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COMMISSION DES RECOURS DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA FONCTION PUBLIQUE HOSPITALIÈRE BILAN D’ACTIVITÉ – BILAN STATISTIQUE décembre 2008 – décembre 2013 La Commission des recours du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière (CSPFH) est chargée d’examiner les recours formés par les agents publics relevant de la fonction publique hospitalière contre les sanctions infligées par l’autorité investie du pouvoir disciplinaire et contre les licenciements pour insuffisance professionnelle lorsque la CAP n’a pas donné un avis favorable à ce licenciement1. Composée paritairement de quatre représentants des personnels et de quatre représentants des employeurs publics, elle est présidée par le président du CSFPH, Conseiller d’Etat. En cas de partage égal des voix, le président a voix prépondérante. La Commission peut confirmer la sanction infligée ou lui substituer une sanction plus clémente. Elle ne peut en revanche proposer une sanction plus sévère (déclinaison du principe contentieux selon lequel l’appelant ne peut voir son sort dégradé sur son seul appel). Lorsqu’elle est d’avis qu’une sanction plus clémente doit être encourue, l’autorité disciplinaire, qui est alors en situation de compétence liée, doit prendre une nouvelle décision de sanction, qui ne peut être plus sévère que celle proposée par la Commission. En revanche, l’avis de la Commission sur l’insuffisance professionnelle d’un agent ne lie pas l’autorité hiérarchique. Les avis de la Commission peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. Depuis l’entrée en vigueur le 1er avril 2010 du décret n°2010-164 du 22 février 2010 relatif aux compétences et au fonctionnement des juridictions administratives, le juge compétent est le tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le lieu d’affectation de l’agent concerné. L’action devait auparavant être exercée directement devant le Conseil d’Etat. La Commission des recours a été instituée à l’origine avant même la création de la fonction publique hospitalière, par le décret qui portait alors statut général du personnel des établissements d’hospitalisation, de soins ou de cure publics, le décret n°55-883 du 20 mai 1955, modifié par deux décrets, le décret n°59-805 du 4 juillet 1959 relatif aux personnels des établissements d’hospitalisation, de soins ou de cure publics (qui codifie, de façon éphémère, son existence à l’article L. 803 de l’ancien code de la santé publique) et le décret n°70-1329 du 31 décembre 1970 relatif au recours ouvert aux agents des établissements d’hospitalisations, de soins ou de cure publics en matière disciplinaire. La Commission des recours, dans son régime juridique actuel, trouve son fondement dans l’article 14 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, lequel prévoit que « le Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière est l'organe supérieur de recours dans les matières mentionnées aux articles 68 et 84 et en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle. Il peut déléguer cette compétence à une commission des recours désignée en son sein, présidée par le président du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière et comprenant en nombre égal des membres de cet organisme nommés en application, d'une part, des 1° et 2°, d'autre part, du 3° de l'article 11. / Un décret en Conseil d'Etat détermine les cas de saisine de la commission des recours, la composition, l'organisation et le fonctionnement de cet organisme ainsi que les modalités de désignation de ses membres ». Les règles de composition et de fonctionnement de la Commission des recours du CSFPH, fixées d’abord par le décret n°88-981 du 13 octobre 1988 relatif au CSFPH, le sont actuellement par le décret n°2012-739 du 9 mai 2012 relatif au CSFPH et à l’observatoire national des emplois et des métiers de la fonction publique hospitalière. La délégation de pouvoir consenti par le CSFPH en faveur de la Commission des recours a fait l’objet d’une délibération en date du 23 octobre 2012 donnant délégation permanente de compétence à la commission des recours pour statuer sur les matières relevant de sa compétence légale. La composition de la Commission des recours a été déterminée par l’arrêté ministériel du 7 juin 2012, modifié 2. Le présent bilan de l’activité de la Commission des recours a été établi, sur le fondement des dispositions de l’article 29 du décret du 9 mai 2012, à partir des avis rendus entre décembre 2008 et décembre 2013. L’exposition des méthodes de travail de la Commission (I), sera suivie d’une présentation des principaux types de recours dont elle est saisie (II) et d’une annexe comprenant plusieurs tableaux statistiques. I. Présentation générale : méthodes de travail de la Commission La présentation de la procédure suivie devant la Commission (A) précédera celle de l’instruction des dossiers et de la rédaction des avis (B). A) Présentation de la procédure suivie devant la Commission des recours 1) De la réception du recours à l’envoi de l’avis motivé La Commission est saisie par courrier simple de l’agent public intéressé adressé à la direction générale de l’offre de soins qui en assure le secrétariat ; le ministère d’avocat n’est pas obligatoire. Le recours à la Commission n’est pas suspensif, c’est-à-dire que la sanction s’applique jusqu’à ce que l’avis soit rendu. En revanche, les délais de recours contentieux sont suspendus jusqu’à la notification de l’avis de la Commission ou bien, le cas échéant, jusqu’à la notification de la décision de l’autorité compétente prise au vu de cet avis, en vertu de l’article 27 du décret du 9 mai 2012 aux termes duquel « les délais de recours contentieux sont suspendus jusqu'à la notification soit de l'avis de la commission des recours, soit de la décision de l'autorité compétente prise au vu de cet avis ». Le plaignant peut toutefois parallèlement à la saisine de la Commission introduire un recours contre la décision de sanction devant le tribunal administratif. Le dossier fait l’objet d’une première phase d’instruction avec l’envoi du recours à l’administration employeur à laquelle est accordé un délai de quinze jours pour présenter ses observations. Une fois en l’état, le dossier est transmis à un rapporteur, agent des services du ministère chargé de la santé ou membre de la juridiction administrative (membre du Conseil d’Etat ou du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d’appel) ou de la juridiction des comptes (membre de la Cour des comptes, magistrats des chambres régionales des comptes). Le rapporteur établit un rapport adressé aux membres de la Commission une quinzaine de jours avant la tenue de la séance. Il rédige, après la tenue de celle-ci et au regard des délibérations auxquelles il assiste, un projet d’avis conforme à ce qu’ont décidé les membres de la Commission et le transmet au président. Le Président de la Commission arrête le projet d’avis, qui doit être motivé, et le signe. L’avis est adressé à l’agent concerné et à l’autorité dont la décision est contestée, à laquelle il appartient, en vertu de l’article 25 du décret du 9 mai 2012, d’informer la Commission des suites qui lui sont données. Il y a lieu de relever, et cela est regrettable, que la Commission n’est en réalité jamais informée des suites données à ses avis. Les délais dans lesquels la Commission se prononce sont très variés et dépendent des compléments d’instruction nécessaires, de la réactivité des parties et de la complexité des dossiers. Ils s’échelonnent de deux mois à un an (hypothèse rare cependant). En moyenne, la Commission statue en trois à cinq mois. 2) Examen de la recevabilité des recours La Commission examine d’abord la recevabilité du recours dont elle est saisie. S’agissant des recours contre les sanctions disciplinaires, cette recevabilité est doublement conditionnée :
S’agissant des recours contre les licenciements pour insuffisance professionnelle, la recevabilité est conditionnée, outre par le délai d’un mois, par le désaccord préalable de la CAP. L’irrecevabilité est également opposée au recours pour l’examen desquels la Commission n’est pas compétente, telle la contestation d’un refus de titularisation à la fin d’un stage (avis G. du 5 mai 2010, avis G. du 16 novembre 2012), ou la décision d’inscription au tableau d’avancement (avis S. du 27 février 2013). 3) Possibilité de donner acte d’un désistement A l’instar d’une juridiction, la Commission ne s’estime pas tenue de se prononcer une fois le recours enregistré ; elle donne acte du désistement du recours de l’intéressé, même présenté en cours de séance (avis A. du 16 décembre 2010, avis M. du 16 décembre 2010, avis T. du 16 décembre 2010). 4) Conditions dans lesquelles la Commission arrête son avis Par principe, la Commission entend l’agent qui fait appel et l’autorité administrative. Les parties peuvent se faire représenter par un avocat et assister par un ou plusieurs défenseurs de leur choix, à l’exclusion d’un membre du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière (article 23 du décret du 9 mai 2012). L’agent peut ainsi se faire assister d’un représentant syndical, ce qui est assez fréquent. Même si le dossier écrit constitue l’élément de référence essentiel pour la prise de décision de la Commission, l’audition peut se révéler déterminante. Normalement, l’audition commence par la lecture de son rapport par le rapporteur ; ensuite, les parties sont invitées à s’exprimer tour à tour ; puis les membres de la Commission posent les questions qu’appellent selon eux l’affaire telle qu’elle résulte des écritures éclairées par les observations orales des parties. Après l’audition des parties, la Commission délibère, en examinant successivement la réalité des frais reprochés à l’agent, la qualification juridique qu’ils appellent et la proportionnalité de la sanction. Ce qui peut être signalé dans ce débat interne à la Commission, c’est qu’il n’y a pas confrontation ente deux blocs, l’un qui serait favorable à l’agent et l’autre à l’autorité administrative. Chacun s’efforce de se faire une opinion en conscience, en allant au fond des choses. Lorsqu’il estime les membres de la Commission suffisamment éclairés, le président invite la Commission à se prononcer, souvent par le biais d’un vote formel. La mise aux voix se fait au départ sur la base de la proposition du rapporteur. B) L’instruction, la rédaction et la portée de l’avis motivé 1) L’établissement des faits : questions de preuve C’est la première étape du raisonnement conduit par la Commission, et avant elle son rapporteur, qui doit s’assurer que les faits à l’origine de la sanction dont elle est saisie sont établis. a) C’est à l’administration d’apporter la preuve des faits qui fondent la sanction. A défaut, la sanction prononcée est dépourvue de base légale et annulée (avis D. du 9 octobre 2012, hypothèse dans laquelle la preuve que l’intéressé était l’auteur de courriels d’insultes n’a pas été apportée ; avis V. du 9 octobre 2012 par lequel la Commission annule une sanction particulièrement clémente au regard des accusations de maltraitance portées contre l’agent, jetant ainsi un doute sur leur exactitude matérielle). La Commission se fonde sur les pièces du dossier mais peut aussi conduire des mesures d’instruction, ordonner des expertises si elle s’estime insuffisamment informée (avis P. du 2 décembre 2009 : expertise sur l’état de santé psychique de l’intéressé au moment des faits), ou attendre les résultats d’une enquête conduite par la DDASS à la demande du procureur de la République (avis M. du 20 janvier 2010, à propos d’accusations de maltraitance dont la réalité matérielle était contestée). Elle admet tout mode de preuve, y compris les témoignages (dont elle apprécie le cas échéant le caractère concordant ou non : avis L. du 30 novembre 2011). Elle s’assure également de la bonne interprétation des faits par l’administration (avis B. du 2 décembre 2009, sur l’interprétation à donner d’un geste d’un éducateur envers un jeune de l’institut médico-éducatif). Elle ne retient toutefois que les faits expressément invoqués par l’administration et non ceux qui ressortent des pièces du dossier mais qui ne fondent pas la sanction litigieuse. b) La Commission s’assure également du respect des droits de la défense : elle refuse ainsi de prendre en compte des documents produits par l’administration qui n’avaient été communiqués ni au conseil de discipline ni à l’intéressé, privant celui-ci de la possibilité d’exercer pleinement sa défense (avis B. du 30 novembre 2011) ; elle peut être sensible à la présence ou à l’absence de l’agent ou de son employeur à la séance de la Commission, lorsqu’aucune excuse préalable d’absence ne lui est parvenue : ainsi du témoignage d’une agent non contredit par l’employeur absent, qui a contribué à faire regarder les faits à l’origine de la sanction comme non établis (avis S. du 17 avril 2013) ; ainsi encore de l’absence de précision sur la nature et le montant des vols commis, non comblée par l’absence de l’employeur à la séance de la Commission, de nature à ramener une révocation à une ETF de deux ans (avis P. du 2 octobre 2013). c) Elle s’assure également que l’enquête conduite par l’administration est suffisamment sérieuse et complète. Elle a ainsi annulé une EFT de huit mois fondée sur le seul témoignage d’un patient dément non corroboré par d’autres éléments (avis B. du 2 octobre 2013) ou sur deux témoignages dont l’un émanait d’un agent ayant eu une altercation avec l’intéressé (avis G. du 6 novembre 2013). d) La circonstance que les faits ont été commis en dehors du service et sans lien direct avec celui-ci est sans incidence sur la possibilité de prononcer une sanction, y compris la révocation (par exemple avis H. du 17 avril 2013 : faits de harcèlement de l’ex-compagne ayant donné lieu à de nombreuses condamnations pénales). e) Enfin, il appartient à l’administration d’expliquer, lorsque le conseil de discipline a proposé à l’unanimité une sanction, pourquoi elle s’en écarte, à défaut de quoi elle s’expose à voir la Commission ramener la sanction au niveau de celle proposée par le conseil de discipline (avis S. du 15 mai 2003). f) En cas de procédure pénale parallèle à la procédure disciplinaire, la Commission n’est pas tenue, étant donnée l’indépendance des procédures administrative et pénale, d’attendre le résultat de la procédure pénale. En cas de décision pénale, la Commission n’est tenue que par la constatation des faits. 2) La rédaction des avis Les avis doivent être motivés (article 24 du décret du 9 mai 2012). La Commission y veille particulièrement :
3) La portée des avis Les avis de la Commission lient l’autorité investie du pouvoir disciplinaire qui ne peut prendre de décision de sanction plus sévère que celle proposée par la Commission (article 26 du décret du 9 mai 2012). En revanche, l’avis de la Commission sur l’insuffisance professionnelle d’un agent ne lie pas l’autorité hiérarchique (CE 4 mars 2011, M. L., n°329831). Les avis de la Commission des recours pouvaient, jusqu’à l’entrée en vigueur le 1er avril 2010 du décret n°2010-164 du 22 février 2010 relatif aux compétences et au fonctionnement des juridictions administratives, faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat. C’est depuis cette date le tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve le lieu d’affectation de l’agent concerné qui est compétent. Le juge administratif exerce sur la légalité des avis de la Commission des recours un contrôle limité à celui de l’erreur manifeste d’appréciation (CE 7 avril 2010, AP-HP, n°301784). Lorsque, saisie par l’autorité disciplinaire, le juge administratif annule l’avis de la Commission des recours, cette autorité peut alors prendre une décision identique à celle qui avait été contestée devant la Commission, sans être tenue de solliciter un nouvel avis du conseil de discipline. Cette nouvelle sanction peut elle-même être contestée par l’agent concerné devant la Commission des recours, celle-ci ne pouvant être regardée comme restant saisie du recours formé contre la sanction initialement prise (CE 20 mai 1998, Mme J., n°173181). II. La nature des dossiers dont est saisie la Commission Il a été jugé éclairant, au prix d’un déséquilibre entre la longueur des parties, de présenter l’activité de la Commission en suivant le mode de raisonnement qui vient d’être présenté et qui structure ses avis : quels faits (A), pour quelles qualifications (B) et quelles sanctions (C). Ce raisonnement est celui tenu par le juge administratif dont la Commission tient naturellement compte de la jurisprudence, très nourrie en matière disciplinaire. |