute étoilée qui raconte les constellations et la course des planètes, et renvoie aux mêmes lois abstraites et de raison géométriques de la création du Monde par Dieu. Ce qui est hors cadre (la lumière) est la cause qui vient éclairer cette géométrie. C'est la trace du Dieu créateur qui éclaire sa création. La lumière du sol, éclairant l'ange et la couronne d'Ursule ainsi que son chien (qui renvoie à la fidélité, donc à la foi) met en avant les valeurs humaines spirituelles, éclairées par le Saint Esprit. Sur la table nappée comme le lit, on trouve un livre ouvert (le nouveau testament, aisé, que l'on lit à livre ouvert) et un livre fermée (l'ancien testament, difficilement lisible, qui raconte des dires incompréhensibles). Du côté d'Ursule, on voit trois plan. Ursule dans le lit au premier, au deuxième une chaire couleur du lit sur fond vert (symbole de l'espérance), et une image de dévotion sur fond blanc, au troisième une porte menant à une arrière salle. Dans l'arrière salle, il n'y a pas de mobilier, ce qui le fait devenir un lieu abstrait, éclairée par une troisième source de lumière surnaturelle à la même teinte que les deux précédentes. À mi-hauteur entre la terre et le ciel, le père et le Saint-Esprit, se trouve le fils. Cette pièce du fond symbolise l'Aula, pièce du jugement dernier, où Ursule sera canonisée. Le lit symbolise le Songe d'Ursule vivante, ainsi que son lit mortuaire au moment de son jugement. La porte de la pièce du fond possède l'inscription abrégée "Diva f. a. v. a. u. s. t. a." soit "Divina, fabula Ursula Sanctae", socle d'un personnage en sculpture au-dessus portant une outre, représentation des Dieux des sources et des fleuves. On trouve une seconde inscription "in fan ntia" sur le pompon du coussin où repose la tête d'Ursule. Sans le N en trop on peut lire "infantia" (enfance). Le fait que le mot soit brisé indique que l'enfance d'Ursule est brisée. Le pompon en forme de boule symbolise par la forme sphérique la perfection féminine. Derrière l'ange, on trouve tout un décor et tout un mobilier qui sont lourds de symbole. On voit un sablier dont le sable est entièrement écoulé, ce qui signifie que nous sommes après le temps qui s'écoule, le temps des corps, le temps de la vie. Après ce Tempus, à partir du jugement dernier, soit l'éternité, on trouve l'Aeternitas. Entre ces deux se trouve le temps de l'ange, le temps de la médiation entre les deux temps. Mais comment peut s'immiscer dans le temps de finitude le temps éternel? L'ange possède une palme à la main, qui est la célébration du martyr d'Ursule. On trouve derrière l'ange une esquisse de porte sur laquelle se trouve une seconde statue, indiquant le monde non montré derrière la porte, d'où provient la lumière artificielle. Elle est sur une sphère et porte un drapé antique. ------------------------------------------------------------------------------------------------------- En parallèle de l'isorythmie du Ténor du motet Ave Regina Celorum, qui réalise une dimension temporelle tripartite (temps de la terre, temps entre terre et ciel, temps du ciel), le tableau de Carpaccio possède à première vue une dimension temporelle bipartite, Tempus du côté d'Ursule, Aevum du côté de l'ange. L'éternité quant à elle est hors cadre, en dehors de la chambre et du tableau, qui éclaire l'ange (donnant d'ailleurs une ombre abstraite qui rappelle que l'ange n'a pas de corps matériel véritable). Ainsi, tout n'est pas dans le récit et l'énoncé de l'oeuvre. En revanche, il y a bel et bien des éléments de l'histoire hors de cet énoncé. Ursule semble déjà morte, la chaire de l'enseignement rouge représente une valeur, et enseigne la sainteté d'Ursule au Couvent des Ursulines où se trouve le tableau. L'oratoire peut très bien représenter Ursule, sur fond de lumière, qui sert à la prière de la Sainte, notamment par rapport à la couleur bleue qui se retrouve dans la représentation ainsi que sur le fronton du lit d'Ursule. Les teintes de lumière surnaturelles ne sont pas les mêmes. Les trois plans du tableau réfèrent à trois catégories de monde spirituelle. Le monde de la terre au premier plan, les valeurs humaines, comme intermédiaire entre terre et ciel, ainsi que le monde du ciel dans l'arrière salle. Le monde des valeurs sont matérialisé par des objets définit et une lumière naturelle, tandis que le monde du ciel est abstrait, sans objet, et avec une lumière surnaturelle. Dans le monde de l'Ange se trouve aussi trois lieux. Le premier est celui de l'idéalité de l'ange, qui se rapporte à la matérialité d'Ursule. Le second représente les objets qui s'opposent à ceux du côté d'Ursule. Le signe sémiologique est un signe qui par sa signification est limpide. Le signe herméneutique exige une exégèse pour être interprété, car l'on ne peut connaître leur sens limpidement. Le signe dit la façade, mais la façade cache le sens. La partie basse du placard est semi ouverte ; on peut voir le sens par les objets qu'il montre du côté de l'ange seulement. En parallèle, la façade du signe du placard fermé côté Ursule cache le sens, dont l'énoncé le dissimule. Il faut donc au-delà de l'énoncé chercher le sens ; ce plan est l'Aevum de l'Aevum. Dans le troisième plan on trouve un placard dont on voit les portes bien fermées et bien ouvertes. L'intérieur du placard s'ouvre sur de l'obscurité, sur un sens complètement obscur. Le monde du Ciel est un mystère, que l'on ne peut entrevoir. Il se confronte à l'arrière salle du jugement dernier, éclairé par le sens précis du jugement. Les fenêtres même sont divisées en trois section. La plante d'Ursule par le bas, qui représente la virginité et la fécondité d'Ursule (le col fermé) est sur fond de claie, qui obscurcie le Ciel. La plante en elle même se développe sur le Ciel bien visible. En haut, dans un demi cercle, on trouve des vitres qui par leur construction ont la faculté de laisser passer la lumière du Ciel sans que l'on puisse la voir. Dans son agencement et son élévation, la fenêtre est également en polyphonie sur les trois temps thématiques du tableau. Les différences entre les deux plantes se joue sur le pot et sur la nature de la plante. ------------------------------------------------------------------------------------------------------- Ursule est représentée dans ce tableau, vivante, endormie, rêvant qu'un ange lui annonce son martyre prochain. Mais elle est également représentée autrement. Le lit est recouvert de draps rouges et blancs, qui renvoient à l'idée d'un mariage non consommé, la pureté du martyre et le sang, la souffrance, en rappel avec la plante de myrte qui signifie son viol. Le lit dit non pas le moment où elle rêve, mais le contenu du rêve où lui annonce l'ange. À la fois, le lit et Ursule raconte le moment présent, où Ursule rêve, et le moment futur où Ursule sera tuée. Il y a ainsi ce qu'on appelle un signe condensé. Freud dans son interprétation des rêves analyse le "travail du rêve", en fonction d'un certain nombre d'opérations, dont l'opération de condensation. Ce lit va être un signe condensé, dans le sens où il est le lit présent d'Ursule vivante, et le lit futur ayant été martyrisé. Le rêve d'Ursule présent fait entrer un ange, qui lui annonce le martyre futur imagé par le second sens du lit. Mais le temps futur est lui même multiple. La tête du lit est supplanté d'une urne funéraire, qui le fait fortement ressembler aux tombeaux de l'époque. Le lit de l'Ursule vivante est le tombeau de l'Ursule morte. Cette mort s'oppose hors cadre à la lumière du ciel dans le hors cadre opposé. Ainsi, Ursule est elle même multiple, condensée. Elle est à la fois vivante et rêvante, puis martyrisée, mais également morte représentée sur un lit catafalque. Lorsqu'Ursule sera canonisée et représentée comme une sainte, on mettra sur les autels des chapelles qui lui sont dédiées, une représentation d'un tombeau avec son effigie en marbre. La teinte même de son visage donne l'ambiguité entre mort et vivante ; il n'est pas rosé, mais blanchâtre, à la fois comme une vivante et une morte, à la fois comme un corps réel et une représentation en marbre. La représentation de son gisant justifie la chaire, exemple de la vie d'Ursule et la représentation, pour la prier, derrière le lit, devant même l'arrière salle du jugement dernier. Si l'énoncé de cette image est unique, le discours qu'elle tient est multiple. À un énoncé unique correspond des discours multiples. On trouve dans le tableau plusieurs inscriptions. La première se trouve dans la lumière du Saint Esprit, à côté du chien de la fidélité et de la couronne de la vertu. Le chien, la couronne est la plante fleurie sont parfaitement à la verticale, ce qui donne une volonté d'appartenance de ces trois objets différents à la même dimension. Si l'on regarde l'inscription de plus près, le texte écrit sur ce morceau de papier déplié est "Vittorio Carpathio F.", qui s'appelle dans la vie réelle "Vittore Carpaccio". La signature n'est pas à l'italienne, mais en langue latine. La terminaison latine (o) du nom marque dans la grammaire d'une appartenance entre l'objet est la signature : ce tableau a été fait par Vittore Carpaccio. Dans le Dictionnaire des abréviations latines et italiennes d'Adriano Cappelli, on interprète ce "F" de deux façons différentes. La première renvoie au verbe "Facere", soit le verve faire ; mais renvoie également au verbe "Fingere", le faire non pas dans le sens fabriquer, mais produire une fiction, plus dans l'esprit que le matériel de "Facere". Ainsi Vittore Carpaccio a mis en fiction cette histoire d'Ursule, en plus de l'avoir mis en image. Cette ambiguité honore la dimension de commande pour le couvent des Ursuline, comme s'il ne faisait qu'illustrer la fiction déjà présente dans le monde du couvent, en même temps qu'un artiste qui invente le récit d'après sa propre vision. Le Facere renvoie à l'énoncé unique, tandis que le Fingere renvoie aux discours multiples. La deuxième inscription se trouve au dessus de la porte menant à l'arrière salle "DIV. A. FA. V. S. TA." (le V étant un U latin). Le texte lui même dans son énoncé littéral dit "Diva Fausta". Mais il faut prendre en compte les points qui correspondent à des abréviations. DIV.A. signifie "Divina", le Fa. signifie "Fabula", le V. signifie "Ursulae", le S.TA. signifie "Sanctae", soit "Divina Fabula Ursulae Sanctae" signifiant "La divine fable de Sainte Ursule". La troisième inscription se trouve sur le pompon de l'oreiller d'Usrule "IN ° FAN ° NTIA" le ° n'étant pas un point d'abréviation mais de division du mot. Ainsi, le mot écrit est "Infanntia" signifiant "Enfance". Le mot étant brisé renvoie à l'enfance brisée d'Ursule. On remarque que le N est redoublé ; le mot n'est pas inscrit comme il s'écrit "Infantia", mais inscrit comme il se prononce, comme il se psalmodie dans une hymne à Sainte Ursule. Les trois morceaux sont répartis dans une continuité particulière. Le "IN" est dans l'ombre, du côté du lit, du côté de la mort ; c'est un préfixe privatif. "INFANS" qualifie un enfant avant qu'il ne puisse parler ; par la mort Ursule ne peut plus parler. Le "FANS" est face au lecteur, est renvoie à la révélation, à l'esprit qui parle. C'est une invitation de Carpaccio qui, par ce mot face au lecteur, incite ce dernier à faire parler Ursule qui ne le peut plus, par sa propre interprétation. Le "NTIA", suffixe et partie la plus abstraite du mot en opposition avec la partie concrète centrale, se trouve du côté de l'Ange et de la lumière. Au-delà, on s'aperçoit que l'abréviation NTIA renvoie à "Nuntia" qui signifie 'Annonciatrice", ce qui corrobore tout-à-fait avec le rôle de l'ange, qui vient annoncer le martyre d'Ursule. Au-delà, les trois parties du mot correspondent au trois temporalités. Le "IN" du côté d'Ursule est de la mort correspond à la terre, le "FANS" qui invite le lecteur à jouer l'intermédiaire entre l'oeuvre divine et la réalité correspond à l'Aevum, et enfin le "NTIA" du côté de l'ange correspond au temps du Ciel. ------------------------------------------------------------------------------------------------------- Tandis que dans l'énoncé, l'aeternitas est tronquée, elle ne l'est pas dans le discours, par rapport à la lumière surnaturelle qu'elle projette. L'énoncé sera tripartite si les trois temps sont présents, et bipartite si le temps du ciel est hors cadre. Mais les faits ne se disent pas que dans l'énoncé. Dans l'énoncé, le A correspond à la partie d'Ursule tandis que le B est la partie de droite. Le A est lui même tripartite, entre le plan d'Ursule dans le lit plurisémantique. Dans ce tempus du tempus, plusieurs dimension se dégage dans le temps même, entre le présent, et le futur, la vie et la mort. L'Aevum du tempus correspond au plan de la chaire et de la représentation de la sainte, monde des médiations entre le corps et l'esprit par les symboles représentés et non pas le monde des médiateurs entre la terre et le ciel comme c'est le cas pour l'Ange. L'Aeternitas du Tempus est matérialisé par l'arrière salle abstraite ; c'est le temps matériel de l'âme qui va être jugée. Dans le temps Aevum de l'ange, le premier plan met en lumière surnaturelle la signature de Carpaccio qui lui donne une valeur spirituelle en exprimant son rôle d'artiste intellectuel mais pas simplement un artisan. Le tempus de l'aevum montre les valeurs ancrées dans la terre (la couronne, le chien), mais qui ne viennent pas de la terre. Les valeurs sont supra-terrestres. Contrairement à l'aevum du tempus où les valeurs de la terre tendent à accéder au Ciel, ici, se sont les valeurs du ciel qui plongent sur la terre. À la même hauteur que la chaire et l'oratoire, on trouve du côté de l'ange les deux livres parmi les divers objets ; c'est l'Aevum de l'Aevum, qui montrent les deux testaments, ancien et nouveau, sur une nappe qui rappelle la composition de couleur du lit ; le martyre du Christ et des Saint corroborent avec celui d'Ursule. La parole du Ciel est venu s'incarner dans l'écriture, comme la médiation de la médiation. Le troisième plan est l'aeternitas de l'Aevum, par le placard qui est placé non pas à hauteur de sol, mais à mihauteur, qui montre la présence du Ciel, mais obscur, donc mystérieux. Ainsi, les parties peuvent successivement se nommer A1, A2, A3, B4, B5, B6, et C7 pour le temps de l'aeternitas, hors cadre. Au-delà de l'ordre de l'énoncé, il faut mettre de l'ordre dans le discours de l'énoncé. Si l'ouvrage de Genette s'intitule Le Discours du récit, c'est qu'il existe une différence notable entre ces deux concepts. Nous nous sommes attachés au récit, à l'énoncé, selon son auteur, dans les faits. Carpaccio, par sa signature montre qu'il ne fait pas qu'illustrer le songe d'Ursule. L'image dit des choses que l'histoire originelle ne dit pas. Le récit est unique, mais les discours que peuvent tenir un unique énoncé peuvent être multiples ; cela dépend d'un acte d'interprétation de la part du lecteur. Dans Les limites de l'interprétation, Umberto Eco dit qu'il y a d'une part l'intention de l'auteur, qui veut par la formation de son oeuvre signifier quelque chose, et d'autre part l'intention du lecteur qui a son propre esprit unique, et déchiffre par l'intention de lecture. Il y a enfin une intention de l'oeuvre, qui ne concorde pas avec l'intention de l'auteur ou du lecteur. La limite entre la lecture autorisée par le texte, et la lecture non autorisée, nous permettra de dire ce que le texte supporte ou ne supporte pas. Tandis que le vrai Carpaccio, le vrai tableau font partie de l'extradiégèse, du factuel, l'aeternitas qui est représenté hors cadre fait partie de l'intradiégèse. Elle est hors cadre du discours fictionnel, mais participe à ce discours du fictionnel. Dans l'énoncé, le premier niveau de la diégèse est celui donné par celui qui parle, et qui produit ce tableau. Est-ce l'auteur Carpaccio? Non, celui qui parle dans le tableau est le personnage fictif auquel il délègue parole. Vittore Carpaccio écrit sur le tableau en tant que signature Vittorio Carpathio. Le fait que l'orthographe ne soit pas similaire différencie l'auteur factuel extradiégétique, et celui fictif, intradiégétique, personnage de l'histoire. Il reste à savoir si l'auteur s'implique dans le personnage fictif ou se détache, prend de la distance. Entre l'auteur et le narrateur, il y a ainsi une différence. L'un est hors fiction, l'autre dans la fiction. Ceci est le premier niveau diégétique du discours. ------------------------------------------------------------------------------------------------------- Ricoeur, dans Temps et récits avait montré que les dimensions de Genette sur le récit littéraire marchait pour le récit factuel, le récit d'historien. Ainsi, on peut généraliser la problématique de Genette, même pour le récit de l'image. Mis à part l'exra-diégèse, tout ce qui n'est pas le contenu de l'histoire racontée, et concerne le destinataire. Dans ce cas de commande, les destinataires ne sont pas les lecteurs du tableau, mais la mère du couvent des Ursulines. Mais même en tant que non destinataire, on peut pourtant lire le tableau. À l'intérieur de la diégèse, il met dans le premier niveau la relation entre le narrateur réel et le narrateur fictif qui se manifeste dans la signature de l'auteur. Il faut savoir non pas qui est le peintre réel du tableau, mais qui à l'intérieur du tableau raconte l'histoire ; c'est le narrateur intradiégétique, puisqu'il fait partie de la fiction, le narrateur du rêve d'Ursule représenté dans la signature du papier fraichement déplié au pied du lit d'Ursule. Il faut définir chaque niveau diégétique non pas par l'emboitement des niveaux, mais dans le fait que dans chaque niveau il y a un segment des récits qui va relier un personnage (le narrateur fictif) à un autre personnage (le récepteur fictif, le narrataire). Il y a un véritable réseau entre les niveaux de récit. La métalepse est la façon dont un discours diégétique est introduit par un autre (fictive), dont la fiction est introduite par la réalité (référentielle). Le premier niveau de récit va de la signature à Ursule. Vittorio Carpathio raconte le rêve d'Ursule, la met en scène dans son lit, rêvant. Le deuxième niveau diégétique représente Ursule qui dans son rêve raconte sa vision de l'ange. C'est donc le contenu du rêve. Le troisième niveau diégétique représente ce que dit l'ange, qui lui raconte son martyre prochain. L'ange est présent dans un quatrième niveau, avec une fonction narrative différente. Il ne parle plus du lit du martyre, mais du lit catafalque. Il parle également du lit tombeau, lorsqu'elle est enterrée. Puis enfin au moment où l'on va donner une représentation de son corps sur l'autel d'une chapelle, le lit gisant. Ces 3, 4, 5 et 6e niveaux diégétiques font passer la dimension Ursule du martyre de sa vie jusqu'à sa légende. À un moment donné du discours, il va dire ce qui est inscrit dans le pompon du coussin (l'enfance brisée), qui renvoie à l'Ursule annonciatrice. Cette dernière est en lien avec l'Ursule du deuxième niveau diégétique. L'ange a une dimension de discours plus importante que le sujet du tableau qu'est Ursule. Plus il y aura de renvois diégétiques sur un personnage précis, plus le récit sera centré sur ce personnage, qui raconte l'essentiel, le fondement du récit. Il y a donc dans ce récit non seulement des emboitements, mais également des niveaux qui vont se croiser, notamment dans le personnage d'Ursule, qui a plusieurs dimensions diégétiques superposées, mais qui ne discourent pas du même personnage. --> ANALYSE DU TABLEAU : St Augustin dans son cabinet - V. Carpaccio Dans le fond ce tableau est exactement le même que le précédent. On retrouve dans ligne verticale qui passe dans le sommet de l'arc de l'autel, sur la statue du Christ ressuscitant, par la moitié du placard avec porte ouverte et porte fermée (sur fond vert d'espérance de l'exégèse: pour traduire ce qui est caché), puis au milieu des livres ouverts et fermés, anciens et nouveaux testaments. Sur la moitié gauche on trouve une chaire d'enseignement, recouverte de cuir rouge, couleur de la terre, sur un fond de mur vert d'espérance ; l'enseignement est l'espérance. On trouve également des objets d'archéologie (statuettes). Dans l'arrière salle, on trouve le jugement du savoir : la lumière naturelle y entre, et éclaire des ustensiles de production du savoir. C'est de ce côté du savoir que l'on trouve le chien de la fidélité et de la voix, ainsi que la signature du peintre. Sur la moitié droite, on voit Saint Augustin à une table recouverte de cuir vert. Ici on trouve rien d'un côté, et Augustin de l'autre. C'est ici Augustin qui fait le lien entre le ciel et la terre. Il écrit ce qu'il est en train de regarder : trois fenêtre qui renvoient au père, au fils et au Saint Esprit. On trouve différents objets comme des cloches, coquillages, partition de musique, dont une parfaitement lisible : c'est une pièce à trois voix, typique dans le style de la musique des Augustins. On trouve sous la fenêtre le sablier totalement écoulé (de cette fenêtre vient donc l'éternité). La partition est alignée avec le sablier et la fenêtre : c'est une musique du ciel, d'ouverture à l'éternité. On trouve aussi une représentation du monde par le globe terrestre. De part et d'autre de la statue du Christ, on trouve la mitre et la crosse de Saint Augustin évêque. La mitre est côté rouge, côté gauche, et représente le pouvoir sur terre de l'évêque. La crosse est le guide du peuple, côté droit. La statue du Christ se développe sur un fond rouge, fond de terre. Sur la voute supérieure on trouve une représentation d'Ange, qui sont des séraphins, le 9e et dernier niveau des anges, le plus proche de Dieu. (en dessous chérubins....... archanges, anges) Michel Serre analyse ce tableau, et compte 98 livres, le nombre exact d'ouvrages que Saint Augustin a laissé. Ce tableau est peint au moment où le Saint laisse un point final à son oeuvre : ce tableau va donc raconter la doctrine de Saint Augustin. Saint Augustin est l'Aristote latin. Il vit à la fin du IVe début du Ve siècle. Il a écrit sur tout, notamment sur la musique. Il fonde la foi sur le savoir. Cet tableau dans son cadre possède une structure bi-partite. Mais on peut remarquer une troisième section hors cadre, qui se matérialise dans la lumière qui perce à la fenêtre. Ici, l'intermédiaire entre ciel et terre est issu de la terre, Saint-Augustin. Le vert autour de Saint-Augustin indique que la parole qu'il reçoit du ciel et qu'il consigne est une parole d'espérance. La signature contrairement au premier tableau, se trouve du côté de la terre, et du savoir ; il change de Statut en se mettant non pas à la place d'un interprète, mais à la place du scientifique qui expose le tableau, sans expression. Le chien a d'ailleurs migré lui aussi du côté du savoir : la foi fait partie du savoir. La signature est "Victor Carpathio Fingebat" qui parle d'Augustin - 1er niveau diégétique Saint Augustin qui parle de sa doctrine répandu dans tout le tableau- Second niveau diégétique Troisième niveau : passage du savoir à la foi (structure inchoative par le passage de la gauche à la droite, avec la statue au milieu et tous les symboles) ------------------------------------------------------------------------------------------------------- Bibliographie sélective - Le discours du récit, Gérard Genette - Editions Seuil (2007) ------------------------------------------------------------------------------------------------------- PLAN DE L'ORAL D'HERMÉNEUTIQUE : Le Roi des Aulnes de Schubert I. Introduction 1. Schubert et le lied 2. Présentation du lied "Der Erlkönig" 3. Présentation de la problématique et plan "Comment Schubert dans une forme unie arrive à développer plusieurs univers musicaux?" - Analyse de la forme - Analyse de la relation texte-musique - Analyse des niveaux diégétiques de discours II. Exposé 1. Analyse de la forme 2. Analyse de la relation texte-musique 3. Analyse des niveaux diégétiques de discours III. Conclusion 1. Synthèse de l'énoncé 2. Ouverture dépassement Les verbes inchoatifs sont des verbes qui marquent la transformation (devenir), contrairement aux verbes d'états (demeurer). Structure inchoative, mutation et cassure dans une structure continue, articulée. Structure de deux moments de discours radicalement opposés. Interprétation musicale Une œuvre : La vallée d’Obermann, de Franz Liszt, issue de ses années de pèlerinage, « La suisse ». 3 interprètes : C. Arrau, C. Carniel & M. Rubackyte. L’interprète peut-il déployer le sens original d’une œuvre tout en prenant appui sur son sens originel ? Original : Jouer l’œuvre en fonction de sa propre sensibilité. Originel : Domaine (contexte) historique (date, compositeur, pourquoi a-t-elle été composée ?, les problématiques rencontrées…) de création de l’œuvre. Plan du cours : I) Le devenir-œuvre (notion de R. Ingarden). L’essence de l’œuvre, la phénoménologie (les sens sont un moyen d’accéder à la connaissance). II) L’école romantisante. III) L’école historisante. IV) Critique de la notion de « l’interprétation authentique ». V) Les perspectives d’un herméneutique musical. Dans l’antiquité, l’herméneutique constituait en lire l’avenir dans les boyaux d’animaux. Au Moyen-âge, c’était plutôt une méthode qui permettait d’interpréter les textes sacrés. A la fin du XIXe/début XXe, c’est une branche de la philosophie sur la compréhension et l’interprétation d’un texte. Un homme : Heidegger Gadamer, pour lui, l’homme est un être de langue, qui comprend le monde par la méditation du langage. Introduction : |
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![]() | «Apprendre à mieux vivre ensemble en travaillant sur un projet commun de spectacle et en découvrant un environnement inhabituel» | ![]() | |
![]() | «les artiste n'ont pas encore pris l'animation assez au sérieux». Le cartoon est poétique, surréaliste, créatifs, IL n'y avait pas... | ![]() | «comment», l'autre donne réponse au «pourquoi». La différence est capitale, et ce n'est pas le hasard si tant de poètes modernes,... |
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