Synopsis «Vous m'avez enseigné le langage, et le profit que j'en tire est que je sais maudire.»








télécharger 237.86 Kb.
titreSynopsis «Vous m'avez enseigné le langage, et le profit que j'en tire est que je sais maudire.»
page9/10
date de publication31.03.2017
taille237.86 Kb.
typeSynopsis
p.21-bal.com > documents > Synopsis
1   2   3   4   5   6   7   8   9   10

La baguette de Prospero


[...] Le récit de Prospero est une histoire de lutte pour le pouvoir, de contrainte et de complot. Mais ce n'est pas seulement l'histoire du duché de Milan. Le destin d'Ariel et de Coriolan sera une répétition de ce même thème. Le théâtre de Shakes­peare est le Theatrum Mundi. La violence et la terreur en tant que principes du monde seront montrées en catégories cosmiques. La préhistoire d'Ariel et de Cali­ban est la répétition des tribulations de Prospero, une illustration supplémentaire du même thème. Les drames de Shakespeare sont construits non pas conformément au principe de l'unité d'action, mais au principe de l'analogie, d'une double, triple ou même quadruple intrigue qui répète le même thème essentiel ; ce sont des sys­tèmes de miroirs convexes et concaves qui reflètent, grossissent et parodient une même situation.

[...]

Qui est Prospero et que signifie sa baguette ? Pourquoi chez lui la science est-elle associée à la magie et quel est le sens dernier de sa confrontation avec Caliban ? Car en définitive, ce sont Prospero et Caliban les héros de La Tempête. Pourquoi retourne-t-il désarmé dans le monde des hommes ? Dans aucun des chefs d'oeuvre de Shakespeare, à l'exception du seul Hamlet, n'ont été montrées aussi brutale­ment que dans La Tempête l'antinomie entre la grandeur de l'esprit humain et la cruauté de l'histoire, la fragilité de l'ordre des valeurs. C'est là une antinomie pro­fondément ressentie par les hommes de la Renaissance et qui, pour eux, était tra­gique. Les neuf sphères célestes immuables qui, conformément à l'enseignement médiéval, se disposaient concentriquement autour de la terre, étaient la garantie de l'ordre naturel. A la hiérarchie céleste correspondait la hiérarchie sociale. Or les neuf cieux n'existent plus. La terre est devenue l'une des poussières de l'espace étoilé, tandis que simultanément l'univers se rapproche ; les corps célestes se meuvent selon les lois que la raison humaine vient de découvrir. La terre est deve­nue à la fois très petite et très grande. L'ordre naturel a perdu son sacre, l'histoire n'est plus que l'histoire de l'homme. On aurait pu rêver qu'elle allait changer. Mais elle n'a pas changé. Jamais encore on n'a si douloureusement ressenti le déchire­ment entre le rêve et la réalité, entre les possibilités qui résident en l'homme et la misère de son sort. Tout aurait pu changer et rien.n'a changé. [...]
Le grand monologue de Prospero au cinquième acte de La Tempête, où les roman­tiques déchiffraient l'adieu de Shakespeare au théâtre est une profession de foi dans la puissance démiurgique de la poésie, et est en réalité très proche de l'enthousiasme de Léonard* pour la puissance de l'esprit humain qui a arraché à la nature ses forces élémentaires. Ce monologue est un lointain écho d'un passage célèbre des Métamorphoses d'Ovide. Le monde est vu dans son mouvement et sa transformation, les quatre éléments, la terre, l'eau, le feu et l'air, sont libérés mais ils n'obéissent plus aux dieux, ils sont au pouvoir de l'homme qui bouleverse pour la première fois l'ordre de la nature.
[...] L'homme est un animal comme les autres, plus cruel seulement, peut-être, mais au contraire de tous les autres, il a conscience de son destin et veut le chan­ger. II naît et meurt dans un temps qui lui échappe et jamais il ne pourra s'y rési­gner. La baguette de Prospero contraint l'histoire du monde à se répéter sur une île déserte. Les acteurs peuvent la jouer en l'espace de quatre heures. Mais la ba­guette de Prospero ne peut changer le cours du monde. La moralité une fois ache­vée, le pouvoir de magicien de Prospero doit également prendre fin. II ne lui reste plus qu'une amère sagesse.
*Léonard de Vinci

Jan Kott, Shakespeare notre contemporain, 1962

William Shakespeare

(Stratford on Avon 1564-1616).

Le plus illustre poète dramatique de tous les temps, dont l'œuvre reste unique par sa diversité, sa richesse, sa profondeur et sa beauté poétique.
Une vie d'homme de théâtre


Sa vie est aussi bien connue que celle de beaucoup d'auteurs de son temps. II fréquente probablement la très bonne école de Stratford, mais ne va pas à l'université.

En 1582 il épouse Ann Hathaway, de huit ans son aînée, qui donne le jour six mois plus tard à une fille, puis, en 1585, à des jumeaux. On le perd de vue pendant sept ans. Il n'est pas impossible (l'hypothèse est a été reprise récemment) que pendant ces « années perdues » il ait servi, comme précepteur ou maître d'école, une grande famille catholique du Lancashire. Il est possible aussi qu'il se soit joint à une compagnie en tournée.

On le retrouve à Londres en 1592, acteur et auteur suffisamment envié pour être attaqué par Greene*. Et 1593 et 1594 (années où les épidémies de peste paralysent la vie théâtrale) il publie deux volumes de poèmes : Vénus et Adonis et le Viol de Lucrèce (ses Sonnets, qui datent de la même époque ou des années immédiatement postérieures, ne verront le jour qu'a 1609).

En 1595 il est, avec R. Burbage et W. Kempe, l'un des trois signataires d'un reçu pour des représentations données à la cour pendant les fêtes de Noël 1594 par les Chamberlain's Men, ce qui semble indi­quer qu'il occupe déjà une place importante dans cette compagnie.

En 1597 il achète l'une des plus belles maisons de Stratford. Il connaît donc très tôt le succès et la prospérité. Actionnaire de sa compagnie et du théâtre du Globe puis de celui de Black­-friars, acteur et auteur attitré de la première troupe d'Angleterre, il vécut sans doute la vie d'un homme de théâtre professionnel jusque vers 1610. Il regagne ensuite sa ville natale, mais sans rompre complètement avec ses camarades. Son testament mentionne des dons à Burbage, et à deux autres de ses associés, John Heminge et Henry Condell. Ceux qui le connurent n'eurent pas seulement pour lui de l'admiration, mais de l'affection et de l'estime. Les accusations dont il est victime en 1592 sont démenties aussitôt par l'imprimeur de Greene, et son honnêteté est hautement confirmée plus tard par Jonson. Aucun de ses contempo­rains (et ils furent très nombreux à le con­nnaître) ne contesta jamais qu'il ait bien été l'auteur de ses pièces. Les thèses « antistrat­fordiennes » datent essentiellement du XXe siècle. Aucun spécialiste n'y croit, mais des ont eu du succès auprès d'un public avide de scandales, amateur de cryptogra­phie, ou simplement ignorant. Curieuse­ment, c'est en France qu'elles trouvent encore le plus d'audience. La raison en est peut-être la qualité d'un ouvrage d'Abel Lefranc, le plus sérieux dans ce domaine (A la découverte de Shakespeare, 1945-1950). Shakespeare a été aussi victime des assauts des « désintégrateurs » qui ont cru reconnaî­tre dans ses oeuvres la manière de plusieurs de ses contemporains. A l'inverse, sa noto­riété lui a souvent valu l'attribution de pièces auxquelles il était étranger. Tout récemment encore, une nouvelle tentative a été faite pour lui attribuer un Edouard III anonyme de 1596.


Le « canon » shakespearien


Le « canon shakespearien fait néan­moins l'objet d'un large consensus. On le divise traditionnellement en trois ou quatre catégories : aux trois divisions de l'in-folio de 1623 (pièces historiques, comédies et tra­gédies) on ajoute souvent la catégorie des tragi-comédies romanesques (romances) l'on regroupe les dernières pièces. Cette classification est commode, mais elle néglige la diversité des oeuvres. Elle réunit des pièces parfois très différentes les unes des autres (il n'y a pas de modèle unique correspondant à un genre), estompe des traits communs (les drames historiques sont souvent tragiques, les tragédies souvent his­toriques), et néglige les aspects très particu­liers de certaines pièces (ainsi les problem plays telles que Tout est bien qui finit bien, Troïlus et Cressida, Mesure pour mesure ou Timon d'Athènes).
On place dans la catégorie des pièces historiques (à l'intérieur de laquelle la division en deux tétralogies est peu utile, de même que la distinction entre "chroniques" et "histoires ") les trois par­ties de Henry VI (vers 1590-1592), Richard III (vers 1593), Richard II (1595), le Roi Jean (vers 1596), les deux parties de Henry IV (vers 1597 et vers 1598), et Henry V (vers 1599). Parmi les comédies on range la Comédie des erreurs (The Comedy of Errors, vers 1,590, ou 1594), les Deux Gentilshommes de Vérone (The Two Gentlemen of Verona, vers 1590), la Mégère apprivoisée (Tire Taming of the Shrew, avant 1594), Peines d'amour perdues (Love's Labour's Lost, vers 1594), le Songe d'une nuit d'été (A Midsummer Night's Dream, vers 1595), le Marchand de Venise (The Merchant of Venice, vers 1596), Beaucoup de bruit pour rien (Much Ado About Nothing, vers 1599), les Joyeuses Commères de Windsor (The Merry Wives of Windsor, vers 1600, ou dès 1597), Comme il vous plaira (As You Like it, vers 1600), la Nuit des Rois (Twelfth Night, vers 1600), Tout est bien qui finit bien (All's Well That Ends Well, vers 1603) et Mesure pour mesure ( Measure for Measure, 1604).
Les tra­gédies comprennent Titus Audronicus (vers 1592), Roméo et Juliette (vers 1595), Jules César, avec laquelle le Globe a peut-être été inauguré en 1599, Hamlet (vers 1601), Troïlus et Cressida (vers 1602), Othello (vers 1603), le Roi Lear (vers 1605), Macbeth (vers 1606), Antoine et Cléopâtre (vers 1607), Turion d'Athè­nes (vers 1608, ou dès 1604 '?) et Coriolan (vers 1608).
Les tragi-comédies finales sont Cymbeline (vers 1610), le Conte d'hiver (The Winter's Tale, vers 1611) et la Tempête (1611) ainsi que Périclès (vers 1608), probablement due en partie à Thomas Middleton. Carde­nio (1613), qui a disparu, les Deux Nobles Cousins (The Two Noble Kinsmen 1613-1614), et Henry VIII (vers 1613, d'abord connu sous le titre de All is True avant d'être publié comme The Famous History of the Life ol King Henry the Eighth ont sans doute été écrits en collaboration avec Fletcher.

Les éditions

Shakespeare ne s'est pas intéressé à la publication de ses oeuvres dramatiques, qui étaient d'ailleurs la propriété de sa compa­gnie. Dix-neuf d'entre elles ont d'abord paru dans des éditions in-quarto, publiées sou­vent très peu de temps après les représenta­tions et parfois sans autorisation. En 1623 Heminge et Condell réunissent 36 pièces (ils excluent Périclès) dans un très bel in-folio qui constitue le principal document de réfé­rence. Depuis le XVIIIe siècle un énorme tra­vail d'établissement et d'analyse des textes s'est poursuivi, et de grands progrès sont encore accomplis de nos jours. Les meilleu­res éditions doivent se renouveler périodi­quement : ainsi une nouvelle édition de l'Arden Shakespeare (Methuen) a commencé en 1951, un New Penguin Shakespeare en 1967, le nouvel Oxford Shakespeare en 1982 et le New Cambridge Shakespeare en 1984. A Oxford même, la dernière édition des oeuvres complètes (1986) propose des chan­gements parfois radicaux. Quant aux études critiques, elles sont innombrables. Des bibliothèques entières (la Folger Shake­speare Library de Washington, par exemple) leur sont consacrées.

L'art du dramaturge
Une meilleure compréhension des textes et de leurs conditions de représentation a permis de mieux apprécier la dramaturgie shakespearienne. Il est bien évident, tout d'abord, que Shakespeare a su tirer le meil­leur parti des ressources que lui offraient les lieux théâtraux dont il disposait. Au début de sa carrière - avant la construction du Globe - il a dû sans doute s'accommoder de conditions précaires. Mais devant la nécessité de faire appel à l'imagination du spectateur (le prologue et les choeurs de Henry V sont très révélateurs à cet égard), c'est par le langage poétique qu'il supplée aux déficiences des moyens scéniques. II utilise toutes les possibilités de la très vaste scène qui s'avance jusqu'au milieu de l'audi­toire, et qui permet tout aussi facilement dans un même spectacle, de faire évoluer des groupes (foules, armées, cortèges) que de ménager des apartés ou d'isoler un personnage au premier plan.
Shakespeare use de cet outil pour décrire les mouvements qui agitent les partis ou les sociétés, et même temps que les relations entre les individus et les sentiments personnels, en donnant à entendre toutes les formes de dialogue et de monologue, du débat politique à la conversation privée, du discours public à la réflexion la plus confidentielle, et en jouant sur un rapport entre la salle et la scène qui donne au spectateur le privilège de vivre à la fois l'illusion et la conscience de l'illusion. Avec le même art, il a intégré dans ses oeuvres des éléments conventionnels qui, chez d'autres, restent souvent extérieurs au propos : non seulement le chant et la musique, mais la danse (la danse aristo­cratique dans Roméo et Juliette comme la danse populaire dans le Conte d'hiver par exemple) et le masque de cour (plaisant dans Peintes d'amour perdues ou sérieux dans la Tempête).
C'est en les renouvelant qu'il utilise des personnages popularisés par de vieux usages ou par des modèles récents, comme le clown ou le fantôme : le Touchs­tone de Comme il vous plaira et le Feste de la Nuit des rois ne sont pas des bouffons tradi­tionnels, de simples faiseurs de bons mots étrangers à l'intrigue, mais des créations ori­ginales qui participent à l'action, et c'est d'eux, en partie, que proviennent des per­sonnages satiriques aussi fortement indivi­dualisés et aussi importants que le Thersite de Troïlus et Cressida et l'Apemantus de Timon d'Athènes. Le fantôme, de Richard II à Macbeth, en passant par Jules César et - Hamlet, cesse d'être une simple force sté­réotypée : il hante la conscience des prota­gonistes, et son intervention se justifie, non plus par le désir de suivre un exemple classi­que ou par celui de flatter le goût du public pour le sensationnel, mais par une fonction remplie dans le déroulement du drame.


Du bon usage des sources


La même originalité se retrouve dans l'utilisation des sources. Un exemple significatif nous en est donné très tôt avec la Comédie des erreurs. Shakespeare y part des Menechmes de Plaute, mais il incorpore des données provenant de l'Amphitryon (de Plaute également) et de l'histoire d'Apollo­nius de Tyr, telle que l'a racontée John Gower, poète anglais du XIVe siècle. Sur ces bases, il construit une intrigue extraordinai­rement serrée, incluse dans un seul lieu et un seul temps, où le comique fondé sur les confusions entre des jumeaux se double fun plaisir plus intellectuel, issu d'un dédoublement des situations (par l'addition fun second couple de jumeaux) et de la subtilité avec laquelle l'action est agencée.
Parmi les sources les plus importantes du point de vue de la dramaturgie, il faut citer les œuvres des historiens, dont l'influence ne se manifeste pas seulement dans les pièces historiques. Chez les chroniqueurs anglais, et chez Plutarque aussi, Shake­speare a trouvé de longues séquences d'évé­nements qui se déroulent dans des lieux multiples, et mettent en jeu des sociétés en même temps que des individus. II leur a emprunté des situations qui lui permettent de superposer des plans métaphysiques ou mythiques aux plans politiques, sociaux et psychologiques, et de donner un dyna­misme poétique au vieux principe des cor­respondances entre le macrocosme et le microcosme. C'est pourquoi les dimensions du récit déconcertent parfois le spectateur habitué aux normes de la tragédie classique française : Jules César n'est pas le récit de l'assassinat de César, mais décrit ses conséquences aussi bien que ses causes, Hamlet ne prend fin qu'avec le triomphe de Fortinbras, Antoine et Cléopâtre ne se termine pas avec la mort d'Antoine.

Temps et espace
La durée de l'action n'étant pas soumise à une contrainte formelle, le temps peut se manipuler à toutes sortes de fins poétiques et dramatiques, être subi et vécu, imaginé et remémoré. C'est d'ailleurs ce qui explique que dans certaines pièces la chronologie soit objectivement incertaine ou contradictoire : on peut parler, à propos d'Othello par exem­ple, d'un « double temps » du déroulement de l'action, mais c'est un temps dramatique­ment juste.
La pluralité des lieux est mise à profit de la même manière. Ils peuvent marquer les étapes de l'itinéraire tragique ou roma­nesque que suit un héros, comme dans Richard II, le Roi Lear, Timon d'Athènes ou Périclès mais peuvent aussi s'opposer les uns aux autres de différentes façons : le camp grec et le camp troyen dans Troïlus et Cres­sida, Venise et Chypre dans Othello, Venise et Belmont dans le Marchand de Venise. Lieux d'affrontements ou de réunions, de rencontres ou de séparations, lieux d'empri­sonnement ou d'exil, de retraite ou d'er­rance, lieux de méditations privées ou d'engagements publics, ils contribuent tou­jours à une vision d'ensemble, et prennent souvent une valeur symbolique ou méta­phorique : la fameuse " lande » du Roi Lear est le décor d'une détresse qui sombre dans la folie au milieu d'une nuit de tempête où se déchaînent les éléments hostiles.

Techniques d'écriture dramatique
A la souplesse du cadre spatio-temporel s'ajoute une grande liberté dans l'utilisation des techniques de conduite du récit. La structure narrative essentielle est la scène, qui correspond à une unité de lieu et de temps, et à la fin de laquelle tous les person­nages sortent. La division en actes est beau­coup moins significative, et elle est due le plus souvent aux éditeurs du XVIIIe siècle. II y a cependant des exceptions : au début de la carrière de Shakespeare on la trouve dans la Cornédie des erreurs, Titus Andronicus, et Henry V, où toutefois il ne semble pas qu'elle ait pu correspondre à des interrup­tions du spectacle à la fin de chaque acte. On l'aperçoit aussi plus tard, dans Mesure pour mesure et Macbeth. Elle existe enfin dans les toutes dernières pièces, jouées au Black­friars, où, suivant la pratique des théâtres privés, le spectacle était interrompu par des interventions musicales à la fin des actes, et où le découpage en cinq actes reflète l'in­fluence grandissante du goût néoclassique.
Ailleurs, la division en scènes est la seule qui importe, et elle n'entraîne d'autre contrainte que le respect d'une règle implicite, très généralement observée : deux scènes suc­cessives ne doivent pas faire intervenir les mêmes personnages dans le même lieu. Cette liberté permet d'éviter le recours au discours narratif ou descriptif pour l'exposi­tion, et pour la relation d'actions qui se pas­sent dans des lieux différents : sauf quand Shakespeare choisit délibérément d'intro­duire un narrateur, l'exposition se fait pro­gressivement au cours des premières scènes, et les événements qui se déroulent dans des lieux éloignés sont montrés au lieu d'être rapportés.
Cela ne veut pas dire pour autant que l'histoire soit racontée de façon rudimen­taire, que le récit apporte une simple succes­sion d'épisodes. Au contraire, Shakespeare utilise fréquemment des procédés de pré­sentation et d'enchâssement qui créent une distance et provoquent la réflexion. II fait ainsi intervenir des chœurs : dans Henry V pour annoncer l'action, puis la ponctuer et la commenter, en soulignant les limites de la représentation théâtrale, dans Roméo et Juliette, pour apporter un élément à la fois lyrique et tragique. Une fonction narrative est parfois donnée à une figure qui tend à devenir un véritable personnage : le Temps dans le Conte d'hiver ; le poète Gower, à la fois prologue et épilogue, narrateur et com­mentateur dans Périclès. Le procédé de l'in­duction (sorte d'introduction dramatisée) est repris dans la seconde partie de Henry IV avec la figure de la Rumeur et surtout dans la Mégère apprivoisée où l'histoire de Katha­rina et de Petrucchio est représentée comme une pièce jouée devant l'ivrogne Christo­pher Sly par une troupe d'acteurs.
Ces pro­cédés ne sont pas sans rapports avec celui de la « double intrigue » qui accorde à certains personnages, ou groupes de personnages de second plan, un statut privilégié, en leur fai­sant vivre une aventure distincte de l'intri­gue principale. L'intrigue secondaire, d'une manière ou d'une autre, est complémentaire de l'intrigue principale, même dans des piè­ces comme la Nuit des rois la relation peut sembler assez ténue. Elle peut s'unir étroite­ment à l'intrigue principale, comme dans Lear où le destin de Gloucester, analogue à celui du roi, vient amplifier les thèmes de la douleur, de l'ingratitude, de la cruauté et de la déraison.
La similitude entre les destins tragiques de Lear et de Gloucester n'est qu'un exem­ple des situations parallèles que Shake­speare a souvent mises en scène, et dont la plus frappante est offerte par Hamlet : Ham­let, Laerte et Fortinbras sont placés tous trois dans la situation du fils qui doit venger son père, et si Laerte et Fortinbras restent au deuxième ou au troisième plan, c'est à Laerte que Hamlet doit sa mort, et c'est For­tinbras qui demeure seul pour triompher. De tels parallélismes relèvent de structures dramatiques et de systèmes de personnages plus homogènes, plus complexes et plus significatifs qu'on ne le soupçonne de prime abord.

La théâtralité en miroir

Shakespeare ne cède que rarement au ver­tige baroque de la mise en abyme. Des Mas­ques sont représentés dans Peines d'amour perdues et dans la Tempête ; Falstaff joue explicitement le rôle du roi dans Henry V; dans le Songe d'une nuit d'été puis dans Ham­let, le théâtre se donne en spectacle, "farce tragique" dans la comédie, tragédie dans la tragédie. La fable d'amour et de mort de Pyrame et Thisbé est un "spectacle des gueux » parodiant grotesquement Roméo et Juliette.
Un spectacle illusoire, mais sembla­ble en cela à tout théâtre : le théâtre dans le théâtre n'est que l'ombre dans l'ombre, sollicitant également l'action supplétive de l'imagination du spectateur, mise en avant par Thésée comme par le prologue de Henry V ; dans Hamlet le théâtre devient piège, arme, instrument de révélation de la vérité dans les mains d'un prince appelé, quant à lui, à diriger de vrais comédiens. Le théâtre selon Shakespeare se situe tour à tour du côté de la fête et de la participation du côté de la vérité et de sa quête, dans le monde, pourri par les apparences, de Hamlet, du côté de l'éphémère et de l'insubstantiel dans la Tempête.
En quelques endroits, Shakespeare offre une autre modalité à la présence du théâtre dans le théâtre : celle de la réflexion, au sens non plus optique mais théorique. Le théâtre envahit le discours, dans le célèbre prologue de Henry V et dans les non moins fameux conseils de Hamlet aux comédiens ; le théâ­tre est très souvent invoqué, pour définir la vie et son absurdité dans Macbeth, dans les tétralogies pour constater la théâtralité de l'Histoire. Le plateau du théâtre se prolonge au coeur même de la vie, et c'est cette conta­mination que creuse inlassablement Shake­speare.
C'est parce que l'homme n'est qu'une ombre qui passe dans le monde que le théâ­tre peut prétendre au statut de miroir de la nature, reflétant fidèlement dans sa pratique même, éphémère et dépouillée, la position de l'homme sous le regard de Dieu. La pré­sence du théâtre dans le théâtre se nourrit de la conception du theatrum mundi pré­gnante en Europe au tournant des XVIe et XVIIe siècles, et qui bascule alors de la théolo­gie dans l'art, envahissant notamment le théâtre espagnol, anglais et français : sur la scène du monde, comme sur celle du théâ­tre, l'homme est un pantin manipulé par la Providence, élevé au sommet de la gloire pour être précipité dans la chute. L'acteur ne joue d'autre rôle sur la scène des théâtres que celui de l'humaine condition.
Reflet et réflexion : ces deux formes de redoublement explicite ne sont pas, loin de les seuls moyens dont dispose Shakes­peare pour tendre au théâtre un miroir inté­rieur. Le plus souvent; c'est par le biais de ce que l'on pourrait nommer des "disposi­tifs" de théâtre qu'affleure, au coeur même de ses pièces, une présence d'autant plus forte qu'elle est devenue consciente d'elle-­même. Théâtralité minimale : celle du spec­tacle involontaire. C'est la manipulation d'un fait donné à voir par un personnage à un autre, selon une perspective qui le fausse entièrement, l'envers maléfique de l'illusion. L'exemple canonique est celui d'Othello : le spectacle trompeur du contentement amou­reux de Cassio, montré par lago comme preuve visuelle de l'infidélité de Desdé­mone, précipite Othello dans la folie furieuse. Pouvoir de l'image au théâtre. Ce que les yeux croient voir a ici une puissance de suggestion plus forte que ce que les oreille­s peuvent entendre : c'est par les yeux qu'Othello, qui exigeait de voir avant de consentir à douter, est convaincu de la trahi­son de sa bien-aimée. Dans Hamlet, cepen­dant, la pantomime ne révèle pas à Claudius le sens de la représentation théâtrale que seule la parole achève : le théâtre se donne alors à entendre autant qu'à voir.
L'image offerte au regard ou à l'esprit, par le jeu des mots, est ambivalente, interpréta­ble à volonté. Les pouvoirs du théâtre le rendent apte à révéler le faux aussi puissam­ment que le vrai. Ce scepticisme dramatur­gique est un élément clé de la durable modernité de Shakespeare.
Une autre forme de théâtralité est enga­gée avec la pratique du déguisement et du travestissement sexuel, récurrente dans les comédies : Hélène des Peines d'amour perdues conserve sa féminité sous le couvert d'une pèlerine, mais Rosalinde dans Comme il vous plaira, Viola dans la Nuit des rois, Julia dans les Deux Gentilslsoinmes de Vérone, Portia dans le Marchand de Venise empruntent l'habit, le langage et le comportement attribués à l'au­tre sexe. Ces personnages « acteurs » exer­cent alors leur pouvoir d'illusion sur des personnages « spectateurs », avec la compli­cité du public de la pièce placé en position de supériorité.

Le succès du jeu et l'issue favorable de la situation périlleuse qui rendaient nécessaire le recours au travestissement n'occultent en rien le fait que l'arme « théâtrale » est utili­sée pour des enjeux vitaux : obtenir, ou met­tre à l'épreuve, l'amour de qui l'on aime, soustraire un homme à un grave péril. Le dispositif théâtral est si étroitement imbri­qué dans la fable que le dévoilement préci­pite le dénouement, mais le travestissement aura permis au personnage-acteur de s'affir­mer et d'atteindre son but, dans la jubilation du jeu. Cette arme est parfois utilisée dans des contextes tragiques : c'est, dans le Roi Lear, Edgar, le fils renié contraint à revêtir le masque de « poor Tom » ou, dans Macbeth, l'énigmatique faux autoautoportait que donne de lui-même le prince Malcolm pour mettre à l'épreuve Macduff. Le jeu théâtral n'est autre que la distance (le jeu au sens mécanique) créée entre un être et un paraî­tre, signe de désenchantement, lorsqu'il est la seule arme de l'homme vertueux dans un temps disjoint, ou au contraire signe de l'in­vention festive et carnavalesque présente au cœur même de la fable théâtrale comme de la vie humaine.
Cependant, Shakespeare pousse plus loin encore l'exploration de la théâtralité dans le théâtre même, en inventant des personna­ges qui, par les procédés de mise en scène d'événements ou de discours, ou de mani­pulation de l'identité d'autres personnages qu'ils mettent en oeuvre, s'apparentent à des démiurges de la scène. Maria dans la Nuit des rois, Paulina dans Le Conte d' hiver, le duc de Vienne de Mesure pour mesure, Hamlet présentent à un double public, intérieur et extérieur à la pièce, les fruits de leur inven­tion : un puritain trouble-fête métamor­phosé en soupirant ridicule, une statue qui s'anime, un faux ange démasqué et ses victi­mes sauvées non sans maints déguisements, substitutions, voire résurrections.
Outre leur fonction divertissante, ces fictions internes creusent de manière allégorique des ques­tions essentielles : la fracture entre l'être et l'apparence, l'aveuglement humain, le doute frappant toute quête de vérité absolue, la similitude de Pacte théâtral avec l'évocation des morts.
Hamlet seul adopte tour à tour l'ensemble des rôles ou des fonctions mises en ouvre par le processus théâtral : lecteur et drama­turge (il récrit en partie le « Meurtre de Gon­zague " acteur (de sa folie), metteur en scène des comédiens, et pour finir specta­teur (de Claudius).
Si une vérité se dégage du théâtre de Sha­kespeare, en dépit d'un scepticisme drama­turgique constant, elle est à rechercher dans cette affirmation des pouvoirs démiurgiques de l'homme de théâtre et du théâtre lui­-même. Le théâtre du monde, avec Shakes­peare, devient le théâtre comme monde, métaphore signifiante de celui-ci, capable, grâce au concours de l'imagination du spec­tateur, d'évoquer la bataille d'Azincourt dans le cercle de bois (wooden O) du théâtre, de ranimer les morts, d'extraire quelques vérités de la gangue des apparences.
On peut penser qu'une telle célébration du théâtre par et dans le théâtre constitue l'aiguillon principal des metteurs en scène de notre époque. Si monter Shakespeare aujourd'hui ne peut plus être ou n'est plus seulement reconstituer le sénat romain, les remparts d'Elseneur, donner des ailes à Ariel, faire évoluer de jeunes garçons trou­blants interprétant des filles déguisées en garçons, motiver l'inaction d'Hamlet, éclai­rer la jalousie de Léontès (le Conte d'Hiver) ou celle d'Othello, cela reste la rencontre con­crète de toutes les grandes questions que pose la pratique du théâtre.

Shakespeare en France
Traduire Shakespeare et mettre en scène des pièces conçues pour l'espace à la fois multiple et non décoratif du théâtre élisabé­thain : longtemps ces deux démarches se sont révélées problématiques en France. Une histoire (les traductions françaises de Shakespeare dégagerait deux époques.
Durant la première, s'étendant jusqu'au début du XXe siècle, les traductions pour la lecture, généralement en prose, de l'entre­prise de Letourneur à celle de François-­Victor Hugo pour les oeuvres complètes, affirment, à défaut de toujours les respecter, les principes d'intégralité et de fidélité ; elles n'ont que peu de chose à voir avec les adap­tations pour la scène, presque toujours en alexandrins expurgés de tout élément gro­tesque ou obscène, qui s'autorisent d'impor­tants aménagements dramaturgiques afin de rendre possible la succession de décors illus­trant les différents lieux de la pièce.
La seconde époque, inaugurée par des metteurs en scène d'esthétiques différentes mais éga­lement soucieux de porter sur la scène un Shakespeare plus véritable, Copeau et Antoine, voit se combler le fossé entre ces deux types de transposition textuelle, au profit de nouvelles oppositions : les adaptations utilisant les textes shakespeariens comme matériau pour une réécriture litté­raire ou scénique, depuis Brecht, revendiquent leur légitimité, tandis que les traductions, s'offrant comme textes à jouet et à lire, se fondent sur la précision da enjeux linguistique, poétique et théâtral.
L'historicité de la langue de traduction renouvelle régulièrement l'actualité de la translation du vocabulaire, des structures syntaxiques, des images, des jeux de mots; la poéticité de la langue shakespearienne demeure une pierre d'achoppement, l'enjeu théâtral enfin, à savoir la manière propre à la langue shakespearienne de solliciter l'en­gagement corporel du comédien, a été sur­tout mis en évidence, depuis une quinzaine d'années, par le traducteur J.-M. Déprats, selon lequel la traduction doit s'efforcer de prendre en compte cette « musculature » de la langue afin de favoriser la relation des comédiens français au texte shakespearien. Dans le même sens, les traductions de Jean­-Claude Carrière pour Peter Brook, depuis Timon d'Athènes en 1974, dans une langue simple et contemporaine mettant en valeur les « mots rayonnants » du texte shakespea­rien, s'articulent à une pratique de jeu.
Jamais le paysage de la traduction de Sha­kespeare en français ne s'est trouvé aussi varié qu'aujourd'hui : c'est surtout sur le plan des images qu'Y. Bonnefoy traduit et retraduit Shakespeare en poète, de Hamlet à la Tempête, tandis qu'A. Markowicz ou Malaplate se prononcent pour un texte français versifié de manière à donner l'idée du vers shakespearien. La contrainte métri­que du décasyllabe pour l'un, de l'alexan­drin pour l'autre, même exemptée de la rime, entraîne inévitablement de multiples écarts avec la lettre du texte. J.-M. Déprats, quant à lui, se refusant à privilégier l'un des trois enjeux, linguistique, poétique et théâ­tral, tente leur conciliation dans une prose de théâtre de laquelle ne sont absents ni le rythme ni les jeux de sonorités.
Le répertoire d'élection des Français à l'in­térieur du corpus shakespearien se révèle en constante évolution, notamment du fait que Shakespeare a été longtemps beaucoup plus traduit et commenté que joué.
Jusqu'à la fin du XIXe siècle, la scène fran­çaise n'a montré régulièrement, sous des cormes très altérées, que les tragédies légen­daires les plus célèbres, Hamlet, Macbeth, Othello, le Roi Lear, Roméo et Juliette, aux­quelles venaient s'ajouter Richard III et quel­ques rares comédies adaptées de la Mégère apprivoisée, du Marchand de Venise, et des pièces dans lesquelles paraît Falstaff. Les tra­gédies n'ont jamais quitté les scènes fran­çaises.
En revanche, c'est la Nuit des rois montée par Copeau en 1914 au théâtre du Vieux- Colombier, qui révèle au public français l'univers contrasté, poétique et farcesque, bouffon et mélancolique, d'une partie des comédies de Shakespeare. L'attrait de cette dramaturgie, dans laquelle l'imaginaire et le féerique tiennent une bonne place, n'a pas fléchi : le Songe d'une nuit d'été et la Tempête demeurent aujourd'hui les comédies les plus souvent montées en France, cette dernière pièce, marquée par la mise en scène de Strehler en 1978, symbolisant l'art du théâ­tre et sa magie de l'inutile.
Il faut attendre le milieu du XXe siècle pour voir explorer en France le théâtre histori­que : la création de Richard Il au premier fes­tival d'Avignon, en 1947, est à l'origine d'une fascination durable qui, à la suite de Vilar, jouera sur une nouvelle génération (Chéreau, Mnouchkine). Plus récemment, des metteurs en scène ont choisi d'aborder le théâtre historique sous la forme de cycles : les Kings de Denis Llorca en 1978 parcouraient les trois parties de Henry VI et Richard III ; « Les Shakespeare » de Mnouch­kine, de 1981 à 1984, évoquaient l'histoire avec Richard II, et une adaptation des deux parties de Henry IV, avec le contrepoint d'une comédie, la Nuit des Rois) , Stuart Seide donnait à Avignon les trois parties de henry VI en 1994. Ces « Shakespeare au long cours » favorisent l'immersion du public dans le temps à la fois déterminé et archétypal des événements historiques (cou­ronnements, guerres fratricides, dépositions, assassinats) représentés par Shakespeare. Par ailleurs, tout un courant de mise en scène, illustré par B. Besson, B. Sobel, M. Langhoff, tend à bousculer les habituel­les distinctions de genre en traitant selon une interprétation de type historique et politique un certain nombre de tragédies, tels Hamlet Macbeth le Roi Lear, Richard III.
Enfin, à la faveur de nouvelles traductions à la fois précises et conçues pour la scène, l'intérêt de quelques metteurs en scène s'est tourné vers une partie du répertoire shakes­pearien longtemps considérée comme inaccessible au public français : celui des comédies dans lesquelles les jeux de langage et les mots d'esprit jouent un rôle détermi­nant, Peines d'amour perdues, interprété par les jeunes comédiens du TNS sous la direc­tion de J.-P. Vincent, puis dans une mise en scène de Laurent Pelly (1995), ou Tout est bien qui finit bien (J.-P Vincent, 1996).Cette dernière pièce relève, par son atmosphère grave, des comédies problématiques - pro­blem plays - génératrices d'un « rire fausse­ment libérateur » (Henri Suhamy), dont la plus sombre, Mesure pour mesure, fascine régulièrement les metteurs en scène, de Lugné-Poe à Brook, Zadek et Braun­schweig.
Il semble que tous les metteurs en scène français, à un moment donné, désirent s'af­fronter à Shakespeare, comme pour mettre à l'épreuve, au contact de ses pièces, leur propre démarche artistique. Autrefois, ce désir intervenait souvent dans la maturité (Baty, Barrault, Vitez), et se portait plus volontiers sur les grandes tragédies. Chez les jeunes metteurs en scène d'aujourd'hui (Braunschweig, Pitoiset, Pelly), Shakespeare est présent dès l'origine de la pratique théâ­trale, dont il exalte la nature festive.
Il y a ceux qui révèlent à chaque spectacle une facette différente de l'univers shakes­pearien, d'autres pour qui il existe une pièce élue, périodiquement reprise : Mesguich et Hamlet Lavaudant et le Roi Lear.
A cette universalité de l'intérêt des met­teurs en scène et des comédiens pour Sha­kespeare correspond une extrême diversité des démarches scéniques et de jeu : du natu­ralisme à la convention la plus poussée, du décor figuratif à l'espace neutre voué au jeu et à la mise en lumière de la théâtralité ; de l'incarnation à la mise à distance épique ou ritualisante des personnages ; jusqu'à la recherche expérimentale, avec le Qui est là de Peter Brook, par exemple, d'une dimen­sion cérémonielle dont le théâtre a besoin et dont Shakespeare demeure une source vive.
Extrait de l'Article Shakespeare William

Dictionnaire encyclopédique du Théâtre

Michel Corvin

Larousse1995

Biographies

Dominique Pitoiset - Parcours

Né à Dijon, il suit des études en architecture, puis en arts plastiques aux Beaux­Arts. II rejoint ensuite l'École supérieure d'art dramatique du Théâtre National de Strasbourg (TNS). Dès sa sortie, en 1981, il est assistant auprès de Jean-Pierre Vincent, Manfred Karge et Matthias Langhoff.

A partir de 1983, il crée en parallèle sa propre compagnie et monte Comédienne d'un certain âge pour jouer la femme de Dostoievski d'Edward Radzjinski, Le Péli­can d'August Strindberg, Le Misanthrope de Molière, Timon d'Athènes de Shakes­peare, Faust, version UrFaust de Goethe, Oblomov de Gontcharov, La dispute de Marivaux et Les Noces de Figaro de Mozart pour l'opéra.

En 1996, il est nommé directeur du Théâtre national Dijon Bourgogne (fusion du Centre dramatique national de Bourgogne et du festival Théâtre en Mai qui donne à voir la nouvelle génération de la scène internationale). La même année, il crée Le Procès d'après Kafka, présenté au Festival d'Avignon et au Théâtre de la Ville à Paris, puis La nuit juste avant les forêts de Bernard-Marie Koltès, Les brigands de Schiller, Le réformateur de Thomas Bernhard, Don Giovanni de Mozart à l'Opéra National de Paris Bastille.

En 2000, il est nommé directeur du Théâtre national de Chaillot avant qu'un chan­gement ministériel n'invalide cette nomination. II monte alors une Trilogie autour de Shakespeare : Othello au Théâtre national de Bretagne et au Théâtre national de Chaillot, La Tempesta, au Teatro Farnese di Parma pour le Teatro Due (et à Nantes et à Sceaux pour la version française), Macbeth opéra de Verdi au Teatro Regio di Parma - Festival Verdi.

Ces deux créations marquent le début des années italiennes de Dominique Pitoiset. II devient metteur en scène associé au Teatro Due de Parme et au Teatro Stabile de Turin.

Depuis janvier 2004, il dirige le CDN de Bordeaux (TnBA- Théâtre national de Bor­deaux en Aquitaine). II a signé deux mises en scène en 2004/2005 : La peau de chagrin (du 18 au 29 janvier 2005 et à Sceaux du 3 au 20 février 2005) et Albert et la bombe (du ler au 11 juin 2005 - reprise en octobre 2005 et tournée), son pre­mier spectacle pour enfants. En 2005/2006 il termine son parcours shakespearien et crée La Tempête de William Shakespeare.

Pour la saison 2006/2007, il s'est intéressé plus particulièrement aux écritures contemporaines, notamment en créant en septembre 2006 le spectacle Sauterelles de Bilijana Srbljanovic. Actuellement, il travaille avec l'auteur québécois Wajdi Mouawad sur sa prochaine création qui aura lieu en juin 2008 et qui aura pour thématique principale la Thébaïde. Parallèlement, il poursuit son travail jeune public avec son adaptation en portugais d'Alberto e a bomba, recréé à Porto en février 2007.

La Suite d'un parcours Shakespeare
Avec cette reprise de La Tempête, dernière oeuvre de Shakespeare, Dominique Pitoiset poursuit son parcours autour du grand auteur anglais, dont il a monté Ti­mon d'Athènes en 1991 (Maison de la Culture de Chambéry et au Théâtre Athénée Louis Jouvet à Paris). II faudra attendre dix ans pour qu'il choisisse de remonter Shakespeare. Ainsi 2002 est-elle l'année d'une trilogie qui comprend Othello (Théâ­tre National de Bretagne et Théâtre National de Chaillot), La Tempête dans une version italienne (Teatro Farnese di Parma pour le Teatro Due) et Macbeth, opéra de Verdi au Teatro Regio di Parma - Festival Verdi. En 2003, il crée Peines amour perdues en Italie ainsi que sa première version française de La Tempête (Les Gé­meaux Sceaux Scène Nationale, TNP Villeurbanne et Maison de la Culture de Loire Atlantique). Fasciné par ce texte qu'il qualifie de « sonate des spectres » et de « machinerie théâtrale », Dominique Pitoiset souhaite lui redonner toute sa couleur fantastique et utopique qui n'est pas sans rappeler L'invention de Morel de l'auteur argentin Bioy Caserès ou L'île du Docteur Moreau de Georges Wells.

Les comédiens et manipulateurs

1   2   3   4   5   6   7   8   9   10

similaire:

Synopsis «Vous m\Thème biblique : L’affection/ TÉmoigner de l’affection
«… dans la mesure où vous avez fait cela pour l’un de ces plus petits, l’un de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait.»

Synopsis «Vous m\L’affection est un sentiment d’amitié, de tendresse, d’attachement...
«… chaque fois que vous avez fait cela au moindre de mes frères que voici, c’est à moi–même que vous l’avez fait.»

Synopsis «Vous m\Socrate (469-399 av. J. C.)
«Je ne sais qu’une seule chose, c’est que je ne sais rien» pour se rendre capable ensuite de s’acheminer vers la difficile découverte...

Synopsis «Vous m\1. Globalement, avez-vous trouvé ce que vous recherchiez en venant au club ?

Synopsis «Vous m\Programme de révisions Communication
«vous vouliez la robe à 100 €, j’essaie de vous vendre celle à 150», «vous avez mis le doigt dans le pot de confiture, j’essaie de...

Synopsis «Vous m\Résumé : a partir d’un corpus de cinquante albums de chansons francophones...
«Encore un chanteur. J’en ai marre. Mais qu’est-ce que vous avez tous à chanter ? Pourquoi vous faites pas de la peinture ? D’accord,...

Synopsis «Vous m\1 – Le traité du tai chi chuan de Zhang San-Feng
«comprendre le Yin» s’aiguise. Quand vous avez «compris le Yin» vous pouvez accéder graduellement

Synopsis «Vous m\Mailto: julie kerespars8457@Gmail. Com
«projet parental» sans parents. Vous ajoutez la loi de la concurrence entre cliniques, les forfaits et formules, et vous avez des...

Synopsis «Vous m\Maintenant que vous avez acquis une compréhension de base du modèle...

Synopsis «Vous m\Avez-vous une pièce d’identité?








Tous droits réservés. Copyright © 2016
contacts
p.21-bal.com