B – les problèmes
question de la démocratie locale et de sa pertinence
Il y a un mythe, idée mobilisatrice, de la démocratie locale, il faut rapprocher le pouvoir du citoyen et les collectivités locales sont les lieux d’apprentissage de la démocratie. C'est une idée très forte. La démocratie locale ce n’est k’une bonne chose à 2 conditions :
les autorités locales sont soumises à l’Etat de droit, elles respectent la loi, les libertés fondamentales, les droits de l’homme. Or, ce pouvoir peut être arbitraire, interférer avec les vieilles querelles de clans, de classes…Il peut se voir aujourd’hui dans l’octroie des permis de construire. Le pouvoir local en soi n’est pas protégé contre l’arbitraire, il faut qu'il soit soumis à la loi. Aujourd’hui il y a progrès de l’assujettissement des autorités locales à l’Etat de droit. La tutelle jusqu’ici exercée par des préfets partiaux a reculé. C'est une tendance générale dans les pays européens. C'est le juge qui exerce un contrôle sur les activités des autorités locales, et met en cause la responsabilité personnelle (chose nouvelle) des autorités locales pour détournement de pouvoir, négligence, carence, insuffisantes précautions…
il faut que ces autorités aient des moyens humains et matériels suffisant. Certaines communes ont 7 ou 8 habitants donc un budget ridicule. Dans ce cas elles sont un leurre. C'est pourquoi la démocratie locale se déplace vers des pôles plus grands. Où se trouvent des fonctionnaires compétents et des moyens financiers au service d’un développement. En France, comme il y a beaucoup de petites collectivités locales à faibles moyens sont en pratique en divorce avec leur principes, ils sont quémandeurs auprès de l’Etat et renforce le centralisme de l’Etat.
conciliation entre principe d’égalité et réalité de la diversité.
Entre les régions allemandes il y a de grosses différences de superficie, en France également. Peut-on traiter de la même manière les Landers quel que soit leur poids et aux régions, aux communes. On parle d’égalité juridique (statut juridique) des communes, d’égalité devant la loi. Le second principe c'est la crainte de surenchère : accorder beaucoup d’autonomie à une région veut dire que d’autres régions vont demander des droits identiques ( exemple : en Espagne la catalogne et le pays basque). Plus d’autonomie locale veut dire plus d’inégalité et à l’inverse plus de solidarité entre les régions veut dire plus de centralisation, de contrôle central. C'est ce qui nourrit l’aigreur du débat en Belgique face aux inégalités de développements. Dans certains pays on voit une logique de dissociation (Belgique, Espagne, Italie ). Souvent la logique est inverse (Allemagne) : logique de recentralisation souvent soutenue par les autorités locales les moins fortes dans la compétition. Certains pays comme la GB, l’Italie acceptent d’avoir des régions avec des statuts différenciés. En France, patrie de l’égalité rigoureuse, il y a tout de même des exceptions introduites depuis mars 2003 (art72) par l’idée d’expérimentation. Certaines collectivités locales vont pouvoir mener des expérimentations dans des pouvoirs nouveaux qui seront étendus à tous ou non. II- mode d’articulation au niveau européen Les Etats sont ici intégrés dans un ensemble plus vaste A – la place des autorités étatiques dans les institutions européennes.
L’Union Européenne est une union d’état donc en pratique seules les instances d’état y sont représentées.
les Etats sont représentés es-qualité
Les Etats sont représentés sur un pied d’égalité au conseil européen et au conseil des ministres (organe décisionnel central). Les Etats ont un nombre de voix différent selon leur poids démographique. Les grands Etats sont surreprésentés, les petits sont sous représentés. Dans le rôle des 15 les 4 plus grands Etats (GB, Allemagne, France, Italie) pèsent pour 68,5 % de la population dans l’Europe des 15 et ont 46% des voix. Dans l’Europe à 25 ils comptent pour 57% de la population et 36,13 % des voix sous l’empire du traité de Nice, d’où le débat autour de la double majorité. Le conseil décide sur conseil de la commission ou de lui même.
les Etats : simple cadre de référence
C'est le cas au Parlement européen, les députés sont élus dans le cadre national. Chaque Etat a un nombre précis de députés. Ensuite les députés se regroupent par affinité politique, on voit naître aujourd’hui des partis européens. Le président de la commission est désigné par les chefs d’Etat mais est ensuite indépendant (pas de consignes ni virable par eux), les membres de la commission sont désignés par les Etats mais il leur est interdit de recevoir des directives ou de demander des consignes à leur Etat. Le président de la commission attribut les portes feuilles aux commissaires. Maastricht officialise un comité des régions, c'est un niveau intéressant institutionnellement, les régions sont représentées (elles ont des statuts très différents) ainsi, il est très influent et doit être contacter sur les questions des fonds structurels. Des lobbying très très intenses ont donc lieu. Les régions (les plus riches mais de plus en plus toutes) ont des représentants permanents à Bruxelles pour un lobying de plus en plus efficace auprès de Bruxelles et par delà les Etats. B – gouvernance à niveau multiples.
Le mot gouvernance est mis en avant pour :
souligner les convergences dans l’exercice du pouvoir entre les grandes organisations publiques et privées ou les grandes organisations internationales. Il y a des logiques convergentes.
Elle met l’accent sur les leviers de pouvoir effectifs : pouvoir hiérarchique (autorité juridique du supérieur sur l’inférieur – structure pyramidale), pouvoir juridique de surveillance (juge, tutelle).
Accent sur l’emmêlement de pouvoirs réciproques d’influence.
Accent sur les contradictions internes, on prend en compte les contradictions internes qui existent au sein d’une même organisation : région, communautés urbaines (pauvres ≠ nantis)
Met l’accent sur les contraintes issues de l’environnement concret : les coûts de transaction. Une firme privée suie une logique influencée par les décisions des concurrents. De même dans les rapports entre collectivités et Etat et Europe il y a beaucoup de coûts de transaction : chaque autorité doit prendre en charge les capacités de collaboration, résistance, nuisance des autres. Il faut donc toujours négocier, anticiper les actions des autres.
a) La mise en œuvre concrète de celle-ci veut dire des lieux de concertation
Ils peuvent être institutionnalisés : on sait clairement qui y figure, il y a lisibilité et transparence. Exemple : le préfet joue un rôle de coordination des services de l’Etat dans sa région ; comité de région à Bruxelles, conseil européen (lieu de concertation multi-niveaux).
Les lieux de concertation informels sont aussi très nombreux pour solutionner les problèmes courants, c'est permanent : policy networks.
b) La mise en œuvre concrète de celle-ci veut dire et des techniques de coopération
C'est la notion de contrat. Ils peuvent être unilatéral, ou de forme juridique contractuelle. Contrats de développement région, contrats de plan, pour que l’Union Européenne finance des infrastructures dans les régions moyennant des engagements.
Séance 4
Suffrage universel : institution centrale de la démocratie On ne peut donner comme fondement au pouvoir politique que 2 explications : il repose sur la force ou le consentement. Les ensembles politiques naissent soit du conflit (théorie conflictualiste) soit de l’agrégation (théorie consensualiste) en ensembles toujours plus larges. Exemple : les Etats-Unis se sont former par l’agrégation des différentes colonies, l’Union Européenne suit également ce processus. La différence entre ces 2 théories est très limitée : les ensembles politiques créés par des conflits sont souvent légitimés ensuite par le consentement. Le suffrage universel suit la théorie consensualiste. Dans les monarchies traditionnelles il y avait une forme de consentement : lors du choix d’un nouveau roi il y avait la liturgie de la remise des clefs des grandes villes . le suffrage universel est une forme claire, mathématisable, de consentement. C'est un consentement qui implique tout le monde, on parle de généralité. Il est en phase avec deux tendances de la vie politique moderne : l’irruption des masses dans la vie politique (mouvement ouvrier et mouvements nationalistes) et individualisation du consentement (chacun a une voix). Ceci explique la place centrale du suffrage universel dans les démocraties modernes.
I – fonctions réelles du suffrage universel
A – expression de la volonté populaire
C'est l’expression la plus forte idéologiquement parlant dans la pensée démocratique. Elle suppose que le peuple existe, en amont de la société politique. Il est l’acteur fondateur de la société politique. La volonté du peuple peut s’exprimer soit dans l’adoption des lois soit dans le choix des gouvernants qui font les lois. Les 2 nébuleuses démocratiques : dans l’Antiquité avec Athènes comme cité emblématique de la vague démocratique et les démocraties modernes ; font des choix antagonistes. A Athènes on tirait au sort les gouvernants à l’exception des chefs militaires, le peuple assemblé adoptait les lois et décidait de la guerre ou de la paix, de la diplomatie. Aujourd’hui le peuple choisit les dirigeants politiques, mais n’adopte pas de loi. Il ne joue un rôle que dans des domaines marginaux et dans des situations quantitativement exceptionnelles.
Cette expression a-t-elle un sens ? La référence en la matière est Schumpter. Il a participé à la mise en place des institutions politiques autrichiennes en 1920 (capitalisme, socialisme et démocratie, 1942). Il s’interroge en tant que spécialiste de l’économie. Il se livre à une critique de la notion de volonté populaire. En tant que savant il en montre le côté magique.
- hormis les militants, les citoyens très politisés ou à haut niveau d’information politique, la grande majorité des électeurs n’a que des préférences incertaines quant aux choix qui lui sont offerts. Peut-on identifier nos intérêts réels à court, moyen et long terme, dans chacun des domaines pertinents (niveau de vie, prestation sociale …), peut-on les identifier avec clarté et peut-on les ordonner selon nos préférences ? il souligne combien il est difficile de les identifier en raison de la surinformation (informations parasites) ou sous information (éléments manquants) et il faut nous en remettre aux acteurs politiques. On pose le problème de la crédibilité des acteurs politiques quand ils promettent. Il faut donc formuler un jugement de crédibilité mais en a-t-on les moyens ? Le plus souvent, nos opinions sont un ramassis confus de vagues impulsions mollement rattachées à des slogans tout faits et à des impressions qui peuvent être erronées.
les volontés individuelles, si elles existent, représentent les préférences, mais sont elles rationnelles ? On distingue le comportement des consommateurs en micro situation. Dans les affaires locales ce type de comportement peut être efficace. On peut intérioriser petit à petit des critères de choix plus valides car il y a un feed back entre choix et conséquences de ceux-ci. Cela est vrai au niveau local mais non au niveau national où les électeurs ne peuvent faire le lien entre leurs choix et les conséquences qui en résultent. Le rapport à la politique est un peu ludique. Les débats politiques représentent un monde imaginaire.
Même si les citoyens ont des préférences et des comportements purement rationnels comment peut-il se faire que l’agrégation des comportements individuels rationnels débouche sur une volonté collective rationnelle. On parle d’effet émergent. L’émergence d’un phénomène collectif peut être totalement irrationnel. On pourrait penser que la démocratie politique repose sur des bases fausses, sur des mensonges. L’amoralité toutes les sociétés y compris les nôtres ont besoin de se fonder sur des croyances dont il ne faut pas montrer la fausseté ou l’inadéquation. Ce sont des croyances fondatrices. La volonté populaire c'est quelque chose de construit grâce à un travail permanent intensifié en période d’élection électorale, c'est un travail d’interprétation de ce que veulent les citoyens, le peuple. Ce travail est fait par des acteurs politiques, les journalistes observateurs de la vie politique, par des autorités réputées légitimes (exemple : les prix Nobel, grands intellectuels). La volonté populaire c'est l’effet émergent du marché concurrentiel des idées et des offres électorales. Ce marché est concurrentiel avec beaucoup de contraintes, il a de fortes tendances oligopolistiques. Des acteurs pèsent plus lourd que d’autres dans la construction de ce marché.
Le choix des gouvernants est-il politiquement important ? L’importance de ce choix doit être relativisée. Pourquoi est-elle survalorisée ? Des études d’économistes montrent que au niveau local la structure des budgets locaux, dépenses, est en partie influencée par le fait que les municipalités sont de gauche ou droite, mais ce sont des facteurs très secondaires. Le facteur le plus discriminant c'est la structure de la population, la taille de la commune. Au niveau européen on a vu se constituer des alliances entre Etats gouvernés entre forces politiques différentes. C'est le cas entre Chirac et Schröder. Les majorités politiques ne prédéterminent pas les alliances fondamentales. Les alternances politiques ne débouchent pas sur des infections majeures et durables. En 1981 volonté très nette de rupture avec des nationalisations… mais réajustement en 1983. Le développement de la politique française sur le long terme est continu. Il faut donc relativiser le choix des gouvernants. Pourquoi le choix des gouvernants est-il survalorisé : pour des raisons de crédeau démocratique, c'est pour mobiliser les électeurs. Tous les acteurs politiques vont donc dire la même chose. Les effets de l’alternance sont très importantes dans le milieu politique (perte ou gain de place, promotion…), pour les journalistes car ces 2 milieux sont en interdépendance étroite. Enfin, c'est un moyen de contrôle de la classe politique. Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser. Il faut donc des changements de personne, équipes, réseaux pour éviter la corruption. Les médias personnalisent la vie politique pour fidéliser leur lectorat et cela correspond à une demande des citoyens. Nous sommes régis par des logiques lourdes : économie de marché, mais sans visage. Les individus aspirent à donner un visage au pouvoir qui s’exerce sur eux : dirigeants, partis… Le choix des gouvernants est important en ce qui concerne l’action politique à la marge : incrémentalisme et style politique. Le travail du symbolique, des représentations est importants. Les styles d’action politique sont différents. B – facilitation de l’exercice du pouvoir politique
C'est une fonction majeure du suffrage universel. Celui-ci joue un rôle majeur pour légitimer les gouvernants et pour réactiver le lien social. C'est l’onction du suffrage universel qui légitime le pouvoir. Il ne choisit pas les meilleurs gouvernements. Parfois il a des applications aberrantes. Mais il est important pour fonder tout édifice social qu’il y ait des normes réputées indiscutables. On introduit ici la notion de sacré. (DURkheim). C'est un ensemble de propositions dont l’interprétation est restreinte : il y a des choses qu’on ne doit pas dire et n’importe qui ne peut pas discuter ces postulats. Coup de force symbolique de la représentation (Bourdieu) : l’élection investit d’une autorité, c'est donc magique mais nécessaire. La légitimation de ce pouvoir va encore plus loin : le suffrage universel facilite l’obéissance à la loi. Les citoyens choisissent une loi en choisissant les représentants qui la votent. Le suffrage universel implique les citoyens soit indirectement (représentants) soit directement (référendum : ratifie décisions majeures et évite les chocs en retour de décisions risquées). Dans la démocratie pluraliste on voit la légitimation des gouvernants, mais plus encore dans les régimes autoritaires voire totalitaires voire à parti unique. Ils recouraient au suffrage universel : Union Soviétique, Hitler, Napoléon III. Le suffrage universel légitime les gouvernants. Ces élections sans choix n’étaient pas de la mascarade mais attestaient la capacité de mobilisation, l’autorité du pouvoir et aussi impliquait les citoyens, les mouillait dans la politique totalitaire !!!
Le suffrage universel a la particularité de mettre en évidence la citoyenneté, les frontières de la communauté nationale, locale. Il visibilise la communauté des citoyens : renforce la solidarité. Il affiche les valeurs démocratiques également. On met en scène la liberté de débat, de contestation des dirigeants. C'est une manière de réenraciner les valeurs démocratiques qui font le ciment de toute communauté de citoyens. Les élections divisent mais aussi réunissent. Ce qui divisent est de voter X et non Y comme le voisin, mais cette part du vote est secrète. Ce qui est publique réunit, c'est un acte ensemble : aller voter. Le suffrage universel c'est une liturgie politique, un rituel. C'est la répétition de comportements codifiés qui a une efficacité en soi. Le rite et sa pratique fait l’économie des différences de croyances et est donc important pour la pérennisation sociale. II – mise en œuvre du suffrage universel
Vote préférentiel : l’électeur peut changer l’ordre des noms sur la liste.
Vote transférable : utilisent restes de voix pour une autre liste.
Belgique, Autriche, Chypre : vote obligatoire. A – problème de la participation des électeurs
Les pays les mieux votant sont l’Autriche et la Belgique mais ils sont à vote obligatoire !! (no wonder why) puis viennent le Luxembourg, la Norvège…La France, le RU, le Portugal, la Suisse ont des faibles taux. Alors pourquoi votons-nous moins ? Les élections qu’elles soient peu ou pas disputer peut l’expliquer. Des convocations excessives aux urnes également. C'est pourquoi on couple les élections (régionales et cantonales par exemple) lorsque c'est possible. Les facteurs les plus importants de la participation ou non sont culturels de longue période : diminution de l’emprise de grandes organisations sociales ou politiques qui stimulaient le devoir de voter. (Italie et France : église catholique et parti communiste par exemple, l’école, l’armée. ). Les citoyens sont de plus en plus stratèges, ils se déplacent s’ils en trouve l’intérêt, l’avantage. Les élections européennes de 2004 ont vu un taux moyen de participation de 45,5% contrairement à 65 à 80% pour les élections nationales. (seule exception Malte : 91%). Les participations les plus basses ont été enregistrées dans les pays nouveaux entrants. Slovaquie : 17%, Pologne : 21%. Les électeurs ne voient pas l’utilité de ces élections, voient la bureaucratie bruxelloise comme sans contrôle. C'est l’affaiblissement de l’autorité légitime du Parlement européen. S’il pouvait avoir une participation supérieure il pourrait mieux s’imposer face à la commission. B – problème des inégalités de représentation
Ce qui favorise l’équité de la représentation c'est la proportionnelle s’il n’y a pas de seuil et ce dans des circonscriptions très larges (grand nombre d’élus). Les inégalités peuvent être fortes au scrutin majoritaire à un tour (Angleterre par exemple). Un parti isolé a moins de chance d’avoir des voix que s’il s’allie avec un autre parti puis qu’ils opèrent ensuite une division des circonscriptions. Les facteurs politiques jouent un rôle majeur dans les inégalités de représentation, les mêmes lois électorales jouent un rôle différent lorsque la conjoncture politique est différente. La sincérité des règles du jeu électoral jouent également. L’enlèvement des urnes … c'est exclu,aujourd’hui dans les pays européens mais il peut y avoir insincérité des élections. Le découpage des circonscriptions peuvent en être à l’origine au scrutin majoritaire. La modification des circonscriptions extérieures est le pire !!! C'est le gerymangering. Changer le mode de scrutin en fonction de la conjoncture, favorise l’élimination de l’adversaire ou la limitation des dégâts pour la majorité sortante. Duré optimale du mandat : un mandat trop long aggrave la coupure entre électeur et élu, un mandat trop court fragilise la professionnalisation de l’élu et le met toujours en campagne.
Séance 5
Etat de droit : mode d’organisation du pouvoir politique Il a des connotations positives et est parfois associé à une valeur. Dans le projet de constitution européenne, une énumération situe l’Etat de droit comme l’un des fondements de l’Union Européenne, après la liberté, la démocratie, … Son ordre dans l’énumération est insolite. On peut rapprocher démocratie et Etat de droit. Cette association est récente. A bien des égards la logique démocratique et celle de l’Etat de droit sont antinomique. La démocratie c'est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Ceci implique un gouvernement souverain : ce que le peuple décide ne peut être entravé. C'est lié à la souveraineté populaire. L’Etat de droit implique la multiplication de barrières juridiques qui s’imposent aux gouvernés et aux gouvernants. Cette notion a eu du mal à s’imposer dans les pays où l’idée de souveraineté populaire est très forte. C'est donc comme un contre poids à la notion de démocratie.
Jadis, pour ériger des barrières à l’arbitraire du gouvernement politique, on invoquait des valeurs philosophiques, … En France, sécularisée d ès le début du XX, on a voulu remplacer le droit naturel par le droit objectif. Léon ?? dit que le droit positif est voté par le parlement mais doit respecter le droit objectif, qui pour lui est incarné par les principes de 1789.
L’Etat de droit connote respect de la loi. Dans les sociétés modernes on assiste à une juridicisations des phénomènes sociaux : inflation des règlement, décrets. Le droit régit des domaines de plus en plus diversifiés et variés. Le droit fait progresser l’idée de protection des libertés fondamentales et la sécurité physique et juridique des citoyens. Alors pourquoi le droit a-t-il permi ces progrès là ? Le progrès des idées peut l’expliquer. On aurait un plus haut degrès d’attentes et d’exigences.Une autre explication met l’accent sur les logiques sociales lourdes. I - Progrès dans la protection des libertés fondamentales des citoyens en phase avec les exigences des sociétés développées. A – demande accrue de plus d’Etat de droit Longtemps la loi a été la volonté d’un prince, et était modulée par des résistances, par des rapports de force. Au Moyen-Age le prince doit tenir compte des résistances des grands, de l’Eglise et des villes. Ces rapports de forces sont lentement institutionnalisés. Ce qui caractérise les peuples modernes c'est l’accélération de cette demande de protection juridique contre l’arbitraire. Une revendication de liberté se développe sous des formes différentes. Les libertés sont diverses : expression, réunion, association mais aussi sécurité physique, juridique. On appelle la sûreté, propriété, sécurité et bien.
L’aspiration a la liberté a toujours existé mais dans beaucoup de culture la résignation l’emporte et l’impossibilité d’exprimer ses attentes l’emporte. Mais dans nos sociétés trois facteurs sociologiques expliquent le développement de l’Etat de droit.
Évolution de la composition sociologique des populations
Plus le niveau de formation générale des catégories sociales s’élèvent plus il y a une exigence de liberté accrue. L’attachement à la liberté de la presse touche plus les alphabétisés, les professions où la dimension intellectuelle de liberté est la plus forte. Donc on voit un développement considérable de professions où le niveau de formation est plus élevé ainsi que le degré de liberté dans le savoir. MOORE écrit un ouvrage sur les origines de la dictature à la démocratie. Il met l’accent sur le rôle de la paysannerie (seigneurs et paysans dans l’invention du monde moderne) : là où elle est plus forte les régimes autoritaires ont une base plus forte, ses attentes en terme de libertés sont en effet plus faibles. Les démocraties s’imposent mieux là où la paysannerie a été liquidée le plus tôt possible (exemple : Angleterre). La classe ouvrière favorise aussi la mise en place d’un régime autoritaire. Elle est confinée dans des taches d’exécution réduite, dans un niveau de formation courte, soumise dans l’entreprise à un niveau de soumission élevé. La version léniniste du Marxisme, rebute les classes moyennes, mais peu ou pas la classe ouvrière (particulièrement dans les pays où on trouve peu de classe tertiaire). Il y a un lien fort entre la faiblesse de couches sociales à culture autoritaire, leur transformation, et l’Etat de droit. Il est intéressant de comparer la manière dont font campagne les partis communistes selon les époques. 2 – lien entre société de consommation (opulence, diversification de l’offre de produits) et les valeurs permissives. Aujourd’hui c'est la consommation (individuelle) qui tire le progrès de masse. Il y aune dimension symbolique de cette consommation. Pour consommer il faut désirer les produits, il y a donc un jeu de pression, de pub, pour désirer davantage. Il y a un lien entre la consommation et se libérer de ses contraintes. La société de consommation exige un Etat de permissivité qui a un lien avec la valorisation des libertés d’expressions, avec le souci de soi. Les valeurs de l’ascétisme, les grandes institutions qui prônaient la renonciation (…) (parti coco et église) ont décrues, perdu du terrain avec l’avènement de la société d’opulence. En Pologne on voit des résistances à l’égard de l’Europe qui va apporter l’opulence de la part de ces institution. 3 – Différenciation sociale et pluralisme politique La division sociale du travail implique diversification des taches et rôle socio-professionnel. Avant il y avait peu de classes sociales différentes. Aujourd’hui il y a beaucoup de seuils qui diversifient les catégories… Avec la globalisation de l’économie il y a d’importants mouvements migratoires. Il y a une part importante de gens qui « viennent d’ailleurs » (selon les mots exacts de Braud). Le maintien du lien social exige une tolérance accrue pour limiter les conflits de croyances… Ce n’est pas parce que l’on a un esprit plus tolérant mais on s’y habitue car on est en désaccord sur ce qui ne doit pas être toléré. Le désaccord sur l’intolérance produit la tolérance. A l’inverse si l’on a une conception forte de la vérité, alors la propension a dire la vérité et l’erreur ne peuvent avoir les mêmes droits est très forte. Ce sont les institutions qui prônent connaître la vérité qui sont le plus poussées à être intolérantes, elles doivent donc s’adapter. B – Exigences croissantes de sécurité juridique . Les sociétés antérieures (avant XIX- XX) ont éprouvé le besoin de sécurité (Habeas corpus). Il y a un lien entre ceci et la sécurité juridique accru. On ne veut accumuler du capital si on peut se le faire arbitrairement confisqué, cette tendance existe depuis toujours. Ce qui caractérise les sociétés plus développées c'est la division des taches. Cette réalité moderne des activités économiques, sociales et culturelles est appelée allongement des chaînes d’interdépendances : aujourd’hui construire une voiture implique la chaîne mais aussi la nécessité d’approvisionnement en amont des produits sous-traités, qui peuvent se situer dans des pays éloignés… Ceci implique que chacun des acteurs doit être le plus ponctuel et rigoureux possible et applique des normes précises de qualité et de qualité. Donc plus la société est sophistiquée plus la coopération doit être minutieuse donc plus il y a nécessité d’une régulation juridique de ces accords, avec sanctions si nécessaire. 1 – règles de transparence Exemple des transactions commerciales : dans les économies quasi autarciques, la parole donnée suffit largement, on ne traite qu’avec des gens connus. Dans les sociétés modernes la confiance, absence de traces écrites est impossible. Les exigences sont trop grandes. 2 – Règles respectées par tous : norme d’égalité Le désir d’égalité est le désir d’être reconnu. Cette norme doit être en phase avec les exigences de nos sociétés. La loi devient fragile si elle peut ne pas être respectée par certains, si elle peut être impunément contournée. Effectivité croissante du principe d’égalité donc depuis 30 ans. Des poursuites judiciaires impensables jusqu’il y a peu sont devenues effectives : arrestation de grands chefs d’entreprise… Lutte contre la fraude et contre la corruption induit un progrès dans le degré d’égalité. On peut envisager dans ce rapport la construction de l’Union Européenne. Elle met en place des normes juridiques, de libre concurrence par exemple, et le dispositif peut obliger les Etat à respecter la libre concurrence. Les Etats eux-mêmes peuvent être traînés en justice.
Les régimes autoritaires voient une attitude perturbatrice du développement à long terme en raison de l’attitude des gouvernants. Il y a de la corruption, d’une part, qui n’est pas sanctionnée (contrairement à la démocratie) et perturbe les exigences de développement des économies sophistiquées. L’intervention arbitraire des gouvernants dans les processus économiques aussi. Cela rend plus aléatoire les engagements juridiques internationaux de ces pays. Dans les régimes totalitaires il y a incertitude généralisée par rapport à la loi : les infractions pénales sont si larges que tous peuvent un jour être incriminés. Les effets sont dévastateurs sur un développement de longue durée.
Les aspirations à la liberté, sécurité sont de tous les temps mais sont particulièrement visibles aujourd’hui mais les freins qui existaient n’existent plus mais aussi parce que ces aspirations sont en phase avec les aspirations des sociétés développées d’aujourd’hui. II – les conditions nécessaires au succès de l’Etat de droit A – le pouvoir doit passer pour légitime On parle de pouvoir de l’Etat mais surtout aux législateurs, gouvernants (ministres – chefs de l’exécutif), aux juges. Cette légitimation prend des formes différentes : suffrage universel, élection + appui d’une majorité parlementaire + charisme personnel ou institutionnel, impartialité+indépendance+incorruptibilité.
L’obéissance à la loi sera plus difficile à obtenir si le pouvoir apparaît lointain (communication difficile, autarcie économique). La nationalisation de la vie politique est donc très importante. Le pouvoir européen peut apparaître comme le type même du pouvoir lointain, surtout s’il légifère dans un sens contraire à la coutume, tradition locale. Ce qui nourrit la crainte des communautaristes c'est qu’un sentiment identitaire particulariste aboutisse à ce que le pouvoir national apparaisse comme lointain, étranger, hostile. Il existe une sur-délinquance liée à des catégories de population car si la loi apparaît issue d’un pouvoir plus lointain il est plus facile de la violer.
Le respect de la loi est plus difficile à obtenir si le pouvoir apparaît comme parasite. Les thématiques anti-fonctionnaires jouent ici. Il faut donc compenser ce discours par un discours de la valorisation du service public, l’idéologie de l’intérêt général. B – le pouvoir doit passer pour efficace Il ne suffit pas de poser, étiqueter des règles, il faut les faire effectivement appliquer. Il y en a beaucoup et il faut donc des moyens humains, matériels, budgétaires et financiers importants. Boucle vertueuse et cercle vicieux s’imposent dans les pays nantis et démunis. Avec un ONB de 100 on peut prélever jusqu’à 40 sans que ce soit trop douloureux. C'est le cas d’un pays nantis. On peut alors financer des services publics qui fonctionnent, avoir un bon niveau d’école, une protection sociale… l’Etat apparaît donc sous un jour positif. C'est le cercle vertueux. Dans les pays démunis si le PNB est de 10, on prélève 1, ce qui est beaucoup pour les gens mais ne permet pas de réellement payer les fonctionnaires qui vont être inefficace, l’enseignement ne sera pas de bonne qualité… c'est un cercle vicieux. L’Etat se construit un visage négatif car il prélève et pourvoit peu car n’en a pas les moyens. Les pays de l’Union Européenne sont homogènes de ce point de vue mais on peut voir quelques disparités. On le voit avec Schengen : la Pologne n’a pas les mêmes moyens que l’Allemagne, France ou Angleterre. Des soutiens doivent donc être mis en œuvre pour bien appliquer les législations.
Les règles de droit doivent être réalistes, et non trop ambitieuses. Si elles sont trop ambitieuses, on les laisse de côté et la vigilance baisse. Il vaut mieux réglementer moins mais mieux que l’inverse. III – la mise en œuvre de l’Etat de droit A – deux sens du mot Etat de droit Il vient de la théorie juridique allemande. En Allemagne dès le XVIII on met en œuvre des règles juridiques précises pour l’accès à la fonction publique et les compétences des fonctionnaires. Weber se réfère à l’Etat de Frédéric II par exemple. L’Etat doit donc respecter son droit. Le pouvoir apparaît délégué dans la logique monarchique. Cette logique voulait aussi que le pouvoir puisse être repris. Il faut donc ne pas remettre en cause le partage des compétences. En Angleterre l’Etat de droit veut dire mise en place de garanties juridictionnelle.
L’Etat de droit c'est un Etat soumis au droit. C'est une conception plus ambitieuse. Le pouvoir exécutif, les fonctionnaires, le législateur doivent respecter des normes : gouvernés et gouvernants sont soumis au droit. Cette conception est liée au constitutionnalisme américain. La restriction s’impose au pouvoir législatif. Les choses changent avec la 2nde Guerre Mondiale en Allemagne et Italie d’abord : mise en place d’un tribunal et d’une cour constitutionnelle qui peut annuler des actes législatifs qui contrediraient des droits fondamentaux et principes de la constitution. En France le juge constitutionnel est instauré en 1958 comme le gardien qui empêche le parlement de se réapproprier les pouvoirs qui lui ont été enlevé. Mais en 1971, le CC pour la première fois examine un projet de loi selon le bloc de constitutionnalité. On se trouve sur le terrain du constitutionnalisme à l’américaine. 1974 : l’opposition peut saisir le CC. C'est une nouvelle avancée. B – les procédures de mise en œuvre
Principe de la hiérarchie des normes : conception pyramidale des normes. Aujourd’hui, les pays européens ne peuvent supprimer de libertés fondamentales sans être en infraction avec les traités et pourraient donc être sanctionnés. La constitution n’est plus la norme de base, on ne peut la changer de façon arbitraire. (critères de Copenhague). A chaque nouveau traité, la France a du modifier la constitution (car délégation de souveraineté)
Principe de la répartition des compétences : le parlement a des compétences déterminées, ainsi que le gouvernement et chacun ne peut empiéter sur l’autre. On retrouve la même chose avec l’Union Européenne. C'est la répartition des compétences. Aujourd’hui, le principe de subsidiarité veut que chaque Etat ne se mêle pas des affaires des autres Etats. Mais, des pressions politiques entre Etats peuvent avoir lieu, des rapports de force politiques et diplomatiques remettent en cause la répartition des compétences.
Principe d’une juridiction indépendante et impartiale : il ne suffit d’étiqueter des normes il faut aussi les faire appliquer lorsqu’il y a des contestations. Le juge est donc important, il doit être impartial et indépendant. Il doit être protégé des pouvoirs politiques et des formes d’influence politique qui protègent son indépendance. Il faut donc protéger le juge mais aussi les justiciables (contre le juge). Le juge doit donc avoir un statut d’inamovibilité (juges nommés à vie par exemple comme aux Etats-Unis), il faut prohiber les tribunaux d’exception, il faut que les autorités politiques reconnaissent la compétence du juge et donc se soumettent à son autorité. Possible problème de rapport du juge avec la police donc. Il faut une politique pénale, publique, du ministère de la justice (consignes de modération pour telles infractions, construction de tribunaux, renforcement de moyens pour certains juges) mais elle peut interférer. Il faut une possibilité d’appel (en cours d’assise, …) pour protéger le justiciable.
Séance 6
Partis politiques Un parti politique est une organisation juridiquement reconnue ou association de fait (avec ou sans statut juridique) cherchant à conquérir ou garder le pouvoir politique. Elles s’intéressent au suffrage universel, voie d’accès normale au pouvoir. Autour gravitent des groupes d’intérêt qui ne cherchent pas à exercer le pouvoir politique mais à l’influencer. Ils sont liés à l’idée de démocratie représentative. Sous l’Ancien Régime, il existait des réseaux fondés sur des affinités idéologiques, politiques…, mais n’exerçaient pas le pouvoir. Dans les constitutions les plus récentes (française, allemande, italienne), ils sont constitutionnellement reconnus. De Gaulle s’était fait connaître comme un critique du régime des partis. Allemagne : ils doivent être conformes aux principes démocratiques. Les théoriciens principaux de la démocratie au XVIII sont sceptiques par rapport aux partis politiques qui concourent à la division du peuple, cela sous-tend la conception du parti unique. Ils n’ont pas une bonne image dans les pays d’Europe de l’Ouest, ils ont une meilleure image dans l’Europe du Nord cependant. Ils ont une moins bonne image que l’administration et les services publics. Ils sont associés à l’idée de division, de conflit, briseurs de consensus. Dans certains pays, l’ambition politique est sourdement stigmatisée. Les partis sont des tremplins pour l’accession au pouvoir. Ill existe une marge entre les promesses des partis et ce qu'ils vont réaliser.
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