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Une introduction aux processus sédimentaires ![]() Tout au long des éternels estrans miroitants, infinis marins peuplés d'étranges merveilles, se tracent des mondes éphémères et mouvants de rides abstraites que la marée réveille. Rides de courant dans un chenal de marée, Trégastel, Bretagne, FB (huile sur bois). Prof. F. Boulvain, 2012 Table des matières
I. Introduction 1. SEDIMENTOLOGIE & PETROLOGIE SEDIMENTAIRE La sédimentologie est une discipline jeune parmi les sciences de la Terre. Elle est en effet liée à l'essor des études du milieu actuel au cours des dernières décennies. Si le terme "sédimentologie" est relativement neuf et dérive de l'anglais "sedimentology" (terme utilisé depuis 1932), on peut néanmoins reconnaître en Charles Lyell, le père du principe de l'actualisme ou mieux, de l'uniformitarisme, un des fondateurs de la sédimentologie. En schématisant, on peut dire que la sédimentologie au sens strict a pour but l'étude des sédiments. La pétrologie sédimentaire s'attache quant à elle à l'étude et la reconstitution des environnements de dépôt anciens, après que les sédiments ont été transformés en roches. Ceci comprend l'identification des processus sédimentaires, des milieux de dépôt, l'étude de leur évolution au cours du temps, la reconstitution de l'architecture des différents environnements au sein d'un bassin de sédimentation et aussi, il ne faut pas l'oublier, l'étude de l'évolution des sédiments au cours du temps (par compaction, diagenèse,...). Cette distinction un peu floue entre sédiments et roches sédimentaires (des sédiments meubles ou consolidés, que le cycle géologique amène hors de leur contexte de dépôt original...) n'a pas une importance primordiale et il est courant d'entendre parler de sédimentologie pour les deux objets d'étude. Dans cette optique, la sédimentologie peut s'appuyer sur plusieurs autres disciplines: la pétrographie, la stratigraphie (biostratigraphie, lithostratigraphie, stratigraphie séquentielle,...), la cartographie géologique, la géochimie et la géochimie isotopique, la géographie, la biologie, etc. L'importance de la sédimentologie est considérable: près de 90% de la surface terrestre est couverte de sédiments ou est constituée de roches sédimentaires, avec les proportions suivantes: argilites/siltites: 63%; grès: 22%; calcaires: 15% (chiffres basés sur des mesures directes, pondérées par des méthodes géochimiques). Malgré leur grande étendue, les roches sédimentaires ne représentent cependant que le 1/20e en volume de la croûte superficielle (16 km d'épaisseur). Leur étude est néanmoins capitale pour les raisons suivantes:
2. LES PROCESSUS SEDIMENTAIRES DANS LE CYCLE GEOLOGIQUE Rappelons d'abord ce qu'est le "cycle géologique". Les roches peuvent être classées en trois grands groupes qui sont les roches ignées ou magmatiques, les roches sédimentaires et les roches métamorphiques. Les roches ignées résultent du refroidissement et de la cristallisation de magmas, issus soit du manteau, soit de la fusion de roches métamorphiques. Les roches métamorphiques résultent de la modification, par l'action de la chaleur et de la pression, de roches ignées ou sédimentaires, lesquelles proviennent de la lithification par diagenèse de sédiments. Comme ces sédiments proviennent de la désagrégation de roches sédimentaires, métamorphiques ou magmatiques, l'ensemble de ces phénomènes forme un cycle appelé "cycle géologique" (Fig. I.I). Dans le cours qui va suivre, on étudiera les étapes de ce cycle géologique impliquant les processus sédimentaires. ![]() Figure I.I: le cycle géologique. Au sein du cycle géologique, les processus sédimentaires comprennent l'altération, l'érosion, le transport, le dépôt et la diagenèse. Les sédiments détritiques, formés de grains issus de la dégradation de roches préexistentes, transportés et déposés dans un bassin de sédimentation, constituent l'illustration la plus évidente de cette partie du cycle géologique. Dans le cas des sédiments biogènes et chimiques, résultats de la précipitation organique et/ou chimique, les constituants sont amenés au bassin sédimentaire sous la forme d'ions solubles. Une exception notable est cependant fournie par les sédiments d'origine volcanique, où les particules sont injectées directement dans le milieu de dépôt. Plus spécifiquement, l'altération est la destruction de roches ignées, métamorphiques ou sédimentaires par désagrégation mécanique et décomposition chimique, voire biologique (gélifraction, insolation, décompression, action des racines, de l'eau, du vent, etc.). L'altération donne naissance à une grande variété de produits: sols, débris rocheux, ions en solution dans les eaux superficielles. L'érosion correspond à l'enlèvement de ces produits d'altération des zones d'altération active et le transport est leur mouvement vers les zones de dépôt. La lithification est le résultat de processus comme la compaction, la recristallisation, la cimentation Les différents processus sédimentaires font donc l'objet de ce premier cours introductif. Ils seront d'abord traités séparément dans l'ordre de leur intervention dans le cycle géologique, ensuite, dans le dernier chapitre "transversal", ces processus seront mis en scène dans les principaux environnements marins et terrestres. Dans la suite de l'enseignement, ce sont les "produits", sédiments et roches sédimentaires, qui feront l'objet de notre attention (pétrologie sédimentaire). Pour en savoir plus: Quelques ouvrages généraux de sédimentologie:
Dans une optique plus spécialisée:
II. L'altération Si l'on examine un sable fluviatile dans la partie amont du bassin versant d'une zone où affleurent des granites (30 à 50% plagioclases, 5 à 35% FK, 5 à 10% quartz), on constatera paradoxalement que le quartz en est un minéral essentiel. Dans la partie aval du système fluviatile, il peut même être pratiquement seul. C'est l'altération qui est responsable de l'augmentation de la proportion de quartz (minéral résistant) dans les sédiments. En effet, les silicates de haute température (péridots, pyroxènes, plagioclases calciques...) sont vulnérables à l'altération car l'arrangement des tétraèdres de silice est peu organisé (néso- , soro- inosilicates).. Les minéraux de moyenne et basse température (inosilicates à deux chaînes, phyllo- et tectosilicates) sont plus résistants. Les verres, amorphes car figés à très haute température, sont les plus vulnérables. Donc, la vulnérabilité à l'altération des minéraux issus de la cristallisation d'un magma décroît proportionnellement à l'ordre de cristallisation précisé, entre autres, dans les séries réactionnelles de Bowen (autre manière d'exprimer les choses...). Dans le cas du quartz, il faut ajouter le fait que ce minéral possède aussi une bonne résistance aux chocs car il ne se clive pas. L'altération a pour effet de décomposer une roche en (1) des ions solubles et des grains qui vont être mobilisés par l'érosion d'une part et (2) un dépôt résiduel d'autre part, demeurant sur place. Les mécanismes responsables de l'altération, phénomène prenant place aux températures et pressions "faibles" régnant à la surface de la terre, sont l'altération physique, l'altération organique et l'altération chimique. 1. L'ALTERATION PHYSIQUE Les processus mis en oeuvre dans l'altération physique sont les suivants: - les alternances de gel-dégel, en climat suffisamment humide, fragmentent les roches (cryoclastie). L'eau en gelant augmente son volume de 9-10% et agit comme un coin, élargissant progressivement les fractures; - les variations répétées de température (40-50°C d'amplitude journalière dans le Sahara) ont à peu près le même effet que le gel: les différences de dilatation thermique entre les minéraux d'une roche provoquent l'apparition de fractures; - la décompression survient lorsque des roches ayant subit un enfouissement sont libérées de la pression lithostatique par érosion des formations surincombantes. Des joints de décompression, pratiquement parallèles à la surface du sol se développent progressivement. - l'usure mécanique par des grains détritiques emportés par le vent, l'eau, la glace. ![]() Altération physique. A: cryoclastie d'un basalte (roche macrogélive), Islande; B: cryoclastie d'un schiste (roche microgélive), Belgique; C: joints de décompression dans un massif granitique, Ploumanach; D: glace chargée de sable et de graviers, Pyrénées. |