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glissements en masse ("slumps"). Le terme général slump désigne des masses de sédiment qui ont glissé, sous l'action de la gravité, le long de surfaces de cisaillement en préservant en partie leur structure interne (par opposition donc aux coulées de débris). Un matériau déjà cohérent sera fragmenté et le transport générera des structures chaotiques, voire bréchiques; un matériel plus plastique donnera naissance à des plis et replis. Les slumps peuvent s'observer à différentes échelles et atteindre des dimensions hectométriques. Ils sont habituellement limités à leur base et à leur sommet par des couches non dérangées, ce qui permet leur distinction des structures d'origine tectonique (à ceci s'ajoute la dispersion des axes de plis). La genèse des slumps est à rechercher dans des instabilités (pente forte, chocs) affectant des sédiments déposés rapidement, à forte pression hydrostatique interparticulaire.![]() Deux exemples de slumps. A: à échelle pluri-métrique et en section (calcaire frasnien du Membre de Petit-Mont, à Beauchâteau) et B: à échelle centimétrique et en surface (phyllade à coticule de la Formation d'Ottré, Massif de Stavelot). ![]() Couche "slumpée" dans des calciturbidites siluriennes (carrière de Kosov, Synclinorium de Prague). Les pseudoconglomérats. Ces structures se développent dans des alternances de boue argilo-silteuse et de boue carbonatée soumises à la compaction et à des injections de fluides. Si la boue carbonatée est partiellement lithifiée, ces déformations produiront une rupture de la couche carbonatée avec formation de galets intraformationnels (Fig. V.17). On distingue ces pseudoconglomérats des conglomérats "vrais" par l'orientation souvent verticale des galets (suite à l'injection de fluides) et le passage latéral et vertical à des couches non perturbées. ![]() Figure V.17: exemple de pseudoconglomérat développé dans une boue calcaire partiellement indurée (en gris) au sein d'une marne (en brun). (1) galets verticaux; (2) transition latérale entre galets et couche non perturbée. ![]() Pseudoconglomérat dans la Formation de Muav, Carbonifère. Grand Canyon, Arizona, USA. Les injections clastiques ("neptunian dykes and sills"). Ce sont des unités sableuses recoupant suivant des angles variés d'autres corps sédimentaires et résultant de l'injection de matériel détritique plus ou moins liquéfié. Cette injection peut se faire vers le haut à partir d'une couche sableuse inférieure (suite à une surpression hydrostatique) ou vers le bas suite à la gravité. L'extension des dykes peut atteindre une centaine de m depuis le corps nourricier. Les épontes sont généralement nettes et tranchées. ![]() Dyke sédimentaire (indiqué par le porte-mine) dans les schistes et grès namuriens de la Citadelle de Namur. Les volcans de boue et de sable ("mud and sand volcanoes"). Ce sont des structures coniques cm à métriques, présentant souvent une petite dépression centrale et des flancs garnis de lobes de sable en position radiale. Une section verticale dans ces structures montre une disposition du sédiment laminaire parallèle aux flancs et un cylindre central (cheminée) sans structure. Cette cheminée peut être reliée à un dyke nourricier sous-jacent. Les volcans de boue et de sable sous souvent accompagnés, dans les couches environnantes, par d'autres types de déformations du sédiment tels slumps, figures de charge, etc. D'un point de vue génétique, ces structures sont la conséquence de l'expulsion de l'eau contenue dans un sédiment sursaturé suite à un dépôt rapide. Dans ces circulations d'eau, le sédiment devient mobile et se déplace à la manière des sables mouvants. ![]() Volcan de boue. Remarquer les lobes de boue et la cheminée centrale. Les stromatactis. Autrefois identifiées comme des organismes, ces structures centimétriques à métriques sont encore fort énigmatiques. Elles s'observent en général dans des monticules récifaux, où une boue à consistence gélatineuse permet une certaine permanence des cavités. Au cours du temps, les cavités primaires du sédiment (dues souvent à des éponges), évoluent par collapse d'une partie de leur "toit" et sédimentation interne sur leur "plancher". Une précipitation de ciment fibreux précoce fige ensuite l'ensemble et donne naissance aux stromatactis, caractérisés par un plancher horizontal (c'est d'ailleurs un bon géopète) et un sommet très digité. Les stromatactis forment souvent un réseau interconnecté dans la base des monticules récifaux (Fig. V.18). ![]() Figure V.18: stromatactis. A: calcaire à nombreux stromatactis à la base d'un monticule récifal (carrière des Wayons, Membre du Petit-Mont, Frasnien, Merlemont); B: détail d'un stromatactis plus complexe; base du monticule des Bulants, Membre du Petit-Mont, Frasnien, Neuville. C: schéma des éléments essentiels d'un stromatactis: (1): boue à consistence de gel; (2): sédiment interne, souvent laminaire; (3): ciment fibreux précoce; (4): ciment équigranulaire tardif. 3.2.10. Les témoins de l'activité organique Il s'agit de tous les vestiges, autres que les restes corporels laissés par des organismes vivant dans l'environnement étudié. Ceci comprend essentiellement les traces de déplacement et d'habitat (objet de l'ichnologie) et les coprolithes. Un problème majeur de l'interprétation de ces témoins est que dans la majorité des cas, ils sont isolés des organismes qui les produisent et que ces organismes demeurent donc largement inconnus. Les pelotes fécales et coprolithes sont les excréments fossiles. Les pelotes fécales (pellets) des invertébrés (mollusques, échinodermes, arthropodes,...) interviennent pour une part non négligeable dans les sédiments de la zone néritique. Ce sont des boules de boue de taille millimétrique, souvent homogènes, mais parfois dotées d'une structure interne caractéristique. Les coprolithes sont de taille plus importante (cm-dm) et sont interprétés comme des excréments de vertébrés. Ils contiennent des fragments d'os et de coquille brisés et des teneurs élevées en phosphate et matière organique. Les traces de racine sont associées à la pédogenèse dont elles sont un des critères d'identification. Ce type de bioturbation se distingue des terriers par le diamètre variable des structures, leur aspect souvent fourchu et leur terminaison conique. Des microstructures particulières se développent au sein du vide laissé par la dégradation des racines et également dans la zone de sédiment immédiatement influencée par leur présence (manchon). Ces critères sont détaillés dans le chapitre consacré aux paléosols. Les traces de déplacement et de repos. En milieu sous-aquatique, les pistes sont généralement produites par des arthropodes. Ces pistes sont souvent conservées en relief sur la base de la couche sédimentaire surincombante. On connaît par exemple les bilobites qui sont des traces de trilobites. Les helminthoïdes sont des traces énigmatiques du flysch alpin. En milieu sub-aérien, les très rares pistes sont préservées dans des sédiments imbibés d'eau. ![]() Pistes de tétrapodes sur une dalle de grès triasique (Aiguilles Rouges). Photo: J. Bellière. Les traces de logement. De nombreux organismes suspensivores construisent des terriers. Ils y trouvent protection contre les prédateurs et éventuellement contre l'exondation temporaire du milieu. En général, ces terriers sont disposés plus ou moins perpendiculairement par rapport à la surface du sédiment. Leurs occupants recueillent les particules nutritives en suspension. Le renouvellement de cette nourriture exige une agitation permanente des eaux. C'est la raison pour laquelle les traces de logement sont fréquentes dans les milieux peu profonds, en particulier en domaine littoral (Fig. V.19). Dans l'environnement de haute énergie de la zone intertidale, les substrats durs sont creusés par les lithophages (perforations de spongiaires, annélides, lamellibranches,...). Ces perforations sont reconnaissables car elles tronquent les éléments squelettiques du sédiment. Dans les substrats meubles, d'énergie moins forte, on observe deux types de terriers: des terriers simples en forme de tubes rectilignes ou de poches; les organismes y restent en contact avec le milieu extérieur par l'intermédiaire de siphons (lamellibranches); les arthropodes projettent leurs appendices antérieurs hors de leur terrier, tandis que les oursins assurent la circulation de l'eau par le mouvement de leurs ambulacres. Un autre type de terrier, en forme de U, communique avec la surface par deux orifices. Dans cette configuration, la circulation de l'eau est entretenue par les contractions du corps de l'animal (annélides) ou par le mouvement des appendices (arthropodes). ![]() A: traces en étoile de scrobiculaires (lamellibranches) à la recherche de nourriture sur la surface du sédiment. B: scrobiculaire dans un sable fin (coupe); noter la trace verticale des siphons. Plage de Vildé-la-Marine, Baie du Mont-Saint-Michel, France. Les traces de nutrition. Les traces de pacage sont le résultat de la quête de nourriture à la surface des sédiments (en général, une mince pellicule de matière organique). Ce type de trace est fréquent dans les dépôts relativement profonds (flysch). D'autres organismes creusent un réseau complexe de galeries comblées au fur et à mesure de leur progression dans le sédiment. Le tracé des galeries n'est reconnaissable que grâce à la différence d'aspect (texture, couleur) entre le remplissage du terrier et l'encaissant. Le développement de tels réseaux peut se faire par ramification d'une galerie centrale ou par translation à partir de terriers en forme de U. Les terriers laissés par des traces de nutrition sont en général considérés comme indicateurs d'environnements plus profonds que les terriers d'habitat (Fig. V.19). ![]() Figure V.19: morphologie des terriers en fonction de la bathymétrie. ![]() Nombreux terriers d'Arenicola marina (Polychaeta) dans la partie supérieure de la zone intertidale. A droite, forme isolée sur la plage montrant les deux orifice du terrier en "U". Plage Saint-Michel, près d'Erquy, Bretagne ![]() A: terriers en U avec figures en ménisques (Diplocraterion); B: terriers de limnivores; grès famenniens de la Formation de Montfort, à Arbre. ![]() Autres exemples de bioturbations et ichnofaciès associés: A: Diplocraterion parallelum (faciès à Skolithos). B: trace de racine. C: Zoophycos. D: Arenicolites, avec coupe verticale (faciès à Skolithos et à Cruziana); E: Paleodyction (faciès à Zoophycos). F: Skolithos. Cf. Gerard & Bromley (2008). Outre l'étagement de la bioturbation en fonction de la bathymétrie (Fig. V.19), on peut également observer en un même point, une répartition verticale des terriers en fonction des groupes trophiques et des caractéristiques du sédiment (Fig. V.20). ![]() Fig. V.20: étagement vertical des terriers en fonction des groupes trophiques (suspensivore-détritivore) et des caractéristiques des sédiments (surtout le caractère oxydant ou réducteur). (1): Macaronichnus; (2): Skolithos; (3): Thalassinoides; (4): Taenidium; (5): Zoophycos; (6): Chondrites. Il faut insister aussi sur le fait que la présence de terriers (et par là, la présence d'une endofaune) est une caractéristique des fonds marins bien oxygénés. Les fonds anaérobies sont azoïques (Mer Noire). L'absence d'ichnofossiles dans une série sédimentaire peut, dès lors, témoigner d'eaux peu oxygénées. Mais un afflux important de sédiment est aussi un facteur défavorable à la vie sur les fonds marins. Heureusement, certains caractères de la bioturbation permettent une estimation de la vitesse de sédimentation: quelques terriers verticaux très développés peuvent être des traces de fuite ("escape structure") d'organismes pris au piège dans le sédiment et cherchant à échapper à l'ensevelissement. Par contre, des sédiments intensément bioturbés dans leur partie superficielle sont indicateurs de taux de sédimentation faibles favorisant la présence d'organismes pendant des durées prolongées (Fig. V.21). Il en va de même pour les lithophages s'installant sur des substrats indurés ne recevant que peu ou pas d'apports sédimentaires. ![]() Figure V.21: la bioturbation comme indicatrice de la vitesse de sédimentation et du caractère plus ou moins réducteur du sédiment. En (A), une sédimentation lente permet le développement d'une endofaune très riche, avec de nombreux terriers; en (B), le sédiment est anoxique, limitant le développement de l'endofaune, ce qui permet la préservation de la lamination; en (C), la sédimentation est rapide et les terriers sont beaucoup moins nombreux; enfin, (D) montre un exemple de sédimentation épisodique (une couche de sable, en orange, recouvre les sédiments fins en gris-vert): une partie de l'endofaune disparaît, tandis que certains organismes s'échappent en migrant vers la surface. Remarquez qu'en A, C et D, l'augmentation du caractère anoxique du sédiment en profondeur (teintes plus sombres) limite la profondeur de la tranche de sédiment soumise à la bioturbation. ![]() Traces de fuite ("escape structures") dans un grès famennien. A propos des ichnofaciès, on trouvera de nombreuses informations supplémentaires sur: http://www.es.ucl.ac.uk/undergrad/fieldwork/image/fieldtrips/TraceFossils/ichno.htm http://www.envs.emory.edu/ichnology/ichnofacies.htm http://rodolfo.ips.es/HTML/04Dinosaurios/ICHNOLOGY.html http://research.eas.ualberta.ca/ichnology/ |