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III. La science dans l'édition Notre propos n'est pas ici de décrire l'état de l'édition scientifique destinée aux scientifiques. En France, cette variété de livres scientifiques est abondante, de qualité variable selon les disciplines, disposant d'une audience internationale inégale. Nous nous attacherons essentiellement à faire le point des livres scientifiques destinés au grand public, des motifs qui rendent compte de leur succès ou de leur échec. Selon les dernières estimations du Syndicat National de l'Edition, le secteur des sciences humaines et sociales parait bien se porter. En 1994, 4 062 titres ont été produits. En revanche, avec un chiffre d'affaires de 772 millions de francs en 1994, une baisse de 2,2 % par rapport à 1993, l'édition scientifique et technique ne représente que 5,5 % du chiffre d'affaires global de l'édition française. L'analyse des raisons qui expliquent ces modulations de tirage est difficile. Il est possible, toutefois, de dégager quelques grandes lignes. La vente des dictionnaires et encyclopédies a considérablement augmenté. Aux Presses Universitaires de France, par exemple, il existe actuellement 32 dictionnaires qui rencontrent pour la plupart un réel succès. "L'encyclopédie philosophique universelle", malgré son prix élevé, s'est extrêmement bien vendue. Le prestige médiatique des auteurs joue un rôle primordial. Les gens achètent les livres de Changeux, Hawkins, Reeves et quelques autres, moins pour la qualité scientifique de leur contenu que pour la renommée médiatique dont jouissent leurs auteurs. Certains sujets sont objet de prédilection. Ce qui touche aux origines de la vie de l'homme, aux mouvements des astres dans l'univers, à la sexualité des humains ou même des animaux, jouit d'un incontestable attrait. D'une façon générale, il semble que l'énoncé du fait scientifique dans sa froide rigueur, même s'il est réalisé avec talent pour être mis à la portée du lecteur, attire moins que la réflexion sur soi à laquelle invite cet énoncé. C'est ainsi que certains livres de Jacques Monod, comme aujourd'hui ceux de Michel Serre, très largement inaccessibles à la majorité des lecteurs, obtiennent cependant de forts tirages. Le professionnalisme des éditeurs est dans tous les cas une des sources majeures de succès. La plupart des livres scientifiques dits de vulgarisation publiés en France, appartiennent à des collections qui ont réussi à donner d'elles mêmes une image continue, se perpétuant dans le temps, identique quel que soit le sujet traité. Souvent, les livres sont faits sur commande. Le scientifique, lui-même, n'est le plus souvent que le maillon d'une chaîne d'auteurs ayant pour objectif de "faire passer" le fait scientifique à travers l'exploitation d'artifices littéraires : le roman, le mythe, la métaphore. Ce passage presque obligé tend à réduire la frontière qui sépare la science des para-sciences ; mais il tend aussi à favoriser l'ambiguïté d'une distinction qu'il est indispensable de maintenir avec fermeté. Dans les livres "scientifiques" français, à coté des tribunes offertes à des chercheurs prestigieux pour exprimer leur point de vue personnel sur leur discipline ou sur la société, on remarque une tendance universelle à l'encyclopédisme que ce soit dans la floraison d'ouvrages spécialisés unissant toutes les branches de la science sous la même couverture ou des collections qui s'efforcent de couvrir le plus largement les domaines les plus divers. Une autre différence est le recours variable à la densité de l'illustration. Certains livres sont abondamment illustrés avec des textes comprimés, voire succints. D'autres fois, il n'y a pas d'images du tout. La répartition dépend beaucoup des opinions des directeurs de collection et du choix qu'ils font de la cible, c'est à dire du public visé. Plus celui-ci est jeune, plus le recours à l'image est systématique. Parmi les ouvrages "universels", ouvrages de référence, dont les documents sont écrits par des chercheurs, il faut citer "L'Etat des Sciences et des Techniques" publié sous la direction de Nicolas Witkowski par les Editions de la Découverte qui contient environ 200 articles renouvelés tous les cinq ans. En 1992 l'Encyclopedia Universalis a publié en deux volumes "La Science au présent" qui fait le point sur les recherches et les idées en faveur à cette date. En 1993, CNRS Editions a publié "l'Europe scientifique : recherche et technologie dans vingt pays". On trouve des articles sur des sujets scientifiques dans la plupart des dictionnaires et des encyclopédies généralistes. Les collections qui rassemblent auteurs et/ou sujets de nature scientifique sont trés nombreuses. Presque tous les grands éditeurs en offrent. Quelques titres sont publiés en poche. Le Seuil a plusieurs séries (dont Points sciences et Science ouverte). Fayard publie "le Temps des Sciences", Albin Michel "Sciences d'aujourd'hui", Odile Jacob "Sciences", Flammarion "La nouvelle bibliothèque scientifique", Hachette "Questions de science", Press Pocket (avec la CSI) la collection Explora destinée aux jeunes, Gallimard "Découvertes/Sciences". etc... La production est trés abondante, la concurrence est sévère, certaines collections (comme celle de Plon) disparaissent. Il faut aussi mentionner les Presses Universitaires de France avec leur fameuse collection "Que sais-je ?" qui comporte de nombreux titres scientifiques. A la suite de difficultés, sans doute éditoriales, le contenu de quelques uns des ouvrages parus ces dernières années dans cette collection a soulevé des tempêtes dans la communauté scientifique (notamment la nouvelle édition de l'Astrologie et un titre récent sur La Recherche scientifique...) Il existe de nombreux livres et albums pour enfants à thèmes scientifiques. Ils sont généralement agréablement illustrés. Ils se présentent comme des séries formant de mini-encyclopédies dans lesquelles les sciences naturelles, à travers les questions d'environnement, ont un grand poids, mais aussi les inventions en général, l'espace, voire les disciplines fondamentales comme l'électricité et la chimie. Ce sont souvent des productions internationales (traductions). La diffusion des livres de vulgarisation scientifique se fait bien pour des locomotives best sellers, mais elle est plutôt confidentielle pour le gros de la production. On doit en particulier déplorer que les bibliothèques publiques, municipales notamment, fassent peu de place à l'édition scientifique sans doute à cause du peu d'intérêt pour ce secteur des bibliothécaires, essentiellement formés sur la base d'une culture littéraire, chargés de commander les livres et de les recommander au public. On constate aussi souvent un mélange du scientifique, du para-scientifique, et de la science fiction, sur les mêmes rayons. Il y a en France peu de bibliothèques "à rayons ouverts" spécialisées dans les sciences et les techniques à l'exception bien sûr de la grande Médiathèque de la CSI à La Villette. On pourra consulter sur le rapport entre les bibliothèques et la science l'ouvrage collectif publié en 1994 par le Cercle de la Librairie sous la direction de Francis Agostini et sous le titre "Science en bibliothèque" (396 pages). Il contient beaucoup d'aperçus détaillés et de données quantitatives sur l'édition scientifique, l'audiovisuel, etc... Des Jurys, composés de membres de la communauté scientifique, remettent chaque année des Prix aux auteurs de ce qu'ils jugent être les meilleurs ouvrages de vulgarisation. Parmi eux le Prix Roberval et le Prix Jean Rostand (réservé aux auteurs de moins de 45 ans). Nous avons reproduit in extenso dans un encadré les commentaires du Syndicat National de l'Edition à propos de l'état de l'édition scientifique technique et médicale, c'est à dire bien au delà de la stricte production de vulgarisation scientifique et qui recouvre manuels, ouvrages didactiques, et traités qui font le point d'une question pour les professionnels. On y trouve d'interessants commentaires sur la question des bibliothèques universitaires. Il faut rappeller que les éditeurs étrangers, notamment hollandais, font trés souvent appel directement aux spécialistes français pour des ouvrages rédigés en langue anglaise et qui sont diffusés internationalement. L'édition scientifique, technique et médicale (STM) (Texte extrait de "L'Edition 1994-1995", Syndicat national de l'édition, pp 5/6) Avec un chiffre d'affaires de 772 millions de francs en 1994, en baisse de 2,2 % par rapport à 1993, l'édition STM représente 5,5 % du chiffre d'affaires global de l'édition française. 7,9 % de la production en titres reviennent à cette catégorie d'ouvrages dont la quantité vendue s'est élevée à 7 447 000 exemplaires en 1994. Le tirage moyen des ouvrages STM, 2 250 exemplaires par titre en 1994, est le plus faible de l'édition française. La part des nouveautés et des nouvelles éditions dans la production de livres STM est particulièrement forte. Elle correspond à 73,1 % des exemplaires et à 70,4 % des titres produits en 1994 [3 217 titres avec les réimpressions]. L'édition scientifique est assurée par un tissu très diversifié de 200 entreprises environ. Les quatre plus importantes assurent moins du tiers de l'activité globale. Seules les petites maisons se consacrent à la seule édition scientifique. L'édition en sciences est caractérisée par une segmentation extrêmement fine, en disciplines et en niveaux, qui définit des niches où une seule maison d'édition peut assurer du tiers à la moitié de l'activité. Ni les aides publiques, au total moins de 5 % du chiffre d'affaires, ni l'édition publique, là encore moins de 5 % de l'activité, ne sont déterminantes. Cependant, l'économie de l'édition de certains ouvrages scientifiques rendra leur prix de vente dirimant si aucune aide publique ne permettait de l'abaisser. L'université et les centres de recherche résument l'univers de l'édition en sciences. Ils lui fournissent ses auteurs, ses circuits de prescription, ses débouchés directs, les bibliothèques, ses clients immédiats, les étudiants, les enseignants, les chercheurs et, puisque ce sont des lieux de formation, ses débouchés futurs. C'est la raison pour laquelle il apparaît naturel que les éditeurs spécialisés puissent disposer des fichiers d'adresses professionnelles disponibles dans les organismes publics de recherche. La relation de l'université au livre, plus généralement la relation de la formation, y compris la formation continue, à l'écrit, est un élément déterminant de la santé de l'édition en sciences. Malgré des perspectives démographiques favorables: nombre d'étudiants, développement des potentiels de recherche, besoins en ingénieurs, etc., la situation n'est guère satisfaisante. La relation au livre des enseignants, celle des étudiants, celle des cadres en entreprises enfin, est généralement jugée très mauvaise. Les bibliothèques universitaires, malgré de nombreux rapports sur le sujet et des efforts financiers récents. restent largement sous-dotées. Le développement très rapide de la photocopie est à la fois le symptôme et le facteur de ces carences. Avec 60 millions de pages protégées photocopiées chaque année dans les bibliothèques universitaires ou les "boutiques de photocopie", elle affecte profondément l'économie du secteur. Enfin, le réseau de diffusion du livre scientifique est à la fois limité [entre 100 et 150 librairies] et fragile. Un colloque sur l'édition scientifique [1991] a permis de réunir l'ensemble des acteurs de la chaîne du livre : auteurs, chercheurs, enseignants, éditeurs, bibliothécaires, libraires, et bien sûr lecteurs - afin d'analyser l'état de l'édition scientifique française et de donner des orientations propres à favoriser son développement. Tous les intervenants ont souligné la nécessité de : · sensibiliser les enseignants à la prééminence de leur rôle dans l'apprentissage de la lecture scientifique, à tous les niveaux d'enseignement, prendre en compte l'activité éditoriale et pédagogique des chercheurs dans la gestion de leur carrière. · approfondir le dialogue entre les éditeurs et les scientifiques, · optimiser l'utilisation des nouvelles technologies tout au long de la chaîne éditoriale par le recours à des normes adaptées, · déployer, coordonner et mieux évaluer les aides des pouvoirs publics à l'édition scientifique, · développer les formations à tous les niveaux de la chaîne éditoriales · aider le développement des librairies spécialisées, en vue de réactiver le lectorat. Il convient de remettre à niveau l'équipement en livres des bibliothèques universitaires. Dans les bibliothèques universitaires la dépense documentaire a voisiné la moitié de la recette de fonctionnement totale. Faute de crédits suffisants, il est difficile aux bibliothécaires de suivre les coûts de documentation, en hausse de 5% par an. Si l'on compare à l'Allemagne, qui compte autant d'étudiants que la France: · on trouve 65 millions de volumes dans les bibliothèques universitaires en Allemagne contre 17 millions en France; · le nombre de places prévues dans les bibliothèques universitaires allemandes est de l'ordre de 1 pour 6 étudiants contre 1 pour 13 en France; · la durée hebdomadaire d'ouverture des bibliothèques universitaires allemandes se situe entre 60 et 80 heures contre 40 en France. Par une circulaire du 17 août 1989, le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle avait permis d'imputer les dépenses d'abonnement à des revues et périodiques scientifiques, techniques, économiques et financiers sur l'obligation de participation des employeurs au développement de la formation professionnelle continue des salariés, mais en avait exclu les livres qui contiennent cependant les connaissances de base et font la synthèse des derniers résultats de la recherche. La prise en compte des livres dans les dépenses consacrées à la formation professionnelle continue des salariés dans les entreprises a été admise dans une réponse d'Août 1994 du Ministre du Budget à une question écrite d'un parlementaire au gouvernement. Si l'édition STM française est ouverte sur l'étranger, elle est cependant loin derrière ses concurrentes américaine, hollandaise, britannique et allemande sur les marchés mondiaux. Concentrée aux deux tiers sur la francophonie, elle se heurte à l'insolvabilité croissante de ses marchés traditionnels, même si des progressions de l'ordre du doublement ou du triplement sont constatées sur certains marchés anglophones, réputés difficiles. Cependant, au-delà de ces échanges, quelques maisons ont des filiales en Europe ou ont constitué des associations avec des partenaires européens. Certaines ont tenté de pénétrer le marché américain. Chaque année, une cinquantaine de titres sont publiés directement en anglais par une dizaine d'éditeurs français. Pour les aider à assurer la promotion et la diffusion du livre français à l'étranger, les éditeurs STM ont recours à l'action collective au travers de France Édition. Des dispositions particulières au bénéfice des biens culturels pourraient réserver une fraction constante des enveloppes de crédits garantis, de l'ordre de un pour mille à l'achat de livres, ce qui permettrait sans doute d'apporter un soutien décisif à l'exportation des livres français. De la même manière, une offre de livres STM pourrait être prévue dans tous les contrats de grands travaux ou de financement de projets aidés par la coopération française [Caisse Française de Développement] ou les institutions multilatérales [Banque Mondiale, Fonds Européen de Développement] au titre des moyens pédagogiques à la formation technique. Le futur de l'édition Deux facteurs pourraient éventuellement assurer dans l'avenir un meilleur développement de l'édition scientifique destinée au grand public : d'une part, une réhabilitation de l'histoire des sciences en tant que discipline scientifique ; d'autre part, une meilleure utilisation de l'image comme vecteur privilégié du transfert des connaissances scientifiques et techniques. L'enseignement de l'histoire des sciences a longtemps été complètement négligé dans les facultés des sciences au point qu'il n'y existait pas de formation dans cette discipline. La situation aujourd'hui tend à s'améliorer. Pendant longtemps, les philosophes considéraient que l'histoire des sciences leur appartenait. Elle était, pour eux, la seule ouverture qui existait sur les sciences. Il faut reconnaître, à cet égard, qu'il n'existe pas plus d'enseignement scientifique obligatoire pour les philosophes qu'il n'existe d'enseignement obligatoire de philosophie pour les scientifiques. Il a été créé une commission d'histoire des sciences au CNRS, détachée des commissions de philosophie. Son pouvoir de recrutement demeurera cependant symbolique aussi longtemps que la réciprocité d'un enseignement de la philosophie dans le secteur scientifique ne sera pas assurée. Tous les espoirs sont aujourd'hui permis. Un récent Rapport de l'Académie des Sciences (n°35, Octobre 1995) fait le point de l'état de la question. L'interrogation principale sur l'avenir de l'édition scientifique dite de vulgarisation porte sur la place que réussira à occuper l'image comme vecteur de transfert des sciences et des techniques. Or nul ne peut, en vérité le pressentir. L'image en effet a un statut particulier dans les sciences. Certaines disciplines, comme les mathématiques, la physique théorique utilisent peu l'image comme moyen de communication. Ailleurs, l'image occupe une place ambiguë dans l'arsenal logique destiné à favoriser la compréhension du fait scientifique. En effet, une image trop élaborée est le plus souvent difficile à lire, en particulier si les échelles numériques d'interprétation ne sont pas clairement indiquées. Une image trop simplifiée, à l'inverse, offre un éventail trop large d'interprétation. L'une comme l'autre peuvent engendrer des idées fausses et renforcer l'aspect magique de la science d'autant plus que l'homme a volontiers un rapport magique à l'image quels que soient les faits qu'elle rapporte. L'image est un objet de croyance ; elle ne suscite par la critique. L'image n'en reste pas moins aujourd'hui un outil imposé de communication qui, aux yeux du grand public, tend de plus en plus à se substituer à l'écrit. Quelles que soient les réticences justifiées que manifestent les scientifiques à son endroit, le moment est venu de mieux définir comment l'image peut-être exploitée comme moyen de transfert des connaissances scientifiques et techniques sans altérer la véracité des faits ainsi transmis, ni susciter des enthousiasmes mythiques défigurant la réalité de la science. |
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